Un « Lourdes corse » situé à Lavasina et deux lieux d’apparitions mariales… Qui eût cru que la Corse soit une terre si visitée par la Mère de Dieu ? L’île compte au moins huit sanctuaires mariaux qui ont chacun leur pèlerinage, et 126 églises paroissiales lui sont consacrées, sans compter les chapelles et les oratoires. La dévotion remonte au IVe siècle mais c’est au XVIIIe siècle qu’elle acquiert une connotation officielle : Marie devient « Reine Immaculée de la Corse », le 30 janvier 1735, lors de la Consulte [assemblée populaire] de Corte, et est inscrite dans la première Constitution de la Corse souveraine comme la protectrice de l’île. Cette consécration a été renouvelée le 18 mai 1935 sous l’épiscopat de Mgr Rodié, puis le 8 septembre 2014 par Mgr Olivier de Germay, alors évêque d’Ajaccio. Par ailleurs, l’hymne corse est un chant marial : le « Dio vi salvi Regina », « Que Dieu vous garde Reine », chanté lors de toutes les cérémonies religieuses mais aussi publiques et familiales en Corse.
Le « Lourdes corse »
Le sanctuaire marial le plus réputé est celui de Notre-Dame de Lavasina, situé dans un cadre idyllique du cap Corse, à 7 km de Bastia. Depuis trois siècles, les pèlerins viennent confier leurs intentions à la Vierge à l’Enfant représentée sur un tableau. Il fut envoyé au XVIIe siècle, par un débiteur romain, à une pieuse famille de négociants en règlement d’une dette. Or, en recevant l’œuvre, les négociants corses découvrirent qu’il y avait aussi, dans l’envoi, la somme qui leur était due ! Y voyant un miracle, ils exposèrent la toile dans leur chapelle pour encourager sa dévotion. En 1675, une tertiaire franciscaine sera guérie devant le tableau et, en 1779, après une terrible sécheresse, la pluie tombera en abondance juste à la fin de la procession qui amena les pèlerins jusqu’au tableau miraculeux. Gagnant en renommée, la chapelle sera transformée en sanctuaire et deviendra le « Lourdes corse », qui possède aujourd’hui la plus vaste collection d’ex-voto de l’île.
Source miraculeuse
Deux autres lieux sont connus pour avoir reçu l’insigne présence de la Vierge Marie : Pancheraccia et Campitellu. Les apparitions ne sont pas reconnues officiellement par l’Église mais la piété est encouragée. À Pancheraccia, à l’ouest d’Aléria, la voyante est une jeune fille égarée et assoiffée au pied de qui la Vierge fait naître une source miraculeuse, au XVIIIe siècle. Depuis, chaque année, le 8 septembre, jour de la Nativité de la Vierge, une procession singulière se déroule : la statue de Notre-Dame de Pancheraccia est portée uniquement par des femmes.
À Campitellu, à 42 km de Bastia, Madeleine Parsi, dite Lelléna, âgée de 15 ans, sera gratifiée de 18 apparitions entre 1899 et 1909. Les faits sont d’autant plus extraordinaires que des incroyants notoires, venus pour se moquer, verront la mère de Dieu et repartiront convaincus ! L’Église n’a pas pris position sur ces apparitions car l’enquête a été interrompue par la Première Guerre mondiale. Cependant, nombreuses sont les visites au modeste oratoire Notre-Dame de Campitellu, où une source a jailli au moment des apparitions et ne s’est jamais tarie depuis. La voyante Madeleine Parsi, entrée chez les bénédictines, mourra en 1928 en réputation de sainteté, après avoir diffusé le message que la Sainte Vierge lui a donné : « Priez beaucoup et faites pénitence. »
Parmi les autres lieux de pèlerinage où le culte marial est bien vivant, figure Notre-Dame du Niolu, à Casamaccioli, honorée le 8 septembre, mais aussi Zonza où, le 5 août, de nombreux pèlerins viennent prier Notre-Dame des Neiges, dans le cadre grandiose des aiguilles de Bavella.