Baroque. Un jésuite du XVIIe siècle aurait été surpris par ce terme : il ne s’applique en effet qu’en 1855 à l’art issu de la Réforme catholique, très divers selon les pays. Les jésuites s’associent très tôt au mouvement, dans tous les domaines : architecture, peinture, sculpture, gravure, poésie, musique, théâtre, danse, littérature. Le primat est donné à l’image, pas simplement visuelle mais provenant de tous les sens, suivant en cela l’intuition de saint Ignace de Loyola dans les Exercices spirituels, avec l’application des compositions de lieu pour les méditations.
L’art dit jésuite s’inscrit dans l’art dit baroque comme un extraordinaire instrument apostolique d’évangélisation. Les jésuites illustrent les mystères qu’ils proclament, d’où les fresques grandioses et les sculptures dans leurs églises, les gravures dans leurs livres de dévotion, la poésie et le théâtre dans leurs collèges et universités, la musique sacrée dans leurs somptueuses liturgies.
L’image et la Parole
De nombreux artistes se sentiront proches de cette manière de concevoir l’annonce de la foi : Bernin, bien sûr, mais aussi Simon Vouet, Nicolas Poussin et Pierre-Paul Rubens, Marc-Antoine Charpentier, etc. Certains sont membres de la Compagnie de Jésus, comme les frères jésuites Andrea Pozzo et Jacques Nicolaï. Il a suffi de la construction, en 1584, de l’église mère du nouvel ordre, le Gesù à Rome, par Giacomo della Porta, pour donner un élan irrésistible à cette union entre l’image et la Parole. Le but sera double : support pour la méditation en contemplant des formes sensibles, en écoutant des sons, et outil missionnaire hors du commun.
Un exemple très parlant est le recueil de gravures commandé par saint Ignace et réalisé par le jésuite Jérôme Nadal en 1593, l’Evangelicae Historiae Imagines, guide illustré pour la méditation, méthode largement déclinée par la suite. Il s’agit d’atteindre l’invisible par les formes visibles et, pour ce faire, tous les supports sont bons. D’où ce foisonnement extravagant des arts au XVIIe siècle dans tous les pays d’Europe et à travers le monde car l’art jésuite se propage, notamment, par l’intermédiaire des missions espagnoles et portugaises.