Il y a quarante ans (le 21 novembre 1964), les pères du Concile Vatican II approuvaient, à une quasi unanimité, le décret sur l’œcuménisme, Unitatis Redintegratio, qui devait servir de charte à l’Eglise catholique dans son dialogue avec toutes le branches séparées de l’Eglise indivise. Un bilan de ces quarante années fait apparaître de réels succès, mais aussi des échecs et des impasses. Les réticences et les refus de la mouvance traditionaliste n’ont pas disparu, soulignant le risque d’une déperdition du message, à travers la volonté de tout réduire à un minimum commun ou, pire encore, à une adaptation idéologique aux réquisitions séculières. Mais de telles objections, qui ne sont pas à mépriser, devraient être plus un stimulant qu’un obstacle pour donner à la cause de l’unité ses vraies dimensions et rappeler la nature de ses exigences. Loin de consister en un processus d’appauvrissement, le dialogue œcuménique se doit d’approfondir et d’enrichir dans la perspective de mieux appréhender les sources communes de la foi.
Par ailleurs, il apparaît plus que jamais que la cause de l’unité chrétienne est solidaire de celle de la paix à travers les enjeux géopolitiques et historicopolitiques. N’y a-t-il pas atteinte à la vérité évangélique, au message de pardon et de réconciliation du Christ, lorsque les différences confessionnelles produisent des conflits armés entre chrétiens, suscitant le scandale et l’incompréhension. Sans doute est-il délicat – on le voit bien aujourd’hui avec le déchirement qui affecte l’Ukraine – de faire la part entre les solidarités culturelles fondées sur l’héritage des siècles et les oppositions d’ordre confessionnel. Mais ce qui est sûr, c’est que si catholiques et orthodoxes ne conjuguent pas tous leurs efforts en vue d’une réconciliation, les différends entre les deux Europes, celle liée à l’Occident et celle liée à la Russie, risquent de tourner au drame.
N’assiste-t-on pas en Ukraine, à un affrontement direct entre gréco-catholiques et orthodoxes liés au patriarcat de Moscou ? Sans préjuger du destin unitaire d’une nation et des solutions de compromis politique, on se doit de souligner l’importance d’une réconciliation authentique entre les Eglises pour disposer à l’entente des peuples et à une solution pacifique au face à face entre la Russie et l’Union européenne. Jean-Paul II s’est pleinement engagé dans cette voie, en restituant au patriarche Bartholomée Ier de Constantinople les reliques de saint Grégoire de Nazianze et de saint Jean Chrisostome. De même, la visite du cardinal Poupard au patriarche Alexis II et au métropolite Kirill de Smolensk constituent des gages précieux de coopération, là où les rapports inter-ecclésiaux se sont révélés les plus conflictuels depuis quinze ans.
Gérard LECLERC
Pour aller plus loin :
- Le défi du développement des peuples et le pacte de Marrakech - la fuite en avant des Nations Unies
- Dans les coulisses de Vatican II
- Malentendu islamo-chrétien ou malentendu entre chrétiens sur l'islam ?
- Vladimir Ghika : le contexte politique avant la guerre de 1914-1918
- Liste des ouvriers pastoraux, Evêques, Prêtres, Religieux, Religieuses et Laics tués en 2011 et 2010