Emboîtant le pas des Verts qui avaient, dès 2001, intégré le mariage et l’adoption homosexuels à leur programme, celui du parti socialiste s’est engagé le 7 juin pour « l’homoparentalité ». Ce n’est pas vraiment une surprise, les éléphants du PS ayant tous progressivement viré au rose. A la suite de Jack Lang, Dominique Strauss-Kahn, Laurent Fabius et François Hollande se sont ralliés. Et l’homme de pointe du lobby homosexuel à l’Assemblée, le député Patrick Bloche devrait symboliquement déposer une proposition de loi en ce sens juste avant la prochaine gay pride.
Ségolène Royal a elle-même fait un pas en direction de l’union gay après avoir autrefois exprimé ses réserves. Dans ce contexte, la disparition du maire PS de Pau, André Labarrère, qui s’affirmait – bien qu’ouvertement homosexuel – hostile au mariage gay fait figure de symbole. Seul Lionel Jospin, pourtant Premier ministre du Pacs, n’est pas revenu sur les déclarations fortes qui l’avaient sorti de sa réserve à l’occasion du « mariage » de Bègles en juin 2004. Il affirmait que cette institution était « dans son principe » réservé à « l’union d’un homme et d’une femme ».
Tout porte donc à croire que le « mariage » homosexuel sera en France un enjeu des présidentielles de 2007, et peut-être le lieu d’un affrontement droite gauche. Surtout si, comme le laisse entendre le porte-parole de l’Appel des Maires pour l’Enfance, Franck Meyer, la position socialiste provoquait une levée de bouclier d’une majorité d’élus de proximité, et parmi eux de personnalités politiques notables. De quoi inciter la droite à clarifier et tenir sa position sur ce sujet.
A gauche on table sur l’effet d’entraînement des réformes opérées par les socialistes dans plusieurs pays européens. Mais les divergences au sein de l’Union pourraient rendre l’entreprise malaisée. A l’Est, la banalisation de l’homosexualité est parfois ressentie comme un néocolonialisme culturel : l’ambassadeur des Pays-Bas en Estonie vient de renoncer à ce poste en raison du mauvais accueil fait par la société estonienne à son compagnon d’origine afro-cubaine. Est-ce quand elles semblent sur le point d’aboutir que les revendications gays soulèvent la plus grande résistance ? On passe des idées aux faits.
Lors du vote du Pacs, Elisabeth Guigou, alors Garde des Sceaux, pouvait contester l’argument de ses adversaires lui reprochant d’ouvrir la porte à l’adoption homosexuelle. Pareil déni est devenu impossible. Il s’agit désormais de savoir qui l’emportera entre ceux qui se disent « défenseurs des enfants » et les promoteurs du mariage homosexuel. Les premiers affirment qu’on ne peut priver indûment un enfant d’un père ou d’une mère. Les seconds rétorquent que l’hétérosexualité ne garantit pas l’épanouissement de l’enfant. Certes, dans sa propre famille, naturellement constituée, on le sait fragile. Lorsque cette famille est éclatée puis recomposée, on mesure que le risque d’abus augmente. Plus incertaines et fragiles encore, les unions homosexuelles n’offrent-elles pas encore moins de garanties ? En Grande-Bretagne, où l’on constate le premier divorce homosexuel, moins de six mois après la loi instaurant le mariage gay, l’AFP révèle que deux hommes vivant ensemble ont été incarcérés pour avoir abusé des garçons que les services sociaux avaient cru bon de leur confier. Sans généraliser pareille dérive, il serait irresponsable d’ignorer le risque.
Heureusement, si l’enfant est sans défense, il n’est pas sans défenseur, et il suffirait d’un peu de bon sens pour déjouer des revendications outrancières. Certes, revenir à la réalité contre l’idéologie, expose à un atterrissage douloureux. A cet égard, les illusions entretenues à propos des premiers « mariés de Bègles » sont en passe de partir en fumée. On dit en effet les deux hommes précarisés et abandonnés par la plupart de ceux qui avaient instrumentalisé leur histoire. Ils sont traduits en correctionnelle pour « abus de faiblesse, vol, fraude à la caisse d’allocations familiales etc. » C’est en falsifiant un chèque de l’octogénaire qui les hébergeait gracieusement, que les deux hommes se seraient offert, pour 1000 euros, leurs costumes de noces ! Etrange anniversaire si la justice vient corroborer ce fait divers.
Tugdual DERVILLE