Nous avons beaucoup de mal à quitter la Provence et encore plus à quitter la Méditerranée. Toulon est une ville mystérieuse et le voyageur qui va de la gare maritime à la gare ferroviaire en montant ou de la gare ferroviaire à la gare maritime en descendant ne met pas longtemps à chercher où peut être le centre de cette ville comprimée entre les montagnes et la mer, sinon dans ce qui est à l’évidence le lieu d’où elle vit : le port, la rade. Dans toute son histoire, Toulon n’a pas été seulement un port, mais un port militaire. Aujourd’hui encore, c’est la Marine nationale qui lui donne ses lettres de noblesse et qui fait la plus grande partie de son habitation.
De Bonaparte aux Alliés
L’histoire de Toulon épouse l’histoire contrastée de la France. C’est ici que le jeune Bonaparte gagna ses étoiles de général et c’est ici aussi que s’effectua un débarquement des Alliés, en août 1944, pour la Libération de la France. C’est ici encore que la flotte française se saborda en 1942 pour ne pas tomber aux mains des Allemands qui avaient envahi la zone libre. Napoléon Bonaparte illustre bien ce que fut cette ville royaliste mais non pas ouverte aux Anglais, républicaine et patriote mais rebelle aux excès de la Terreur.
Aujourd’hui elle est toujours exubérante de vie et ses quartiers si disparates se sont réunis pour célébrer le grand port de la Méditerranée qui, même sur le plan commercial, parvient à concurrencer Nice et Marseille. Toulon est une ville qui vit, non seulement de son passé mais de ce qu’elle offre aujourd’hui. Elle est aussi la terre où on voit fleurir les renaissances de l’âme provençale et de la France catholique.
Dans ses quartiers jadis perdus, qu’on appelait Chicago et que les marins connaissaient comme le royaume de la prostitution, le voyageur voit passer les robes blanches des Missionnaires de la miséricorde divine qui s’en vont évangéliser dans les rues et sur les plages et qui font partie du paysage toulonnais. Devant l’église Saint-François-de-Paule qui domine la place du marché, en face du port, les foules priantes vont et viennent.
L’évêque de Toulon, Mgr Rey est connu pour l’élan apostolique qu’il a donné à son diocèse et la ville vibre aux accents de cet élan. Les Missionnaires de la miséricorde divine en sont le fer de lance et toute cette renaissance catholique est immergée dans la population. Les grands pèlerinages se font aux accents des chants provençaux et la population venue de l’Algérie n’est pas oubliée.
À Toulon, la foule se répand dans les marchés et sur le bord de mer. Elle dévale sur les plages. Elle rentre dans les églises ou en sort. Elle chante, elle prie, elle fait la fête. C’est ici une Provence et une Méditerranée qui rendent au soleil sa lumière et qui donnent la joie au cœur à celui qui traverse la ville.
Ainsi, Toulon n’est pas infidèle à son passé et prouve en actes, dans le présent, combien cette fidélité peut être source de renouveau.