QUAND DEUX PLUS DEUX FONT TROIS (*) - France Catholique
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Marie dans le plan de Dieu
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QUAND DEUX PLUS DEUX FONT TROIS (*)

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Voilà quelques semaines, un lecteur du Maroc me signalait une information parue dans les journaux de ce pays et qui, on va voir pourquoi, me donne l’occasion de revenir sur le miracle, la science et l’usage qu’en font les esprits forts.

La dépêche reproduite par un journal marocain provenait des États-Unis. Selon une agence de presse américaine, une photo transmise par le Mariner satellisé autour de Mars 1 montrait clairement sur le sol de la planète quelque chose qui, sur la Terre, aurait été sans hésitation identifié par les spécialistes de l’archéologie aérienne comme les ruines d’une ville. Seulement, ce n’était pas sur la Terre, c’était sur Mars ! D’après la dépêche, certains spécialistes de la NASA n’hésitaient pas à dire qu’il s’agissait bel et bien d’une ville morte, tandis que les autres se bornaient prudemment à parler d’une structure géométrique encore indéterminée.

Le père Noël derrière la porte

– J’ai vu cette photo, me dit un ami astronome, éminent spécialiste des planètes 2 , je l’ai examinée avec soin. C’est très, très intéressant. On ne connaît ni sur la Terre ni sur la Lune aucune structure naturelle semblable, tellement géométrique, surtout dans un tel substrat où rien de régulier ne se laisse par ailleurs distinguer.

– De toute façon, la ville est à écarter ?

– À écarter ? Je ne sais pas ce que vous voulez dire ; ce que je ne sais pas, je l’ignore. Je ne sais pas ce qu’est cette structure, point à la ligne. Puisque je ne sais pas, comment voulez-vous que je vous certifie que ce n’est pas une ville ?

– Enfin, elle est peu probable ?

– Probable, probable ! Pour moi (et pour mes collègues), probable, cela n’a de sens que dans un calcul. Si je fais sauter un dé, j’ai une probabilité sur six d’avoir le six. Hors de là, qu’est-ce que cela veut dire, probable ? Où est-il, votre calcul, pour cette photo ?

– Disons, alors, que c’est peu vraisemblable.
Il leva les bras au ciel.

– Vraisemblable par rapport à quoi ? À ce que nous savons de la planète Mars ? Mais ce que nous en savons, surtout à côté de ce que nous ignorons, c’est à peu près zéro. Par exemple, on voit sur certaines photos des vallées typiquement glaciaires, ayant cette forme arrondie que les géologues reconnaissent au premier coup d’œil 3 . Le seul ennui, c’est qu’il n’y a pas de glaciers sur Mars (je ne parle pas des calottes polaires qui, de toute façon, ne méritent pas ce nom). Non seulement il n’y a pas de glaciers, mais il n’y a pour ainsi dire pas d’eau pour en faire. Alors ? Et ce n’est pas tout : sur d’autres photos, on voit très clairement des vallées avec, comme le lit d’une rivière, des affluents, des versants ravinés. Rivière de quoi ? Affluents de quoi ? Ravinés par quoi ? Rien n’est liquide sur Mars.

– Il y a peut-être eu de l’eau jadis, des fleuves, des glaciers. Tout cela a disparu, sauf les traces.

L’œil de mon ami se fit ironique.

– Eh ! Qui sait ? Mais alors, s’il y a eu de l’eau, il y a peut-être eu la vie ? Et la vie, une fois apparue sait-on où cela finit ? Pourquoi pas à une civilisation ? Avec des villes ?

– Vous croyez ?

– J’y crois aussi fermement qu’au père Noël. Si vous me disiez que le père Noël est derrière cette porte, j’irais aussitôt regarder. Je n’ai aucune raison valable de déclarer qu’une ville en ruines est impossible sur Mars. J’ai l’habitude professionnelle, en tant que savant, de travailler sur mille choses bien plus invraisemblables que le père Noël. Donc, pour la photo, eh ! bien, je ne sais ce qu’elle représente. Et j’attends d’en savoir plus pour vous dire (peut-être !) ce que c’est. Laissez les esprits forts, qui sont des ignorants, prophétiser sans savoir. J’ai remarqué que votre information a été publiée par un journal marocain. Je ne l’ai vue dans aucun journal français. Cela ne m’étonne pas. On ne la fait pas aux Français, qui savent tout sans avoir jamais rien appris, comme le remarquait déjà Molière. La photo martienne rend les astronomes perplexes. Mais pas le journaliste parisien spécialisé dans les chiens écrasés qui, aux seuls mots de « ville martienne », sait ce qu’il doit faire de la dépêche américaine : la mettre au panier. Cela me rappelle que, l’autre jour, dans une librairie très intellectuelle du Boul’ Mich’, j’ai vu le livre de mes deux collègues Ribes et Biraud sur les Civilisations extraterrestres 4 classé dans le rayon « occultisme » ! Ribes et Biraud sont deux excellents astronomes. Ils travaillent aux plus réputés radiotélescopes du monde, à Nançay, en Amérique, en Australie. Dans ce livre, ils parlent de ce qu’ils savent. Mais on ne la fait pas au chef de rayon de la librairie intellectuelle : « Civilisations extraterrestres ? Allons donc ! Venir me dire, à moi, Durand, chef de rayon, que la Terre n’est pas le centre du monde et le Boul’ Mich’ le centre de la Terre ? À d’autres ! »

J’avoue éprouver le même agacement que cet astronome quand sous la plume de faux savants qui jouent aux raisonneurs, je lis que « la science moderne » rend ci et ça « impossible », « qu’on ne peut plus y croire », qu’il faut l’ « interpréter » de telle ou telle façon.

Car, premièrement, si la science nous a appris quelque chose, c’est que ce que nous savons n’est rien au regard de ce que nous ignorons. Plus la science progresse, et plus le nombre des choses possibles augmente. Certaines sont peut-être impossibles, mais ce n’est pas sûr, et de toute façon, à supposer que cela soit, nous ne savons pas lesquelles. Si quelqu’un avait dit à nos grands-pères que dans la nature 2 + 2 peuvent ne pas faire 4, ils se fussent hâtés de le mettre au cabanon. C’est pourtant le cas dans la sommation des vitesses relativistes où 2 + 2 font toujours moins de 4. 5

– Mais, dit le chef de rayon, le nombre des choses impossibles aussi ne cesse d’augmenter.

Charlemagne radical-socialiste ?

– Encore une fois, lesquelles ? Il est certain que quelques éventualités paraissent vraiment très improbables. Par exemple, que l’on découvre un fossile de cheval dans le précambrien, ou une carte d’inscription au parti radical, dûment signée de M. J.-J. Servan-Schreiber, dans le tombeau de Charlemagne (c’est d’ailleurs exactement le même type d’improbabilité, dans les deux cas). Mais il est certain que s’il s’avérait un jour que Charlemagne cotisait au parti radical, cela prendrait sa place parmi les autres faits d’abord inconcevables que la science a admis sans se troubler. 6

Avant de dire que telle ou telle chose est impossible, renseignez-vous, que diable ! L’Association américaine pour l’avancement des sciences (AAAS), qui est la plus puissante et la plus rigoriste association de savants existant aux États-Unis, compte depuis un an dans son sein une Commission de parapsychologie. Les parapsychologues ayant publié des travaux renommés peuvent adhérer à l’AAAS. Et qu’étudient les parapsychologues ? La télépathie, la prémonition, la vue à distance, les tables tournantes. 7

Aimé MICHEL

(*) Chronique n° 88 parue dans F.C. – N° 1323 – 21 avril 1972. Reproduite dans La clarté au cœur du labyrinthe, chap. 19 « Possible et impossible – Contre le non sens », pp. 487-489.

Les Notes de (1) à (7) Jean-Pierre ROSPARS

  1. Les sondes Mariner à destination de Mars ont été lancées par la NASA en novembre 1964 (Mariner IV), février 1969 (Mariner VI), mars 1969 (Mariner VII) et mai 1971 (Mariner VIII et IX). Mariner IV passa à 10 000 km de Mars le 15 juillet 1965. Elle prit une quinzaine de photos utilisables qu’elle transmit à la Terre en différé au moyen d’un émetteur de 10 watts seulement ce qui nécessitait 8 heures et demi par image. Les astronomes et le grand public furent très surpris de ces images du sol martien tant elles ressemblaient à celles, plus familières, de la surface lunaire avec ses multiples cratères d’impact. Après plus d’un siècle de vues d’artistes sur les paysages martiens, la déception était vive. Elle devait fortement contribuer à asseoir l’idée de la singularité de la Terre dans le système solaire. Les 29 et 30 juillet 1969, Mariner VI prit 33 clichés entre 170 et 1,2 millions de km montrant le disque de Mars grossissant peu à peu dans l’objectif, chacun transmis en 5 minutes par un émetteur de 20 watts. Le 31 juillet, une seconde caméra enregistra le survol de la planète entre 10 000 et 3 400 km. Mariner VII, qui suivait de peu Mariner VI, prit et transmit 126 photos à partir du 2 août, en dépit de l’explosion d’une batterie à bord. Le succès des Mariner VI et VII passa inaperçu à l’époque tant l’attention était focalisée par les premiers pas de l’homme sur la Lune. Mariner VIII fut un échec au lancement. Par contre, Mariner IX, dont il est question dans cette chronique, fut la première sonde mise en orbite autour d’une planète, le 14 novembre 1971, juste avant les sondes soviétiques Mars 2 et Mars 3 qui arrivèrent un mois plus tard. Cette sonde Mariner permit de réaliser la première cartographie complète de la surface martienne et de reconnaître le plus haut relief du système solaire (le volcan éteint Olympus Mons qui domine la plaine environnante de plus de 22 km) ainsi que son plus profond canyon (le sillon de la Valles Marineris, ainsi nommée en l’honneur des sondes Mariner, qui atteint localement une profondeur de 10 km).
  2. Cet « ami astronome, éminent spécialiste des planètes » est Pierre Guérin, de l’Observatoire de Paris, coordonnateur notamment de l’ouvrage de synthèse Planètes et satellites (Larousse, 1967) dont il rédigea plusieurs chapitres, notamment celui sur la planète Mars.
  3. Cette structure géométrique évoquant une ville en ruine ne s’est sans doute pas révélée aussi prometteuse sur les vues plus détaillées obtenues par la suite car, à ma connaissance, on n’en a plus entendu parler. D’autres structures visibles sur les photographies ont pris le relai et sont interprétées par certains comme signes d’une activité intelligente sur Mars (voir par exemple http://metaresearch.org/solar%20system/cydonia/asom/artifact_html/default.htm). Par contre, pour la plupart des spécialistes aujourd’hui, l’eau a bien coulé sur Mars dans un passé lointain, peu après la formation de la planète il y a 4,5 milliards d’années. Bon nombre de caractéristiques du relief martien sont expliqués par ces écoulements d’eau, confirmant sur ce point les propos de Pierre Guérin (voir http://www.cnrs.fr/cw/dossiers/doseau/decouv/univers/eauMars.html).
  4. J.-C. Ribes et M. Biraud : Le dossier des civilisations extraterrestres, Fayard (1970).
  5. Aimé Michel est régulièrement revenu sur ce sujet important du possible et de l’impossible. A première vue inoffensif il s’agit en réalité d’un test clé qui éclaire (ou fixe) notre conception du monde et nos préférences métaphysiques plus ou moins conscientes. On s’en rend compte aisément dès lors que la conversation s’engage sur l’un quelconque de ces phénomènes disparates et disputés qui apparaissent dans un contexte religieux (les miracles de Lourdes, les apparitions mariales, les phénomènes mystiques, les miracles rapportées dans les évangiles..) ou non (les phénomènes parapsychologiques, les coïncidences extraordinaires, les ovnis…). Cette liste est bien évidemment non limitative. Il s’agit donc d’un champ très vaste dont l’étendue et l’interprétation varient suivant les époques et les individus.

    Les « esprits forts », qu’Aimé Michel mentionne dans la première phrase de cette chronique, rejettent le « miracle » parce qu’ils le voient comme une impossible violation des lois de la nature. Mais, objecte Aimé Michel, reprenant un argument de Rousseau (voir la chronique n° 160, La science et le mystère, parue ici le 18.7.2011) comment savoir si les lois de la Nature ont été violées puisqu’on ne peut être sûr de toutes les connaître ? Dans cette perspective le « miracle » devient une énigme qu’il devient légitime de rapprocher d’autres énigmes scientifiques dont la « respectabilité » est moins sujette à caution : la nature de la conscience, l’origine de la vie, les causes de l’évolution, la pluralité des mondes habitées… Au fond toutes les présentes chroniques ou presque s’y rapportent, directement ou indirectement.

    Il existe cependant une autre approche du miracle bien illustrée par un livre récent, Découvrir Dieu grâce à la science. Itinéraire spirituel d’un scientifique (L’Harmattan, Paris, 2006) dont l’auteur, Lucien Daly, est un scientifique, spécialiste du géomagnétisme. Ce chercheur au CNRS et enseignant à l’université Paris VI pense que la science ne pourra jamais prouver de façon directe l’existence de Dieu mais qu’elle peut le faire de manière indirecte. En effet, la science, « du fait qu’elle nous permet de connaître de mieux en mieux les propriétés de notre Univers », a la capacité de montrer que « parmi des faits que l’on peut imaginer possibles, certains peuvent se réaliser, mais d’autres sont scientifiquement impossibles et ne pourront donc jamais avoir lieu » (p. 111). Outre les « questions et interrogations auxquelles la science ne pourra jamais répondre » (telles que : quel sera le destin à long terme de l’univers ? ou pourquoi l’univers est-il apparu ?), il y a des évènements qui ne pourront jamais se réaliser, au nombre desquels il compte par exemple : voir le Big Bang au télescope (car « la lumière n’existait pas encore »), créer de la matière ex nihilo, vivre sans respirer, ou changer l’eau en vin à l’aide d’un champ magnétique. « Nous avons (…) appelé cette science qui permet de bien tracer les limites de ce qui est possible, science limitative, par comparaison à celle que l’on conçoit habituellement et que nous avons appelée science explicative puisqu’elle fournit des explications nouvelles. Si donc nous trouvons des faits qui se sont produits, alors que la science dit qu’ils ne peuvent pas se produire, alors il faudra bien admettre qu’ils trouvent leur origine dans l’existence d’autre chose que notre monde matériel, avec ses lois physiques bien précises et qui excluent de ce fait certaines possibilité. Si ces faits se produisent malgré tout, il devient difficile de ne pas penser à l’intervention de quelque chose qui nous dépasse, et l’on est évidemment conduit à penser à une intervention divine. »

    Le livre est ainsi divisé en deux parties. Dans la première, intitulée « La science explicative, une voie vers la fraternité » l’auteur présente un résumé des principaux acquis de la science, surtout en physique, et en déduit la conception de Dieu qui résulte de ses enseignements. Dans une seconde partie, intitulée « La science limitative, une voie vers Dieu », il aborde la question du miracle, qu’il définit comme « un fait que la science ne pourra jamais expliquer » (p. 113).

    Il prend comme exemple d’un tel fait le phénomène d’inédie des mystiques observé notamment chez Marthe Robin qui, de 1928 à sa mort en 1981, demeura chez elle calée sur un petit divan « sans manger, sans boire, sans dormir et ne pouvant plus ni broder ni écrire », et chez Thérèse Neumann de 1922 à sa mort en 1962 (plusieurs autres cas sont connus). Lucien Daly considère que ces « faits miraculeux (…) constituent une preuve indirecte de la divinité du Christ et donc de l’existence du Dieu des chrétiens » pour trois raisons. Primo, « ces faits sont bien authentiques. Trop près de nous, avec un nombre impressionnant de témoins de divers horizons spirituels et dont beaucoup sont encore en vie ». Secundo, ces faits ne peuvent pas être expliqués par la science : « la science, parce qu’elle est aussi limitative, est capable d’affirmer que certains évènements ne peuvent pas et ne pourront sans doute jamais se réaliser. On et ne peut pas vivre sans manger ni sans boire plus de quelques semaines ». En admettant que Marthe ait perdu 4 kg de sang et d’eau lorsque, chaque vendredi, elle revivait la passion du Christ, l’auteur estime à 10 tonnes la quantité de matière à régénérer durant ces 2700 passions. Mais alors, qui est responsable de ces faits contraire aux lois de la biologie et de la physique ? Serait-ce « une intelligence supérieure surgie d’un espace différent du nôtre » ? « Mais alors quel serait le but poursuivi par cette intelligence ? (…) [A]ucune réponse satisfaisante ne peut être apportée aux différentes questions que l’on peut se poser sur l’auteur ou l’origine de ces faits, hormis s’il s’agit de Dieu. C’est ainsi que se présente une démonstration par l’absurde. Ou bien il faut admettre que la science permettra un jour de créer de la matière à partir de rien, ce qui est absurde, ou bien il faut admettre l’existence du Dieu des chrétiens. » Tertio, « ces faits miraculeux sont reliés très fortement à la personne du Christ ». « En résumé, la démonstration indirecte de la divinité du Christ est ainsi réalisée, et deux preuves de son amour nous sont données » (p. 151). Ainsi, « les conclusions qui viennent d’être tirées de la science limitative (Dieu existe, il est bon, il nous aime tous, il nous a crées libre) » rejoignent « les conclusions remarquablement correspondantes que nous avons tirées de la science explicative (solidarité entre tous les hommes, nécessité de leur fraternité et de du respect de la liberté de chacun) » (p. 154).
    Lucien Daly a eu le courage de présenter des faits et des arguments qui méritent d’être mieux connus et discutés (ils ne le sont guère car le siècle préfère les brosser sous le tapis). Cependant, je crains qu’il ne taille à la science un habit trop étroit et ne lui pose des bornes trop strictes. C’est particulièrement vrai lorsqu’il inclut dans les « interrogations auxquelles la science ne pourra jamais répondre » une question telle que « par quel hasard les molécules se sont-elles assemblées pour conduire à un édifice aussi effroyablement complexe que l’ADN ? » (p. 112), ce qui revient à considérer l’apparition de la vie comme un problème définitivement insoluble. N’est-ce pas aller un peu vite en besogne ? Ensuite, n’écarte-t-il pas trop rapidement « la remarque surprenante de Simone Weil dans L’enracinement, qui avait pourtant une haute opinion de la science : En disant que c’est un fait contraire aux lois de la nature, on dit une chose absolument dénuée de signification. Nous ne connaissons pas les lois de la nature. Ne soyons pas si modestes ! Nous les connaissons suffisamment pour savoir si la science peut ou ne peut pas ou a des chances de pouvoir un jour, expliquer un fait qui vient de se produire sous nos yeux. » ? On aura reconnu dans cette remarque elliptique de S. Weil, l’argument de Rousseau repris par Aimé Michel. Lucien Daly ne dénie d’ailleurs pas toute valeur à cet argument car quelques lignes plus loin, il admet que « [l]a seule marge de discussion qui peut subsister concerne la possibilité d’explications nouvelles que la science du futur pourrait éventuellement fournir » (p. 114). Or, si la science du futur est essentiellement imprévisible, est-il possible d’en spécifier dès aujourd’hui les limites ? Cette attitude prudente et modeste n’interdit pas d’étudier avec respect les phénomènes physiques du mysticisme, ni même d’y discerner une voie d’accès à « une réalité qui dépasse les phénomènes » comme le montre Aimé Michel dans son livre Metanoia (voir notre discussion en marge de la chronique n° 153, Un substitut de la contemplation. Electroencéphalographie et mysticisme, parue ici le 6.6.2011), mais elle n’encourage pas à y rechercher une preuve scientifique de l’existence de cette réalité. Toutefois, que cette réserve ne détourne pas le lecteur de prendre connaissance par lui-même des faits et des réflexions que Lucien Daly a rassemblés et présentés dans son livre avec une concision, une clarté, une précision et une profondeur peu communes : il y trouvera une riche matière à réflexions de tous ordres.

  6. Voir à ce propos son texte ultérieur cité dans la note 1 de la chronique n° 106, L’avocat du diable (1.9.2010), où il mentionne comme impossibilité que « dans la main d’une momie égyptienne tout juste déterrée on trouve la traduction hiéroglyphique de cet article, avec ma signature ! »
  7. Sur la parapsychologie à l’AAS voir la chronique n° 44, L’étrange expérience d’Apollo XIV (5.10.2009).