Au monastère Saint-Maron à Annaya, perché dans les montagnes à 50 km au nord-est de Beyrouth, les moines ne cessent d’enregistrer les grâces accordées par l’intercession de saint Charbel. En mai 2023, 29 349 miracles étaient recensés, dont 10 % concernaient des non-chrétiens. D’autres sources en dénombrent même 126 000 ! Chaque 22 du mois, le monastère attire des milliers de personnes pour un pèlerinage en mémoire de la plus célèbre guérison opérée par l’humble ermite : celle d’une mère de famille, Noha Al-Chami, devenue hémiplégique en 1993 après un rétrécissement des artères au niveau des carotides. Saint Charbel lui apparut en rêve et procéda à une intervention chirurgicale dont les cicatrices visibles au réveil ont révélé la signature céleste.
« Histoire de Dieu »
Qui est donc saint Charbel, qui soigne les corps et les âmes depuis sa montée au Ciel ? Né Youssef Maklouf, il voit le jour le 8 mai 1828 à Bekaakafra, un village maronite perdu à 1 800 mètres d’altitude. Fils d’une modeste famille de paysans, orphelin de père à 3 ans, sa mère lui transmet une foi profonde. Jeune berger, il profite de la garde du troupeau pour prier longuement la Vierge Marie dans une grotte.
Attiré dès l’enfance par la vie monastique, il quitte le foyer familial en pleine nuit pour entrer à 20 ans au monastère Notre-Dame de Mayfouk, où il choisit le prénom de Charbel – qui signifie « histoire de Dieu », en araméen – un illustre martyr de l’Église d’Antioche. Ordonné prêtre à 31 ans, il passera seize ans au monastère Saint-Maron d’Annaya avant de souhaiter une vie solitaire. Ses supérieurs, ayant du mal à accepter sa volonté, demanderont un signe et seront vite exaucés : la nuit même, ils remarquent qu’une lumière brûle toute la nuit dans la cellule du Père Charbel. Sa lampe éclaire toute la pièce… alors qu’elle est remplie d’eau et non d’huile ! C’est ainsi qu’au matin du 15 février 1875, Charbel obtiendra de se retirer dans l’ermitage Saint-Pierre-et-Saint-Paul, proche du monastère. Durant vingt-trois ans, il passera des heures à genoux en adoration devant le Saint-Sacrement. Il célébrera la messe avec ferveur, fera pénitence par une vie de pauvreté et lira dans les âmes de ses rares visiteurs. À 70 ans, frappé d’hémiplégie, il agonise pendant huit jours en répétant « Abou Tkoshto » qui veut dire « Ô Saint Père » en syriaque, avant de rendre son dernier souffle le 24 décembre 1898.
Toute sa vie, le Père Charbel brilla de sainteté en donnant l’exemple d’un homme absorbé dans la prière, tout en témoignant d’une gaieté de cœur. Mais la vie de l’ermite prend une dimension extraordinaire après sa mort. Sitôt après son décès, les moines constatent que son corps exsude un liquide huileux. Des lumières mystérieuses sont visibles sur sa tombe, qui devient un lieu de pèlerinage. Quarante-cinq jours après son inhumation, le corps est découvert intact, exsudant toujours un liquide qui ressemble à de l’huile. Les moines vont le conserver durant vingt-sept ans, en le lavant deux fois par semaine et en le faisant parfois sécher sur la terrasse du monastère !
Le corps de saint Charbel a connu quatre exhumations. Chaque fois, des experts ont constaté l’intégrité du corps et le prodige de l’huile. Le Père Charbel Maklouf a été canonisé le 9 octobre 1977 par Paul VI qui l’a évoqué comme « un fils du Liban bien singulier […] enivré de Dieu ».
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