La fermeture de la Porte sainte de la Basilique vaticane a symboliquement marqué la fin de l’année jubilaire riche en événements, mais surtout en signification. Loin d’être une parenthèse dans la vie de l’Eglise, le jubilé a lancé une dynamique dont le Pape s’est empressé de définir la trajectoire pour le nouveau millénaire. La lettre apostolique Novo millenio ineuente rappelle, par le style, l’inspiration, la force, Tertio millenio adveniente qui, en 1994, avait dessiné le projet superbement pensé du triduum préparatoire et du jubilé lui-même. Il n’y a pas de temps à perdre. Le mot d’ordre est Duc in altum(Luc 5,4), avance au large ! Le passé immédiat est encore là, présent, mais il ne s’agit pas de s’y fixer nostalgiquement. S’il faut faire mémoire, c’est avec gratitude, afin de vivre avec passion le présent et nous ouvrir avec confiance à l’avenir.
La repentance, qui fut un moment extrêmement important de l’année écoulée, n’était donc pas une façon névrotique pour les chrétiens de revivre l’histoire en disqualifiant leurs prédécesseurs. C’était, au contraire, une attitude spirituelle libératrice, exigeante aussi, car les événements passés ne sauraient être sommairement qualifiés. La complexité d’hier nous renvoie à celle d’aujourd’hui, dont il s’agit de faire le meilleur usage. Mais Jean-Paul II recentre tout sur l’essentiel, c’est-à-dire la rencontre avec le Christ, la contemplation de son visage, « considéré dans ses traits historiques et dans son mystère, accueilli dans sa présence multiple dans l’Eglise et dans le monde, proclamé comme sens de l’histoire et lumière sur notre route. »
Tout programme se trouve référé à ce visage, car il consiste à vivre à l’exemple du Christ afin de « transformer avec lui l’histoire, jusqu’à son achèvement dans la Jérusalem céleste. » Magnifique perspective, qui doit provoquer l’intelligence inventive pour trouver dans les conditions actuelles – dans ce que le père Gaston Fessard aurait appelé l’actualité historique -, les moyens et les conditions de son insertion dans le temps. Jean-Paul II en définit synthétiquement le champ, en désignant « une situation qui se fait toujours plus diversifiée et plus prenante, dans le contexte de la mondialisation et de la mosaïque nouvelle et changeante des peuples et des cultures qui la caractérisent. » Ce champ, c’est explicitement celui de la nouvelle évangélisation, dont le projet ne réclame pas moins que « l’ardeur de la prédication apostolique qui a suivi la Pentecôte. »
De l’engagement œcuménique à la promotion d’une culture de vie, en passant par le dialogue entre les religions au service de la paix, l’ambition serait démesurée si elle ne reposait sur la puissance de sainteté qu’offre à ses membres l’Eglise comme sacrement du Salut. Le ressourcement dans la prière, l’eucharistie, le pardon offert, l’écoute de la parole constituent, à l’aube du nouveau millénaire, la chance – que l’on devrait plutôt nommer la grâce – des renouveaux pour l’aventure qui s’offre à nous.