Hans Küng et son (futur) suicide - France Catholique
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Marie, secours des chrétiens
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Hans Küng et son (futur) suicide

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Le théologien suisse Hans Küng choisit explicitement de ne pas avoir à subir son 90e anniversaire : il n’a ‘’que’’ 85 ans, mais il a déjà pensé à tout. Il est atteint de la maladie de Parkinson, comme un nombre immense de malheureux, et c’est pourquoi il va (peut-être ?) recourir à la solution du suicide : « Hans Küng se plantea el suicidio por padecer un Parkinson avanzado », révèle « infoCatólica »…

Pour un théologien, pour un prêtre surtout, envisager ainsi une telle fin, une tel commencement plutôt, une telle entrée dans le Royaume de Dieu, voilà qui déconcerte et trouble. Cela d’ailleurs va dans le sens de ses travaux, qui tendent à réduire la conception que l’on peut avoir de Dieu et du Christ.

Il ne veut pas, dit-il, « subir » cette « déchéance ». « Je ne veux pas continuer de vivre comme une ombre de moi-même », a-t-il écrit dans ses Mémoires : son éditeur allemand, Piper Verlag vient d’en donner à lire les « bonnes feuilles ». À retenir particulièrement : « Je ne suis pas fatigué de la vie, mais j’en ai assez de vivre ».

Pensé à tout… Il entrevoit, si j’ose dire, que son Parkinson, assez avancé, risque de le rendre aveugle : une éventualité qui lui est insupportable1 d’où l’idée de confier le soin de sa mort à une clinique du genre Dignitas ou Exit : « L’être humain a le droit de mourir quand il n’a plus aucun espoir de continuer de mener ce qui, de son point de vue, constitue une existence humaine », écrit-il. (Mais est-ce à cet être que revient le dernier mot sur ce qui le constitue et sur ce que représente son existence du point de vue de Dieu ?)

Hans Küng vit actuellement retirée de toute vie publique : il a renoncé à écrire, le dernier tome de ses mémoires venant d’être publié. Comme déjà prêt à laisser l’envahir le poison délivré par une main non divine ?

« La mauvaise théologie, on le voit, est aussi mauvaise conseillère… », a écrit un internaute. Non, il n’est plus question ici de théologie. Il est question de tout autre chose, peut-être ou non… Je ne sais rien de cet homme sauf ce qu’il écrit sur lui, et ici sur son désir d’échapper au pire.

J’attendais naïvement de trouver dans ce que j’ai lu le mot Dieu… Depuis toujours je sais que le suicide est un des plus graves péchés, puisqu’il ôte à Dieu la décision qui lui revient en propre, Lui le maître de la vie et de la mort : gravité atténuée par la souffrance, la perte des capacités de la conscience ?… Mais ici je ne vois pas que cette conscience ait été diminuée, altérée : au contraire, elle fait simplement place à la peur. Je ne dirai pas lâcheté, ce serait un jugement impensable. La peur donc, non de la mort, il l’avoue, mais de cette « déchéance ». Ce mot revêt un sens qui fait frémir si l’on pense au Christ et à sa passion.

Un théologien, prêtre de surcroit, devrait (ou non ?) se tourner vers Celui qu’il a servi toute sa vie, ou aurait dû servir ainsi plutôt que soi-même. Je n’entends pas ici me souvenir des batailles qui furent les siennes et dont beaucoup de chrétiens s’affligèrent de ce qu’il en avait été le fomentateur 2 : je ne veux penser qu’à cet homme qui trouvera bientôt devant lui ‘’Quelqu’un’’ qui attendait qu’il gère en faveur de l’Église les « talents » reçus, fort grands.

Nul ne peut se réjouir d’une telle conclusion apportée pour l’instant à son œuvre : l’exemple donné est effrayant, alors que je vois le Christ entrer volontairement, dès Gethsémani, dans une déchéance d’une telle violence qu’une seule minute vécue en elle dépasse notre entendement, alors incapable d’en apprécier la gravité, la profondeur, la ‘’pesanteur’’.

Nous avons, dans nos agonies, à marcher aux côtés, ou derrière Lui, à Lui en offrir les douleurs, les souffrances : aussi bien pour nous-mêmes que pour tous les hommes appelés à vivre ce passage sans savoir où il les mènera. Il n’est plus temps de ruminer ce qui fut considéré, avec un certain orgueil, comme le soleil de son « soi-même » : l’oubli de soi s’ouvre sur l’accueil du Seigneur de nos vies. L’humilité la plus douce est requise. Il n’y a plus de déchéance depuis que le Christ a vaincu le mal et la mort : Lui seul est juge de nos existences, et sa justice est celle de son amour.

Me reste à ajouter Hans Küng à la liste de mes intentions de prière : nous ne pouvons pas ne pas tenter de demander à sa place – je ne comprends cela qu’à partir de ce qu’il écrit, non de ce qu’il tait et qui est, je l’espère, tout différent – que la miséricorde de l’Amour vienne chasser de son esprit ses fumées néfastes qui ne pourraient que le faire sombrer dans le lit atroce des ténèbres. Oui, que la grâce de son sauvetage lui soit obtenu par l’intercession de notre Mère à tous, si justement appelée Mère de Miséricorde.

  1. Son ‘’aveuglement’’ théologique sera-t-il effacé par cette cécité annoncée ?
  2. Fomentateur : organiser des troubles, exciter à la sédition, à la révolte. Chez un théologien provoquer, peut-être, le scandale ; éliminer des conceptions qui toujours furent de foi ?