2889-Ecclesia in Europa - France Catholique
Edit Template
Le martyre des carmélites
Edit Template

2889-Ecclesia in Europa

Copier le lien

La publication de l’exhortation Ecclesia in Europa, signée samedi par Jean-Paul II, intervient à un moment particulièrement opportun. Ce texte, d’une grande densité, vient en effet éclairer les enjeux des grands débats qui se déroulent à propos de la construction d’un vaste ensemble politique, auquel aspirent désormais la quasi totalité des peuples du Continent. L’exhortation déborde certes, très largement, cette perspective politique, mais elle la prend en charge, n’hésitant pas à intervenir, avec vigueur, dans des rappels et des définitions, que le projet réalisé autour du président Valéry Giscard d’Estaing n’a pas osé reprendre à son compte. Pourtant c’est une question essentielle. Qu’est l’Europe dans l’oubli persistant de ce qui lui a conféré l’unité spirituelle ou intellectuelle ? Le synode des évêques européens tenu en 1999 avait déjà insisté sur la notion de « concept majoritairement culturel et historique caractérisant une réalité née comme continent grâce, entre autres, à la force unificatrice du christianisme ; celui-ci a su fondre entre eux des peuples différents et des cultures diverses, et il est intimement lié à la culture européenne tout entière ».

On ne saurait s’étonner de l’insistance du Saint-Père et des évêques à rappeler cette vérité historique à temps et à contretemps. Il ne s’agit aucunement de remettre en cause la laïcité des institutions, ou encore d’ignorer l’ensemble des héritages culturels qui ont contribué à façonner l’Europe moderne. Il ne s’agit pas non plus de se prêter à on ne sait quelle crispation identitaire, qui contribuerait à attiser le choc des cultures et des idéologies. Si le christianisme a pu façonner l’âme de notre continent, c’est en vertu d’une haute conception de l’homme, puisée dans les enseignements de la Révélation, et qui est à l’origine de bon nombre des valeurs mêmes de la modernité. Toute la tradition du christianisme, en commençant par la Bible, en passant par la patristique, les doctrines médiévales, mais encore l’essor d’un humanisme chrétien à la Renaissance, celui d’un Erasme et d’un Pic de la Mirandole, la spiritualité du Grand siècle, et sans oublier le renouveau théologique qui a conduit à Vatican II, a permis l’approfondissement d’une anthropologie sans équivalent ; une vision de l’homme fondée sur une estime immense qui ne dément pas l’abîme du péché.

Sans ce trésor, non seulement l’Europe n’existerait pas, mais l’oubli de son contenu risquerait d’amener à la trahison et au désaveu de cette haute idée de l’humanité que doit maintenir la vigilance de tous les chrétiens. Certains événements indiquent à quel point l’amnésie qui résulte souvent de l’apostasie conduit au naufrage.

Le triste spectacle d’une classe politique française, inconsciente ou honteuse, qui s’affiche à la gay pride, nous montre à quel point il importe de ne pas oublier le message grâce auquel l’humanité identifie sa dignité.

Gérard LECLERC