Faut-il redire sa mauvaise humeur contre Halloween, ses citrouilles et ses archaïsmes ? C’est le vieux monde qui revient en force, en son cortège halluciné et ses trompeuses catharsis. Prodigieuse parabole qui énonce la culture de mort, avec ses obsessions et sa tragique impossibilité à sortir du nihilisme. Mais comment expliquer cela à ces braves gens qui me vendent mon pain et m’accueillent dans leur déguisement funèbre, grands chapeaux clownesques vissés sur la tête ? Ils sont de si bonne foi, même ayant conscience de participer à une grande opération mercantile. Opération qui n’épargne même pas la cantine de l’école catholique de mes enfants…
Culture de mort contre culture de vie. Mais comment faire comprendre qu’il s’agit d’une option de fond, celle qui montre comment de christianisme nous retombons en paganisme ? Le paganisme se définit par la fatalité, l’impossibilité d’échapper au destin et donc à la désolation de la mort, si ce n’est par la dérision, ce qu’on appelle parfois l’humour noir, et qui a très peu à voir avec l’humour. Dès lors que le pacte a été noué avec le non-sens, l’absurdité du monde et de la vie, il n’y a plus d’échappatoire, tout juste des esquives qui rendent l’inéluctable encore plus certain.
Dans les plus hautes pensées du monde, ce parti pris pour le non être n’est pas accepté. Comment ne pas espérer de quelque façon que l’âme de bien qui se trouve à la cime de l’être, ne fasse signe vers un au-delà du visible, un mystère ineffable ? Mais ce que les grands penseurs ont conçu dans leurs audaces spéculatives, ce que les poètes confirment dans leur libre traversée des espaces, le christianisme est venu le fonder de façon telle que désormais l’espérance est vertu divine et se traduit en victoire de la Résurrection.
C’est toute la force inestimable de la Toussaint qui précède le jour de la prière pour les défunts et lui donne son élan. Si le ciel illuminé de la gloire de Dieu où sont parvenus les saints dans une joie ineffable n’existait pas, pourquoi prier pour les morts ? Ce serait vain et il faudrait mieux jouer à Halloween pour fuir. L’autre soir, à l’émission de Bernard Pivot Bouillon de culture, Philippe Sollers, vivement appuyé par l’historien Jean Delumeau, a fait un éloge du paradis, qui contraste heureusement avec la culture de mort.
Sollers, certes, peut déconcerter avec ses talents de joueur, son habileté qui lui permet d’échanger les masques, d’apparaître un jour libertin, le lendemain défenseur du Pape. Mais qu’on lise son dernier livre sur Dante et l’on connaîtra une traversée fulgurante, celle qui lui permet d’accompagner le poète de la Divine Comédie jusqu’au terme de ses découvertes immenses. C’est autrement intéressant qu’Halloween, très biblique, très catholique… Une façon d’entrevoir la divine Toussaint*.
* Philippe Sollers La Divine Comédie, Desclée de Brouwer. Entretiens avec Benoît Chantre.
Pour aller plus loin :
- Le défi du développement des peuples et le pacte de Marrakech - la fuite en avant des Nations Unies
- Liste des ouvriers pastoraux, Evêques, Prêtres, Religieux, Religieuses et Laics tués en 2011 et 2010
- OBSERVATION : SCIENCE ET MIRACLE
- SI LE LOUP PROTÈGE L’AGNEAU, ET AU-DELÀ
- SYRIE : ENTRE CONFLITS ARMES ET DIALOGUE INTERNE