Lorsque l’enfant paraît, le cercle de famille
Applaudit à grands cris. (Victor Hugo)
Savoir si nous sommes seuls dans l’univers est une question qui obsède de plus en plus les astronomes. Le dernier article consacré à ce sujet par une revue astronomique cite une bonne trentaine de publications récentes, dont plusieurs collectives (a)1.
L’article en question avance une idée excessivement simple et qui, peut-être pour cette raison, n’était encore venue à personne, du moins chez les astronomes. Ses implications philosophiques, eschatologiques même, sont d’une telle importance qu’il ne va pas manquer de multiplier encore la discussion. Allons-y de notre petite contribution.
L’auteur souligne d’abord que selon l’opinion générale des astronomes, la vie existe en abondance dans l’espace ; le nombre probable (b) des civilisations scientifiques de notre galaxie doit se chiffrer par millions. C’est à de tels nombres que l’on arrive en mettant bout à bout ce qu’on sait : nombre probable des étoiles dotées d’un système planétaire, présence universelle des acides aminés dans l’espace, déclenchement quasi immédiat de l’évolution biologique dès le début de l’histoire terrestre (montrant que la vie se développe dès que sa possibilité existe), etc.
Cependant l’auteur rappelle un argument de l’astronome anglais M. H. Hart : si d’autres civilisations que la nôtre existaient, elles auraient forcément conquis l’espace tout entier depuis longtemps, y compris la Terre, et nous ne serions pas là. Donc…2
À cela un autre astronome anglais, L. J. Cox, répond que si ces civilisations ne sont pas assez nombreuses, il se peut qu’elles n’aient pas encore conquis toute la Galaxie, ou même que la durée totale de la Galaxie ne suffise pas à l’achèvement de sa conquête : nous n’avons donc peut-être tout simplement pas encore été conquis. Cox concilie ainsi les faits connus (qui conduisent à admettre l’universalité de la vie) et l’évidence que nous n’avons pas été conquis (c)3.
Ici, passons sur l’épisode d’une discussion creuse et sans issue sur l’envie que peut avoir une civilisation avancée de conquérir la Galaxie : c’est évidemment de la science-fiction. Les astronomes, poursuivant leur réflexion, ont réussi à retrouver un chemin sûr en tournant cette discussion creuse par les lois des grands nombres.
– Prenons, disent-ils, les chiffres les plus bas possibles et admettons qu’il n’y ait que quelques civilisations plus avancées que la nôtre (supposition tout à fait invraisemblable) : il suffit qu’une seule d’entre elles ait commencé d’explorer la Galaxie pour que, compte tenu du temps que cela prendrait à une science à peine plus avancée que la nôtre, tout soit achevé en quelques millions d’années seulement4 ; or il y a des milliards d’étoiles plus vieilles que le Soleil de milliards d’année. Donc cette exploration est achevée depuis longtemps. Par conséquent on ne peut dire : « Ils ne sont pas là, donc ils n’existent pas » ; on doit au contraire se poser la question : « Qu’est-ce qui nous fait croire qu’“ils” ne sont pas là ? »
Hart répond à cela par un raisonnement intéressant : « Croire qu’“ils” sont là serait admettre l’existence des ovnis ; or la majorité des astronomes n’y croient pas ; donc je n’ai pas à exposer les raisons pour lesquelles, moi non plus, je n’y crois pas. » J’ai des raisons précises d’interpréter le raisonnement de Hart de la façon suivante : « Nos aînés, les astronomes des années 50, ont déclaré étourdiment que les ovnis n’existent pas, nous léguant ainsi, à nous, leurs successeurs, la tâche infiniment désagréable d’expliquer pourquoi ; il nous faut maintenant retourner notre veste ; je déclare donc n’avoir d’autre raison de ne pas admettre les ovnis que l’imbécillité de mes maîtres. »5
Continuons de suivre la discussion en exposant la position suprêmement habile prise là-dessus par Carl Sagan, l’un des responsables des projets Viking et, entre parenthèses, directeur de la revue Icarus6.
Sagan a compris depuis longtemps les deux points sensibles de la dispute, qu’il favorise hypocritement en prenant soin de ne pas se mouiller, si l’on me permet cette familiarité :
1° Pour ne pas avoir l’air d’un jobard, il vaut mieux laisser à d’autres la tâche mal vue d’étudier les ovnis ;
2° Il est scientifiquement impossible de continuer à douter que l’espace soit parcouru par d’autres êtres depuis des milliards d’années (d). Donc Sagan déclare ceci : « Certes, “ils” parcourent l’espace depuis fort longtemps, “ils” ont même certainement établi un “club” des civilisations avancées7 ; si nous n’en faisons pas partie, c’est que nous ne sommes pas intéressants : pourquoi nous visiteraient-ils, plutôt que des milliards d’autres plus avancés que nous ? Cependant il n’est pas exclu qu’“ils” l’aient fait quelquefois, en passant ; quant aux ovnis, la preuve est faite qu’on ne sait pas comment les étudier scientifiquement, mieux vaut donc n’en pas parler et s’en tenir à l’astronomie traditionnelle. »
C’est ici que l’on arrive à l’argument de Schwartzman, qui représente le dernier mot de la discussion publique et, je crois, la plus habile des préparations au pénible retournement de veste dont je parlais plus haut8.
On est bien obligé, dit Schwartzman, d’admettre l’infinie probabilité du « club galactique des civilisations avancées », quelle que soit la forme de ce « club » ; mais il y a un point (capital pour nous autres terriens) auquel nul n’a pris garde : c’est l’extrême brièveté du temps qui s’écoule entre les premiers pas de la science et les grandes découvertes fondamentales : maîtrise de l’atome, radioastronomie, premiers pas dans l’espace ; cette période, on le constate sur la terre (entre Galilée et Einstein-Von Braun), ne dure que quelques siècles ; quelques siècles, comparés aux temps astronomiques qui se chiffrent en milliards d’années, ce n’est qu’un bref éclair ; de sorte qu’à un moment quelconque de l’histoire galactique, il n’y a certainement que quelques civilisations en train le vivre ce bref éclair ; sans doute même cet événement si fugitif n’est-il jamais vécu que par une civilisation à la fois, de sorte que l’humanité terrestre serait en train de vivre une expérience en ce moment unique dans la Galaxie entière.
Mais s’il en est ainsi, conclut Schwartzman, il est infiniment probable que le « club galactique », c’est-à-dire l’Univers pensant tout entier, a présentement les yeux fixés sur nous ! D’où la conclusion de Schwartzman : les ovnis peuvent être la manifestation de notre situation présentement unique dans l’univers ; ils attestent le fait qu’en ce moment nous constituons une espèce unique, objet d’une attention universelle, et peut-être plus qu’une attention : une surveillance. Lorsque l’enfant paraît…
À voir comment la discussion que je viens de résumer se poursuit dans les revues astronomiques, on peut être sûr qu’elle va s’étendre, déborder cette science, atteindre à des problèmes que personne jusqu’ici n’espérait pouvoir soulever par la démarche scientifique, et en premier lieu l’avenir de l’humanité 9.
Ils sont aveugles, ceux qui ne voient devant nous que ténèbres. Les hommes vont tout simplement redécouvrir l’infinie Puissance et l’infinie Sagesse un instant occultées par leur orgueil.
Aimé MICHEL
(a) David W. Schwartzman : The Absence of Extraterrestrials on Earth and the Prospects for CETI (l’absence d’extraterrestres sur Terre et la recherche des intelligences extraterrestres), dans Icarus, vol 32, 1977, p. 473. Icarus, publié en Amérique, est la plus importante revue astronomique mondiale consacrée aux planètes.
(b) Le mot « probable » est naturellement employé par l’auteur dans son sens mathématique : « ayant les plus fortes chances d’être le nombre vrai ». Cela ne veut pas dire : « Il y a peut-être d’autres civilisations, et qui sait, même des millions », mais « il y a d’autres civilisations, et c’est en les comptant par millions qu’on risque le moins de se tromper. » À mon tour je précise que je ne prétends pas que c’est là la vérité, mais seulement, comme le dit l’auteur, « l’opinion qui prévaut chez les astronomes ».
(c) Articles de Hart et Cox dans le Quarterly Journal of the Royal Astronomical Society, N° 16, 1975, et 17, 1976.
(d) Le lecteur français peut mesurer l’habileté dialectique de Sagan en lisant son livre Cosmic Connection (Le Seuil).
Chronique n° 303 parue dans F.C. – N° 1623 – 20 janvier 1978
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Notes de Jean-Pierre ROSPARS du 2 mai 2016
Notes de Jean-Pierre ROSPARS du 2 mai 2016
- L’article qu’Aimé Michel cite en note est paru dans un journal prestigieux, Icarus, alors dirigé par Carl Sagan (voir note 5). Son auteur, David Schwartzman, à l’époque jeune biogéochimiste de l’université Howard à Washington D.C., où il exerce toujours, n’a pas fondamentalement changé d’idée (voir note 8). Il a publié ces dernières années des travaux fort intéressants sur le rôle de la température de surface de la Terre depuis les origines. Il a montré que cette température qui était de l’ordre de 80 °C il y a 4 milliards d’années (Ga) n’a cessé de diminuer, surtout depuis 1,5 Ga sous l’influence de la végétation, jusqu’à une douzaine de degrés aujourd’hui. Les innovations évolutives majeures (phototrophie, photosynthèse avec libération d’oxygène, émergence des eucaryotes) se sont produites dès que la température est descendue en dessous de leurs limites supérieures de température (voir par exemple son chapitre écrit avec l’astronome Charles Lineweaver, « Temperature, Biogenesis, and Biospheric Self-Organization » in A. Kleidon et R. Lorenz R, eds. Non-equilibrium thermodynamics and the production of entropy: life, Earth and beyond, New York: Springer, 2005, p. 207-217). L’acronyme utilisé par David Schwartzman dans l’article cité est bien CETI (communication avec des intelligences extraterrestres) et non SETI (recherche des intelligences extraterrestres). Il va sans dire que la question de la vie et de l’intelligence dans l’univers « obsède » toujours autant sinon plus les scientifiques aujourd’hui qu’en 1978 et pas seulement les astronomes. La découverte d’une vie extraterrestre, même fossile (sur Mars par exemple), serait révolutionnaire (voir la chronique n° 266, Une planète rebelle – Y a-t-il une vie sur Mars ?, 30.11.2015) et l’on rêve de la mettre un jour en évidence sur les exoplanètes. Les recherches SETI sont moins prisées et l’éventualité de CETI considérée avec beaucoup plus de suspicion aujourd’hui que jadis (voir la note 6 de la chronique n° 265, Vous y croyez, vous, aux extraterrestres ? – Un formidable problème : la pensée non humaine dans le vaste univers des étoiles, 9.11.2015).
- L’article de Michael Hart, professeur de physique à l’université Trinity de San Antonio au Texas, intitulé « Une explication de l’absence d’extraterrestres sur Terre » (Quart. J. R. Astro. Soc., 16, 128-135, 1975) a été reproduit dans son recueil publié avec Ben Zuckerman, Extraterrestrials : Where are they? (Pergamon, New York, 1982). « En raison de leur formation, y écrit Hart, la plupart des scientifiques ont tendance à ne tenir aucun compte des informations qui ne résultent pas de mesures. C’est, sur la plupart des sujets, une précaution raisonnable pour éviter l’intrusion d’arguments métaphysiques. Sur le présent sujet, cependant, cette règle a conduit plusieurs d’entre nous à négliger un fait clairement empirique de grande importance, à savoir qu’il n’y a pas d’êtres intelligents venus de l’espace maintenant sur Terre. » Hart regroupe les explications de ce fait de base, qu’il appelle « fait A », sous quatre rubriques : a) les explications « physiques » qui affirment que les voyages spatiaux sont impossibles pour des raisons astronomiques, biologiques ou technologiques ; b) les explications « sociologiques » qui supposent que les extraterrestres ont choisi de ne pas venir sur Terre, y compris par manque d’intérêt, de motivation ou d’organisation ou pour des raisons politiques ; c) les explications « temporelles » qui tiennent que les civilisations avancées sont trop récentes pour avoir eu le temps d’atteindre la Terre ; d) les explications selon lesquelles la Terre a été visitée par des extraterrestres bien qu’on ne les observe pas actuellement. Hart discute chacune de ces explications tour à tour et les rejette toutes en raison de leurs insuffisances. En effet, tout mécanisme explicatif s’appliquant dans la moitié des cas (voire 9 fois sur 10) ne peut suffire selon lui à expliquer le fait de base. Hart conclut que l’idée que « des milliers de civilisations avancées sont dispersées à travers la Galaxie est très peu plausible à la lumière du fait A ». Il en tire deux conséquences : a) une recherche extensive de messages radio en provenance d’autres civilisations est probablement un gâchis de temps et d’argent ; et b) à long terme, des civilisations descendant directement des nôtres occuperont probablement la plupart des planètes habitables de notre Galaxie. « En attendant, le fait A fournit un fort argument appuyant l’idée que nous sommes la première civilisation apparue dans notre Galaxie, même si la cause de notre priorité n’est pas encore connue. »
- L’explication de Cox est une variante des explications c) de Hart (les autres civilisations sont apparues trop récemment pour avoir eu le temps de nous atteindre) mais en supposant que le nombre de civilisations dans la Galaxie est peu élevé.
- Sur le temps que prendrait l’expansion galactique d’une telle civilisation, voir la chronique n° 296, notamment la note 6.
- De fait, Michaël Hart consacre un court paragraphe à une variante de son explication d) sur des visites d’extraterrestres dans le passé. Cette variante « que nous pouvons appeler “l’hypothèse ovniˮ, écrit-il, est que les extraterrestres sont non seulement arrivés sur Terre mais qu’ils sont toujours ici. Cette version n’est pas réellement une explication du fait A, mais plutôt un rejet de celui-ci. Puisque très peu d’astronomes croient à l’hypothèse ovni il ne semble pas nécessaire de discuter mes propres raisons de la rejeter. » Je ne sais pas à quelles « raisons précises » Aimé Michel fait ici allusion pour expliquer la phrase sibylline de Hart. Ces raisons tiennent-elles à la connaissance du dossier des ovnis par Hart ou à des informations personnelles sur l’opinion de Hart ? Sans exclure que Hart puisse avoir entretenu les idées originales que lui prête Aimé Michel sur ce point, rien n’indique qu’elles aient été partagées par une fraction significative de ses collègues astronomes (voir le sondage auprès des astronomes du physicien Peter Sturrock de l’université Stanford dans la note 2 de la chronique n° 300, Mystérieux objets célestes – La méthode scientifique est-elle inapte à résoudre leur énigme ?, 11.04.2016). Quoi qu’il en soit on ne peut que regretter que Hart ait botté en touche plutôt que de se donner la peine d’expliquer précisément pourquoi l’hypothèse de visiteurs extraterrestres présents dans l’environnement terrestre, mais sans contacts ouverts avec l’humanité, ne méritait pas d’être discutée en détail.
- Carl Sagan (1934-1996) a été pendant toutes ces années la personnalité scientifique dominante sur la question de la vie et de la pensée extraterrestres, notamment grâce à ses talents de vulgarisateur. Son livre avec Iosef Chklovski Intelligent Life in the Universe (1966) est un classique (voir la chronique n° 68, Les savants russes et les anges, 01.03.2011). Il a joué un grand rôle dans la conception du projet Viking et a toujours soutenu le projet SETI (sur ces deux points voir les chronique n° 265 et 266 citées plus haut) mais s’est montré très critique à l’égard des ovnis et de leur étude. Voici un de ses arguments contre les ovnis : s’il y avait de nombreuses civilisations autour de nous, alors l’apparition d’une civilisation comme la nôtre doit être très commune (ce qui réduit les chances d’une visite en raison même de notre banalité). Inversement si elles sont rares, alors il n’y aura pas assez de civilisations suffisamment avancées pour nous envoyer des visiteurs. De toute façon, on ne peut expliquer par de tels visiteurs qu’une petite fraction des 10 ou 20 000 cas d’ovnis rapportés (« UFO’s : The extraterrestrial and other hypotheses », in UFO’s A Scientific Debate, C. Sagan et T. Page Eds., Cornell University Press, Ihaca et Londres, 1972, pp. 265-275 ; il reprend ces arguments dans son livre Cosmic connection, Seuil, Paris). Pourtant, il se révèle beaucoup plus imaginatif quelques années plus tard dans son roman Contact (1985) : son héroïne, Ellie Arroway, peut-être inspirée de l’astronome Jill Tarter, détecte des signaux extraterrestres ; grâce à leur décryptage, une machine est construite lui permettant de gagner le centre de la Galaxie via des « trous de vers » artificiels (des modifications de l’espace-temps capable de rapprocher des régions éloignées de celui-ci) et d’y rencontrer un extraterrestre ayant pris une apparence humaine… Alors à quel Sagan faut-il se fier, au scientifique ou au romancier ?
- L’expression « club galactique » a été proposée par le physicien et radioastronome d’origine australienne Ronald Bracewell (1921-2007) de l’université Stanford dans son livre The Galactic Club. Intelligent life in outer space (Freeman, San Francisco, 1974). Il appelle ainsi les civilisations qui sont parvenues à durer (peut-être en maitrisant les causes qui conduisent à de courtes durées de vie) et qui sont entrés en contact les unes avec les autres au moyen d’échanges radio. Dans le dernier chapitre de son livre il écrit : « Mon opinion est que nous ne sommes pas seuls – que nous ne sommes pas la seule communauté à avoir accédé à la connaissance des lois de la nature et à avoir commencé à maitriser la nature. Quelque part dans cette galaxie ou une autre il y a, je pense, une autre vie intelligente. Où ils sont, si et quand ils se révèleront, je ne le sais pas et je ne peux proposer aucune action immédiate de notre part susceptible de nous le dire. »
- L’article de David Schwartzman présente une particularité unique qu’Aimé Michel ne souligne pas : parmi ses 26 références bibliographiques huit sont relatives à des travaux en ufologie ou sujets connexes. Les auteurs cités sont Robert Baker (communication à un symposium sur les ovnis en 1968), Stanton Friedman (communications au MUFON, 1973 et à un symposium de l’AIAA, 1975), Allen Hynek (pour son livre The UFO Experience, 1972), James McCampbell (pour son livre Ufology, 1973), Peter Sturrock (pour son sondage de 1977 auprès de membres de l’AAS cité plus haut), Robert Temple (pour son livre The Sirius Mystery, 1976) et Jacques Vallée (The Invisible College, 1975). A ma connaissance il n’y a eu aucun article publié par la suite dans des journaux professionnels destinés aux astronomes faisant une part aussi belle à ce sujet épineux. Le « retournement de veste » qu’Aimé Michel pensait devoir se produire à la suite des discussions scientifiques précédentes ne s’est cependant pas produit. L’huitre qui s’était un instant ouverte s’est refermée. Les milieux astronomiques intéressés par la recherche de civilisations extraterrestres et une éventuelle communication radio avec elles sont plus que jamais hostiles à toute discussion ouverte sur la question des ovnis comme nous avons déjà eu l’occasion de le signaler, voir la note 4 de la chronique n° 265. Ce refus de la discussion ne s’explique pas d’abord par des arguments scientifiques mais plutôt par des raisons de politique scientifique. Ils ne sont donc pour rien dans les initiatives prises ici et là et de temps à autre en faveur de l’étude des ovnis allégués. David Schwartzman lui-même ne parle plus guère d’ovnis mais il continue de défendre des thèses dans lesquelles le concept même d’une présence extraterrestre sur Terre ou dans son voisinage n’est pas une incongruité. Qu’on lise par exemple son texte de mai 2010 « Retour à SETI : rejoindre le Club Galactique » (http://www.astrobio.net/topic/deep-space/alien-life/seti-redux-joining-the-galactic-club/). Il y défend l’idée que l’explication la plus probable du « Grand Silence » est que les membres du Club Galactique ne nous jugent pas dignes d’y entrer car nous sommes trop primitifs : le silence est donc délibéré et strictement appliqué. Par contre, pense-t-il, nous sommes surveillés depuis très longtemps, soit par une sonde située dans le système solaire (cachée par exemple dans la ceinture d’astéroïdes), soit par de puissants télescopes. Si nous voulons entrer dans le Club il nous faudra d’abord reconstruire notre économie pour qu’il n’y ait plus ni guerre ni pauvreté et que la biodiversité soit préservée car « nous ne devons pas attendre que le Club Galactique nous sauve de nous-mêmes ».
- Aimé Michel pensait que ces discussions allaient s’étendre et déborder le champ de l’astronomie. En fait les astronomes ont plus ou moins cessé de spéculer à ce sujet, du moins dans les journaux scientifiques : toutes les hypothèses ayant été envisagées sans qu’il soit possible de tirer des conclusions fermes, ils ont préféré abandonner une discussion jugée stérile. Pour une synthèse récente de ces discussions, voir Stephen Webb : Where is Everybody ? Fifty solutions to the Fermi Paradox and the Problem of Extraterrestrial Life, New York, Copernicus (2002). D’un côté, une minorité continue cependant de s’intéresser à la détection des civilisations extraterrestres (voir la chronique n° 265 citée plus haut) mais les principales avancées ont lieu dans la détection des planètes extrasolaires ce qui permet de réfléchir dès maintenant à la détection sur ces nouveaux mondes de signes de vie et, pourquoi pas, d’intelligence. D’un autre côté, les réflexions sur l’avenir à court et long termes se sont développées sous la pression des soucis écologiques. Toutes ces réflexions ne font que rendre plus pressantes les interrogations sur l’avenir de l’humanité. Ces interrogations étaient au cœur de la pensée d’Aimé Michel comme on peut le voir par exemple dans la chronique n° 281, La porte étroite – Nous approchons du temps où l’homme devra changer son cœur ou disparaître, 29.02.2016.