Nous avons déjà dit, ici, la joie qui était la nôtre de voir succéder au cardinal Jean-Marie Lustiger au siège prestigieux de Paris, Mgr André Vingt-Trois. Le nouvel archevêque connaît bien la capitale, où il est né et où s’est déroulée la plus grande partie de sa vie. Après six années d’épiscopat à Tours, son retour parmi les Parisiens constitue la plus belle des assurances pour une église qui continue son chemin d’évangile. S’il fallait un premier signe sensible de la présence et de l’autorité du nouvel archevêque, succédant à un des grands témoins du christianisme en notre temps, il aura suffi d’assister à sa messe d’intronisation à Notre-Dame. Au milieu de la ferveur des fidèles, de ses frères dans l’épiscopat venus nombreux pour l’entourer, Mgr Vingt-Trois aura su montrer la force de sa parole, la profondeur de son enseignement, la conviction de sa mission. Nous pensons, évidemment, à son homélie commentant l’évangile du quatrième dimanche de carême, celui de la guérison de l’aveugle-né.
Texte extraordinaire d’où l’archevêque puisa une méditation vivante, proche, d’une actualité totale sur le Christ lumière du monde, « qui nous ouvre la vue ». Tout découlait du salut apporté par le Fils de l’Homme jusqu’aux conséquences les plus directes dans l’affirmation du témoignage déterminé des chrétiens en ce monde. Tranquillement, l’archevêque de Paris a pu ainsi esquisser son dessein pastoral ou nous avons cru discerner la primauté de la liberté de la parole chrétienne. Rien ne saurait brimer cette liberté qui apporte la lumière, celle qui illumine les cœurs selon l’apôtre. On sait que dans le climat contemporain, il peut y avoir quelques risques à vouloir contredire les opinions établies et que dans certains cas la parole évangélique se trouve renvoyée au domaine privé où à l’espace étroitement confessionnel. Pour Mgr André Vingt-Trois, il y a une exigence universelle de l’enseignement chrétien qui rejoint chaque homme en sa profondeur et la société dans son équilibre intime, celui qui conditionne étroitement la santé morale et spirituelle dans tous les cadres de l’existence.
Dès ses premières déclarations, l’archevêque a indiqué avec clarté la façon dont il entendait exercer sa fonction, très conscient que le fait d’être, dans le sillage de saint Denis, le cent-quarantième dans la liste des pasteurs de son diocèse, lui donnait une responsabilité particulière. Comme le cardinal Lustiger, qui a exercé ce magistère pendant vingt-quatre ans, Mgr Vingt-Trois sera écouté au-delà de Paris et même de notre territoire national. De même, l’élan pastoral, la vigueur apostolique des chrétiens de la capitale ne manqueront pas d’avoir des effets d’entraînement, souvent pour rendre courage a des régions plus déshéritées. En dépit de toutes ses faiblesses et de ses dénuements, une grande confiance entoure l’Eglise de Paris dont la vitalité intellectuelle et spirituelle est reçue comme une lumière. Mais celle-ci n’appartient pas en propre à la capitale et à son Pasteur. Elle est le reflet de la Lumière que le Christ apporte à tous les hommes et qui doit, nous dit saint Paul, les illuminer.
Gérard LECLERC