« Rejeter un article du Credo, c'est le rejeter en entier » - France Catholique
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Le martyre des carmélites
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« Rejeter un article du Credo, c’est le rejeter en entier »

« Rejeter un article du Credo, c’est le rejeter en entier »

Le Credo est l’expression intangible et universelle de la foi, souligne l’abbé Guillaume de Tanoüarn dans son dernier livre. Un rappel nécessaire dans une époque imprégnée de relativisme.
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Vous proposez de méditer chaque article du Credo pour que nous nous appropriions notre foi. Mais pouvez-vous nous rappeler ce qu’est la foi ?

Abbé Guillaume de Tanoüarn : La foi est d’abord un mouvement de l’âme. Il y a une foi naturelle qui porte sur trois points principaux. Premièrement, l’existence d’un être supérieur ; vérité à laquelle on peut accéder par sa raison, tant de philosophes l’ont montré, comme Descartes pour n’en citer qu’un. Deuxièmement, cette reconnaissance de Dieu induit celle de l’immortalité de l’être humain. Le mystère de l’homme implique l’affirmation de Dieu, et un homme qui ne considère pas son immortalité est un homme diminué. Enfin, la foi naturelle pousse l’homme à reconnaître un système de valeurs qui dépasse l’individu – et même la société – un peu à la manière d’Antigone qui est intimement persuadée qu’il existe des lois d’un autre ordre que celles de la cité, et que les lois humaines ne peuvent pas les outrepasser ni les contredire. Cette foi naturelle vient de Dieu, mais il appartient à l’homme de la découvrir par lui-même.

Une foi naturelle, dites-vous. Il y a donc une foi surnaturelle ?

En effet. La foi surnaturelle ne peut être découverte par l’homme. Elle est une adhésion à des mystères révélés. Par définition, elle échappe à la portée humaine. L’homme doit donc d’abord l’entendre pour y adhérer. D’où l’importance du Credo qui résume notre foi sous forme de kérygme – du grec ancien « proclamation à voix haute » – et la rend ainsi audible pour l’homme. Or, comme dit saint Paul dans son épître aux Romains, « fides ex auditu » : « la foi naît de ce que l’on entend » (Rm 10, 17). Ce kérygme, toute personne doit se l’approprier pour être chrétienne. Or, on adhère à la foi surnaturelle par le cœur et non par la raison.
Pour résumer, la foi n’est ni tout à fait objective, ni tout à fait subjective. Elle est objective parce qu’elle a un objet : le Credo, ses articles, les dogmes et le Magistère. Elle est subjective parce qu’elle appelle à l’adhésion du sujet pensant, par son cœur, puis par sa raison. La foi s’adresse aux hommes, Dieu se rend compréhensible, mais aussi c’est uniquement à la lumière de la foi que l’homme se comprend lui-même.

Peut-on choisir d’adhérer à certains articles du Credo et non à d’autres ou doit-on nécessairement adhérer à tout ?

Dans certains cas, les hommes n’ont pas eu accès à une annonce entière du Credo, alors, s’ils adhèrent au peu qu’ils en ont entendu, on peut considérer qu’ils adhèrent à son entièreté. Mais pour que notre intention soit assez pure, cela dépend de notre responsabilité dans notre ignorance, de notre proximité avec l’Église, des moyens que nous avions à notre disposition pour connaître l’enseignement de la foi… Les cas d’ignorance parfaite sont rares dans notre société postchrétienne où il est difficile de ne jamais avoir entendu parler de l’Évangile ou de l’Église. Seul Dieu saura toujours reconnaître ceux qui l’ont cherché d’un cœur sincère. On sera surpris au moment du Jugement, cela ne fait aucun doute ! Cependant, si l’on a connaissance du Credo, de l’Église, on ne peut pas faire son choix. Si l’on rejette un article, on les rejette tous ! Car, au fond, se pose le problème de l’autorité d’où ces vérités nous viennent. Est-ce au nom de notre propre autorité que nous croyons, par exemple, à la résurrection de la chair ? Ou bien est-ce parce que nous avons reconnu que l’Église catholique est mandatée par Dieu pour garder sa Parole et transmettre sa Vérité ? Si c’est le cas, logiquement, il faut nous laisser enseigner par l’Église et adhérer à l’entièreté du Credo.

Le Credo ne vient-il pas des hommes plutôt que de Dieu ? Une liste d’articles de foi, est-ce vraiment ce que voulait Jésus-Christ ?

L’Église est, depuis le début de l’humanité, la convocation des hommes qui croient en Dieu et aiment la vérité. Comme l’écrit René François Rohrbasher (1789-1856), prêtre et théologien, dans son Histoire de l’Église : « Au commencement était l’Église. » Mais Jésus-Christ a bouleversé les choses. Il a voulu appeler tous ceux qui appartiennent à la Vérité dans un même troupeau, rassemblé par la voix d’un unique pasteur : « Elles écouteront ma voix : il y aura un seul troupeau et un seul pasteur » (Jean 10, 16).
L’Église a reçu la charge d’être cette voix. Elle est donc le conservatoire qui conserve intacte la parole de Dieu. Bossuet disait : « L’Église, c’est Jésus-Christ, mais Jésus-Christ répandu et communiqué. » Pour répandre et communiquer Jésus-Christ, l’Église parle, et sa parole est le kérygme qu’elle enseigne. Le Credo est en quelque sorte une incarnation prolongée du Verbe. À travers les siècles, l’Église offre, comme le voulait Jésus-Christ, d’entendre et de reconnaître la Parole du Pasteur. On voit que, dès les premiers siècles, les apôtres désirent constamment résumer la foi afin de la transmettre, saint Pierre le jour de la Pentecôte par exemple, ou saint Paul dans sa première épître aux Corinthiens (1 Co 15, 2-6). D’ailleurs, c’est justement tant que la parole de l’Église ne change pas qu’elle est digne de confiance, car c’est le signe qu’elle donne la Parole de Dieu qui, lui, ne change pas. C’est la parole des hommes qui varie sans arrêt.
L’Église n’est rien si sa parole veut s’adapter aux pensées humaines, aux systèmes philosophiques, voire aux projets politiques, aux temps comme aux lieux. L’Église n’est rien si elle veut humaniser sa foi. Ce Credo, tant qu’il ne varie pas, est le gage de l’éternelle jeunesse de ceux qui osent le méditer : « Le ciel et la terre passeront ; mes paroles ne passeront pas » (Matthieu 24, 35).

Méditations sur le Credo, Abbé Guillaume de Tanoüarn, éd. Via Romana, juin 2024, 196 pages, 17 €.