François Hollande avait averti la presse qu’il considérait sa prochaine visite à Rome avec le Pape, comme « utile ». Pourquoi pas ? Il y a une utilité supérieure du bien commun qui justifie les démarches diplomatiques, même auprès de l’autorité spirituelle. Tirant les conclusions de ses conversations, et en premier lieu avec François, il pouvait dresser le tableau de nombreuses convergences entre les buts de la politique française et les orientations du Saint-Siège. Elles ne sont pas mineures, on aurait grand tort de les dédaigner. Que ce soit à propos de l’Afrique ou à propos de l’équilibre écologique de la planète, il est essentiel que les points de vue aient été échangés et les rapprochements soulignés. Cela ne relevait pas de la pure évidence, car on a un peu vite oublié que le Pape n’était pas du tout sur la même ligne que le président Hollande sur la perspective de frappes sur la Syrie. On mesurait mieux, au Saint-Siège, les risques d’escalade encourus à la suite d’une intervention dont les effets auraient été plus négatifs que le poids de leur valeur punitive.
On a, évidemment, noté le contraste entre les propos de François Hollande dans sa déclaration à la presse (au centre culturel Saint-Louis des Français) et le communiqué du Saint-Siège publié, comme il est de coutume à la fin de toute rencontre d’ordre diplomatique. Sans doute, le Président ne voulait-il pas insister sur le contentieux des questions sociétales, mais celles-ci avaient été bel et bien abordées, notamment avec Mgr Dominique Mamberti, ce prélat français, qui, à la secrétairerie d’État, coordonne la diplomatie pontificale. Il ne pouvait pas ignorer non plus la supplique de jeunes catholiques français, forte de plus de 100 000 signatures. Faisant part au Saint-Père du malaise et de l’inquiétude ressentis par beaucoup de catholiques de France, cette supplique désignait « les atteintes majeures aux droits fondamentaux de la personne humaine » et les attaques dont les catholiques français sont l’objet quotidiennement. François Hollande a sans doute relevé implicitement l’appel au respect des catholiques, comme il avait condamné les actions des Femen dans les églises lors de sa conférence de presse. Il est resté, en revanche, muet sur ses réformes sociétales, dont il sait qu’elles déchirent profondément la société française. De ce point de vue, le malaise, loin d’être dissipé, risque de s’accroître dans les prochains mois. Et ceux qui escomptaient que le pape François serait en décalage par rapport à ses prédécesseurs sur des points aussi graves, peuvent d’ores et déjà mesurer leur erreur. Non seulement, il a eu des mots définitifs à propos de ce qu’il appelle « la culture du rejet », mais il n’a pas hésité à donner son approbation à la Marche pour la vie, comme s’il en avait moralement pris la tête.
Pour aller plus loin :
- Vladimir Ghika : le contexte politique avant la guerre de 1914-1918
- Le défi du développement des peuples et le pacte de Marrakech - la fuite en avant des Nations Unies
- EXHORTATION APOSTOLIQUE POST-SYNODALE « AFRICAE MUNUS » DU PAPE BENOÎT XVI
- La paternité-maternité spirituelle en vie monastique est-elle menacée en Occident ?
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