La vie religieuse - France Catholique
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Noël : Dieu fait homme
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La vie religieuse

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Pour ce Carême, le cardinal André Vingt-Trois a décidé de faire parler à Notre-Dame quelques témoins privilégiés de la vie religieuse, puisque l’Église dans son ensemble est invitée par le Pape à réfléchir sur cet aspect essentiel de son existence la plus intime. Il s’agit là d’une réalité enracinée depuis les origines et correspondant à une sorte de respiration qui rythme le corps entier de la communion universelle. Le cycle des conférences a été inauguré dimanche par un religieux bénédictin de l’antique et vénérable abbaye de Ligugé, à laquelle même la littérature la plus contemporaine accorde une signification symbolique qui ne s’est nullement épuisée. Nous connaissons bien, pour notre part, le père Cassingena-Treverdy, à cause de ses ouvrages dont la belle érudition est soulevée par une flamme qui réactualise le trésor de la Tradition. Son étude commencée sur l’Introït dans la liturgie est un modèle du genre, tant elle nous restitue l’élan créateur de la prière ecclésiale depuis une source où il nous est indispensable de puiser, ne serait-ce que pour retrouver l’authenticité de la célébration du mystère à partir du seul texte inspiré.

Mais dimanche, le père Cassingena-Treverdy avait la mission de communiquer à son auditoire le sens même de la vie monastique dans sa pureté et son exigence inentamées depuis les grands fondateurs. Il le fit avec une certaine magnificence qui correspondait à celle du lieu, mais aussi avec l’extrême rigueur que requiert son sujet : « Au principe de la vie monastique, il y a bel et bien depuis les grands pionniers du désert d’Égypte qui en ont donné le branle, un mouvement tout à fait premier d’anachorèse, mouvement qui, loin de ne représenter qu’une amorce, est appelé à se prolonger comme à s’approfondir sans cesse. Mouvement dont le Christ en personne est l’origine et le donateur universel, dans le mystère de sa Tentation que nous célébrons liturgiquement en ce jour. Par anachorèse, on entendra moins un retirement farouche dans un no-man’s land illusoire — Je ne te prie pas de les écarter du monde, dit Jésus en parlant à ses disciples (Jn 17,15) — qu’un écart réfléchi et tactique, au sens de l’Évangile (Lc 14,28-33), qu’une prise de distance : la distance que Jésus appelle ses disciples à prendre. (…) Une distance que n’inspirent ni le mépris, ni la déception, ni la condamnation sans appel. Une distance positive, active, créatrice. Une distance pour aimer. Pour aimer celui qui, souverainement aimable, réclame tout bas que l’on se sépare, mais aussi pour aimer, comme il l’aime, lui, et depuis l’endroit d’où il aime cela même – le monde même –dont on s’est séparé à cause de lui. »

Le désert est à la fois une réalité tangible et une image métaphorique, qui invite à une prise de distance, qui, paradoxalement n’éloigne pas mais rend plus proche aussi bien de la Création, du commerce de ses frères que de soi-même, sous le regard de Dieu. C’est dire comment les chrétiens sont liés à la vie monastique où ils reconnaissent la part la plus précieuse d’eux-mêmes, celle d’un désert habité par une présence aimante, miséricordieuse, d’où s’élève une prière inextinguible.