François Hollande, jeudi dernier, a donc prononcé un discours très consensuel, à propos des célébrations du centenaire de la Première guerre mondiale. Jean-François Copé, Henri Guaino ont trouvé que c’était un très beau discours. L’appréciation vaut d’être retenue à un moment où l’opposition ne perd pas une occasion de pourfendre le Président et le gouvernement. Seule, semble-t-il, Marine le Pen a fait entendre un écho discordant. Cela se comprend si elle s’est sentie visée par certaines allusions du Président qui mettait en cause l’épuisement du modèle européen « alors que montent les particularismes, les séparatismes, les extrémismes et les nationalismes ». Il faudrait donc comprendre que l’unité nationale souhaitée n’est pas totale, puisqu’il semble qu’un ennemi intérieur soit implicitement désigné.
C’est qu’il est difficile d’échapper aux contraintes du combat politique, qui ne connaît ni trêve, ni vrai compromis. C’est vrai qu’en 1914 s’était réalisée la fameuse union sacrée entre toutes les forces du pays et ce que Maurice Barrès appelait dans un beau petit livre « les familles spirituelles de la France ». Pourtant cette union sacrée fut ébréchée avec la mise en cause d’un parti de la trahison et de quelques politiques non négligeables sur lesquels les historiens continuent de s’interroger. Ce n’est qu’un des aspects de ce formidable conflit qui décida du sort du XXe siècle, malheureusement dans la pire des directions possibles. Les grands totalitarismes sont nés de la Première guerre mondiale.
Il faut donc souhaiter que cette année de commémoration permette une réflexion commune approfondie, à l’aide d’une recherche historique informée et distanciée. Les premières contributions d’historiens qui se sont manifestés ces jours-ci sont prometteuses. J’ai déjà sur mon bureau toute une pile de livres sur le sujet. La distance de l’histoire permet une certaine lucidité. Puisse-t-elle profiter à la compréhension de nos difficultés d’aujourd’hui. Il est avéré qu’il n’y a pas d’histoire purement objective. Raymond Aron nous a expliqué que la démarche de la science du passé était toujours « solidaire d’une situation et d’une volonté ».
Chronique lue sur Radio Notre-Dame le 11 novembre 2013.