Un téléfilm a mis récemment en scène l’engagement dans la Résistance de Daniel Cordier, qui fut secrétaire de Jean Moulin, le légendaire dirigeant du Conseil national de la Résistance. J’espère que beaucoup de jeunes gens l’ont regardé, ne serait-ce que pour comprendre ce que fut vraiment le combat de ces hommes et de ces femmes, qui furent, au moins à l’origine, très minoritaires dans la France vaincue de 1940. Plus de 70 ans après, on a parfois l’impression que l’engagement contre le nazisme était une évidence. Ce fut une telle horreur que ce régime de mort ! Bien sûr, mais il n’empêche que dans la dépression de la défaite, il fallait plus que de l’énergie, de l’héroïsme pour reprendre les armes directement sur le territoire national.
Plus que nonagénaire, Daniel Cordier est dépositaire d’une mémoire précieuse : « Il faut comprendre, déclare-t-il au Figaro, que la Résistance a été une aventure solitaire. Elle a existé misérablement en France pendant deux ans avec peu de personnes et très peu de communication avec Londres. » Cela correspond tout à fait avec ce que m’a toujours dit un de mes amis les plus proches, dont le père, compagnon de la Libération, est mort en camp de concentration. Il avait été l’un des tout premiers créateurs de réseaux dans le sud de la France. C’était une aventure non seulement risquée, mais improbable où il fallait affronter l’opinion. Ils ne furent que quelques-uns, les premières semaines, comme le futur général Leclerc, Maréchal de France, qui, pas une seule minute, n’accepta la défaite.
Alors, peut-être faut-il avoir un peu de réserve et d’humilité avant de se propulser soi-même en héros imaginaire de la Résistance. Il fallait sur le moment une détermination peu commune. Cela nous rappelle aussi que les mécanismes de l’histoire sont souvent héroïques et que les minorités peuvent forcer le sort, sinon l’impossible. Aller contre l’air du temps, se révolter contre le conformisme ambiant, cela suppose certaines qualités qui ne sont pas particulièrement goûtées dans le climat actuel. Philippe Muray se moquait de ceux qu’il appelait « les mutins de Panurge », ceux qui jouent à la révolte, mais qui sont en fait complètement intégrés dans la culture branchée de leur temps. Je sais que la référence à la Résistance vient d’être récusée par François Hollande qui rappelle que nous ne vivons pas la même époque. Sans doute, M. le Président, mais il y a des vertus morales et civiques permanentes, qui font qu’une jeunesse préfère, encore maintenant, le combat à la résignation.
Chronique lue sur radio Notre-Dame le 4 juin 2013.
Pour aller plus loin :
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