C’est une affaire entendue. L’opinion publique se passionne pour la Coupe du monde de football au Brésil, et la victoire de l’équipe de France contre le Honduras a effacé les mauvais souvenirs qui empêchaient la pleine réconciliation avec nos joueurs. De même, il est incontestable que la grève actuelle à la SNCF handicape gravement la population laborieuse et que sans cesse reconduite elle produit l’exaspération. Ne parlons pas du mouvement des intermittents du spectacle qui est de nature passionnelle. Comment l’information en général, les journaux du 20h, échapperaient-ils à ces faits dominants qui exigent une priorité totale pour leur traitement ? Et pourtant, cette hiérarchie imposée n’est peut-être pas exactement celle qui convient, si l’on veut vraiment classer les événements par ordre d’importance. L’événement majeur de ces derniers jours, c’est l’avancée spectaculaire des forces jihadistes sur le territoire irakien et l’accablement des États-Unis face à une réalité qu’ils sont impuissants à maîtriser, alors qu’ils avaient jeté toute leur puissance stratégique contre le régime de Saddam Hussein, avec l’ambition de créer un nouvel ordre mondial.
Eh bien, le nouvel ordre mondial se redessine, mais d’une façon tout à fait imprévue. Le régime iranien, qui était, il y a quelques jours encore, une sorte de grand Satan, pourrait devenir l’allié privilégié de l’Amérique contre la menace jihadiste. Oublié le contentieux nucléaire dont on redoutait qu’il ne devienne une cause de conflit mondial ? Oublié, le fanatisme des héritiers de Khomeni ? Eh bien, oui ! Là-dessus, les éditorialistes du Figaro et du Monde se retrouvent en parfait accord, c’est le sage Renaud Girard qui écrit qu’une entente irano-américaine est plus urgente que jamais.
L’opinion française, à la suite des autorités françaises, ne tardera pas à prendre conscience de ce tournant incroyable, et des défis qu’il imposera quant à la redéfinition d’une politique au Moyen-Orient.
Chronique lue sur radio Notre-Dame le 18 juin 2014.