Il existe une grâce propre au temps pascal, que l’on pourrait définir comme contemplation, paisible du Christ dans sa chair ressuscitée. Ce n’est vraiment que dans la liturgie qu’il nous est offert de communier à cette étonnante expérience des disciples : “C’est le Seigneur !” (Jn 21,7). Tous les chrétiens sont amenés à vivre, dans les contextes les plus divers, de ce témoignage qui éclate dans la nuit de Pâques. Il arrive même que celui-ci puisse être communiqué dans les instants privilégiés. Qu’il nous soit permis ici d’évoquer la retransmission en mondiovision de la messe du jour de Pâques depuis l’abbaye du Mont Saint-Michel. La présence de la fraternité de Jérusalem en ce haut-lieu permettait l’expression d’une liturgie d’une rare beauté, accordée à la splendeur de l’abbatiale et du site. Qui n’aurait pas été ému de ce coup d’audace, quand au moment du Gloria, les caméras nous ont montré le Mont lui-même emporté dans une sorte de danse mystique ? Notre ami, le cher père André Gouzes, aurait-il pu imaginer que sa ferveur chorale puisse trouver un tel champ d’expression cosmique et céleste ?
Mais durant ces jours, il est bien d’autres instants qui ont pu marquer l’imagination, celle qui rejoint l’élan de l’esprit, celle qui permet d’identifier la soif du Dieu vivant. Quelques exemples : les téléspectateurs de K.T.O. ont pu ainsi assister à la conclusion du pèlerinage étudiant de Chartres, et au mémorable dialogue du cardinal Lustiger avec le jeune auditoire assis sur les dalles de la cathédrale. Le message que livrait l’archevêque de Paris, en méditant les Béatitudes, n’était-ce pas le secret même de la vie révélée par le Christ, secret de bonheur qui transfigure nos vies, leur donne un sens qui n’a pas d’équivalent, puisqu’il est tout entier dans le mouvement de l’Amour trinitaire ? N’était-ce pas aussi le message que nous ont transmis les baptisés de la veillée pascale, tous ces adultes attestant dans leur vêtement blanc qu’ils accomplissent le grand passage vers la plénitude que donne l’existence en Christ ?
C’est aussi la réalité vécue par les neuf mille participants du Frat des jeunes de la région parisienne, réunis à Lourdes avec tous leurs évêques. Il fallait les entendre reprenant dans l’enthousiasme la salutation de nos frères de l’Orient chrétien : “Il est vraiment ressuscité !”. S’il y a un miracle inaltérable du christianisme, supérieur à tous les aléas du temps, aux contingences sociologiques, aux défaillances des chrétiens, il est là, dans l’espérance indestructible de la foi au Ressuscité.
Gérard LECLERC