J’ai été recruté comme secrétaire de rédaction par Robert Masson en 1990, mais je connaissais France Catholique depuis les années 1970. Au lycée, un professeur m’avait incité à m’intéresser aux travaux de Jean-Louis Loubet del Bayle sur « les non-conformistes des années 1930 ». J’avais alors découvert l’aventure intellectuelle et spirituelle du surprenant Jean de Fabrègues… À l’époque, Fabrègues, puis ses successeurs, Louis-Henri Parias ou Luc Baresta, imposaient un niveau intellectuel en théologie, philosophie, politique… qui, je l’avoue, dépassait mes capacités ! Je me suis intéressé de nouveau à France Catholique quand mon ami Gérard Leclerc a été recruté par Robert Masson.
Celui-ci avait su impulser à ce titre une dynamique, notamment sur le sujet des dissidents soviétiques. France Catholique fut l’un des premiers journaux à rendre compte de L’Archipel du Goulag d’Alexandre Soljenitsyne, grâce à Yves Hamant, son premier traducteur.
Le public suivait avec passion. En 1985, le journal a réuni à l’Unesco un congrès rassemblant des milliers de personnes. Robert Masson animait, avec un véritable souffle missionnaire, des sessions qui ont marqué leurs participants. Mgr Lustiger accordait respect et confiance à Robert et à Gérard.
La suite fut moins facile pour France Catholique. Notre aventure entrepreneuriale n’a pas été un long fleuve tranquille ! Certains conseils de rédaction – avec les fortes personnalités de Jean-Marie Domenach, René Pucheu, Aimé Michel, Olivier Clément… – ont été hauts en couleurs ! D’autres empoignades, sur fond de baisse des abonnements, ont été parfois décourageantes… Sans ces crises, je n’en serais peut-être pas devenu le directeur… Je ne sais pas si c’est à mettre à mon crédit !
Mais nous avons été soutenus. Comment ne pas remercier les Pères Bernard Bro, Michel Gitton, François de Vorges, et tant d’autres amis comme Hervé Catta, Paul Guinard ou Patrick Nodé-Langlois, au départ de notre nouvelle société de presse ? Nous avons tenu… Durs avec nous-mêmes et sans doute, pour ma part, trop dur avec les autres. Avec toujours le sentiment que nous vivions les derniers jours ! Et puis, en 2018, nous avons eu l’opportunité d’intéresser ce groupe puissant qui a donné au journal la dimension qui est la sienne aujourd’hui. Un soulagement et une sorte de consécration professionnelle.
Luc Baresta disait que France Catholique a une grâce particulière : « C’est un journal qui ne fait pas perdre la foi à ses collaborateurs et à ses lecteurs. » Curieuse formulation ! Mais cela nous a aidés à tenir et, peut-être, à progresser. Avec nos abonnés, devenus des amis.