Cette semaine, comme chaque année à l’automne, la Conférence des évêques de France se réunit à Lourdes pour examiner les dossiers d’intérêt général qui concernent la pastorale de notre pays. Je me joindrai à mes collègues journalistes dans la ville mariale, heureux de pouvoir reprendre contact avec nombre de nos pasteurs et de prendre en même temps le pouls de notre Église. Comment réagit-elle, dans une conjoncture très particulière, aux sollicitations dont elle est l’objet ? Comment appréhende-t-elle les suites des deux synodes sur la famille, alors que le sujet est particulièrement sensible chez nous, à la suite des modifications législatives qui ont affecté la structure même de l’institution et provoqué d’intenses mobilisations ? Comment est perçue cette autre question cruciale qui est celle de l’islam, dans ses dimensions nationales et internationales, et alors que l’afflux de vagues migratoires ébranle les opinions publiques et désarçonne souvent les dirigeants politiques ?
Il n’est pas possible non plus d’éluder la façon dont notre Église reçoit les orientations du pontificat du pape François. Quelles inflexions en résultent sur la vocation missionnaire des chrétiens sollicités de sortir de leur entre-soi pour aborder « les périphéries » ? D’aucuns discernent le retour d’un progressisme ecclésial qui s’était estompé dans les dernières décennies, mais que pourrait ranimer le clivage mis en évidence par les médias à propos d’une sortie du « conservatisme ». Sans doute ces catégories sont-elles approximatives, voire douteuses, quand elles ne sont pas carrément inadéquates. Mais elles renvoient à des débats sérieux. Il suffit de suivre, semaine après semaine, les interventions du Pape, pour se rendre compte qu’il n’est à proprement parler, ni progressiste, ni libéral. On pourrait même parler à son propos d’intransigeance, au sens où Émile Poulat avait défini le terme dans le contexte de l’histoire contemporaine. Toujours est-il que François provoque sans cesse à une ressaisie spirituelle et missionnaire, qui n’est pas sans conséquence pour notre Église de France.
Par ailleurs, cette Église de France, si fragile et si vivante en même temps, a vu se lever des forces nouvelles, notamment du côté de la jeunesse, dont le dynamisme n’est pas forcément pris en compte au sommet. Il serait extrêmement dommageable que se perpétue et se creuse une distance entre certaines structures de pilotage et – disons‑le carrément – ce qui s’est affirmé dans le cadre et autour de La Manif pour tous. Un événement qui a changé profondément les données du débat national, ce dont les meilleurs observateurs extérieurs, tel Gaël Brustier1, se sont rendu compte. Il serait tout de même curieux qu’un tel constat ne soit pas sérieusement analysé et intégré par les instances de la Conférence épiscopale.
Pour aller plus loin :
- Le défi du développement des peuples et le pacte de Marrakech - la fuite en avant des Nations Unies
- 3105-Cent-cinquantenaire des apparitions de Lourdes
- Vladimir Ghika : le contexte politique avant la guerre de 1914-1918
- Liste des ouvriers pastoraux, Evêques, Prêtres, Religieux, Religieuses et Laics tués en 2011 et 2010
- Jean-Paul Hyvernat