"Tactique du diable", de C. S. Lewis : déjouer la tentation - France Catholique
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Marie dans le plan de Dieu
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« Tactique du diable », de C. S. Lewis : déjouer la tentation

Quels sont les moyens les plus efficaces pour pousser l’homme à la damnation ? Dans un ouvrage devenu célèbre, le père du Monde de Narnia, Clive Staples Lewis, liste les occasions de chute… et comment les éviter.
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Le Génie du Mal, Guillaume Geefs, cathédrale Saint-Paul de Liège (Belgique)

© Luc Viatour / https://Lucnix.be

Il fallait bien l’esprit britannique pour imaginer une telle correspondance. Écrit en 1942 par C. S. Lewis – auteur du Monde de Narnia et converti au christianisme grâce à l’influence, entre autres, de son ami J. R. R. Tolkien –, Tactique du diable reprend les lettres envoyées par le démon Screwtape, tentateur expérimenté et fonctionnaire de l’Enfer, à son jeune neveu Wormwood. Tout y est inversé : l’« Ennemi », c’est Dieu ; le « protégé », c’est l’homme que le jeune démon tente de faire chuter ; et le « Père d’en bas », Satan.

« Une pente douce et feutrée »

Le « chemin le plus sûr pour l’enfer est celui qui y mène progressivement » explique Screwtape, décrivant avec délectation « la pente douce, bien feutrée, sans virages trop brusques, sans bornes kilométriques ni poteaux indicateurs ». Là réside l’idée maîtresse du livre de Lewis : la tentation est rarement spectaculaire et le père du mensonge est d’autant plus dangereux qu’il est pragmatique. Orienter le regard de l’homme vers soi plutôt que vers Dieu, lui faire croire que la valeur d’une prière ne vaut que par le résultat obtenu, l’enfermer dans l’anxiété de l’avenir pour lui faire oublier que le Salut se joue dès aujourd’hui… Au fil des lettres, Screwtape déroule les immuables tactiques du diable pour ravir l’âme à cet « Ennemi » qu’il exècre. Et s’il se heurte aux vertus, Satan peut compter sur l’orgueil – à l’origine de sa déchéance – pour attraper l’homme : « Toutes les vertus deviennent moins redoutables pour nous dès qu’un homme en a pris conscience, et cela est particulièrement vrai de l’humilité. »

« Au sujet du diable et des démons, les hommes peuvent commettre deux erreurs. Elles sont diamétralement opposées mais aussi graves l’une que l’autre, prévient C. S. Lewis dans sa préface. L’une consiste à nier leur existence, l’autre à y croire mais à leur porter un intérêt excessif et malsain. » Si le diable n’est pas tout-puissant, il n’en reste que la partie n’est jamais gagnée avant que l’homme ne rende son dernier soupir. Aussi, Tactique du diable dessine-t-il très clairement des moyens de résistance au mal qui, tout comme la tentation est rarement spectaculaire, résident dans la simple vertu de foi patiemment déployée, en particulier dans l’épreuve : « Notre cause, écrit le démon, n’est jamais autant menacée que quand un homme qui ne désire plus faire la volonté de l’Ennemi, mais qui l’accomplit quand même, contemple un monde où toute trace de Dieu semble avoir disparu, demande pourquoi il a été abandonné – et obéit tout de même. »

Une charge contre la modernité
Exposant des tactiques de tout temps, les lettres de Screwtape n’en demeurent pas moins un portrait au vitriol de la modernité, où Lewis fustige aussi bien l’idée d’un « Jésus historique » qui serait « libéral et humanitaire » pour les uns, « marxiste et révolutionnaire » pour les autres, ou encore l’offensive contre la « chasteté » à travers l’attaque contre l’institution du mariage et la chosification du corps féminin, dont les canons de beauté s’incarnent dans des critères « éphémères ». « Nous orientons de plus en plus le désir de l’homme vers quelque chose qui n’existe pas – laissant l’œil jouer un rôle toujours plus important dans sa vie sexuelle tout en rendant ses exigences toujours plus difficiles à satisfaire. Ce qui va en résulter, tu n’as pas de peine à l’imaginer ! » se réjouit ainsi Screwtape.

Si l’on peut déplorer, anglicanisme de son auteur oblige, l’absence notable de la mention des sacrements comme moyen effectif de résistance au mal, Tactique du diable reste une lecture profonde et enlevée, dont la brièveté en fait une idéale lecture de Carême, temps par excellence du combat spirituel.

Tactique du diable. Lettres d’un vétéran de la tentation à un novice, C. S. Lewis, éd. Empreinte Temps Présent, 2010, 144 pages, 16,20 €.