Penser l’impensable - France Catholique
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« Ô Marie conçue sans péché »
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Penser l’impensable

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Le mot « impensable » est une expression amusante, un oxymoron enveloppé dans un mot unique. Néanmoins, il nous oriente vers des choses très déplaisantes auxquelles nous sommes forcés de penser, comme une guerre nucléaire ou une Eglise en crise.

Jusqu’à très récemment, la perspective d’un pape promulguant une erreur doctrinale significative était impensable. Mais beaucoup d’entre nous sont aujourd’hui tracassés par des déclarations papales ambiguës, dites du « Magistère authentique », qui sont directement opposées à l’Ecriture et à la Tradition.

Cela aide toujours de se rappeler qu’un pape ne crée pas des doctrines ; il élucide des doctrines pour conserver la Foi qu’il a reçue. Les Pères du premier Concile du Vatican ont défini l’autorité d’enseignement du pape. Mais ils rattachent son autorité à l’Ecriture et à la Tradition, l’histoire doctrinale intégrale de l’Eglise.

Les pontifes romains… parfois en convoquant des conciles œcuméniques ou en consultant l’opinion des Eglises dispersées dans le monde, parfois dans des synodes spéciaux, parfois en profitant d’autres moyens utiles dont nous pourvoit la divine Providence, ont défini comme doctrines à maintenir des choses qu’à l’aide de Dieu, ils savaient être en accord avec l’Ecriture sainte et les traditions apostoliques (Vatican I, Ch. 4, les italiques sont de nous).
De la même façon les Pères du second Concile du Vatican rattachent le Magistère authentique à la Tradition et à l’Ecriture.

Mais quand le Pontife romain ou le Corps des évêques avec lui définissent un jugement, ils le prononcent en accord avec la Révélation elle-même, à laquelle nous sommes tous obligés de rester fidèles et en conformité avec elle, c’est-à-dire, la Révélation qui écrite ou proposée oralement est transmise dans son intégralité à travers la succession légitime des évêques et spécialement au soin du pontife romain lui-même, et qui, guidée par la lumière de l’Esprit de vérité, est religieusement préservée et fidèlement exposée dans l’Eglise (Vatican II, LG 25, les italiques sont de nous).

Par exemple, les enseignements infaillibles sur l’Immaculée Conception de Marie et l’Assomption partaient d’une théologie catholique incertaine. Mais leur compréhension plus profonde pouvait être exposée à la lumière de la Tradition et en relation avec le reste des doctrines et dogmes catholiques.
Sur les questions de sexualité, les enseignements constants de l’Eglise dans son Magistère ordinaire sur la nature et les bienfaits du mariage – et sur les désordres sexuels intrinsèques comme les actes contraceptifs et le comportement homosexuel – sont des enseignements infaillibles bien définis d’une Eglise enracinée dans l’Ecriture et la Tradition. Ces doctrines claires non seulement fournissent un guide moral précis mais des opportunités de réflexion théologique fructueuse et qui apporte une clarté même plus grande.

Les Pères du Concile ont soigneusement défini l’autorité des évêques – et affirmé leur fidélité et leur bonne volonté en conservant et en enseignant fidèlement la vérité catholique. Mais les Pères connaissaient sûrement les nombreux moyens qu’ont des évêques infidèles pour trahir leurs fonctions, habituellement par négligence mais parfois par des enseignements défaillants.

Les Pères apparemment n’ont pas vu la nécessité d’affirmer l’évidence : les violations doctrinales de l’enseignement de l’Eglise par des évêques ne peuvent pas lier le fidèle en conscience. Il est au moins concevable qu’un pape pourrait aussi rejeter les grâces de sa fonction et en abuser de la même façon. De telles erreurs peuvent souiller les eaux du Magistère ordinaire, mais ne peuvent évidemment lier en conscience.

Bien sûr, des ambiguïtés délibérées dans l’enseignement du pape, une incompétence et une infidélité qui altère le « Magistère authentique » seraient désastreuses : ce serait semer la confusion et même suggérer l’impensable, que les portes de l’Enfer aient prévalu dans l’Eglise.
Mais ceci ne peut pas être le cas comme une question, de logique. La vérité du Christ demeure. Son Evangile nous est présenté dans les Ecritures, la Tradition – et l’enseignement cumulatif du Magistère des papes, des évêques, des conciles et des synodes à travers l’histoire.

La grâce parfait la nature et l’autorité d’enseignement du pape n’est pas magique. Toute pensée présumée magistérielle qu’un pape peut décréter doit toujours être jugée par rapport à l’Ecriture et à la Tradition. Même les déclarations conciliaires, y compris les déclarations de Vatican II, doivent aussi être mises en rapport avec l’Ecriture et la Tradition.
Cela implique-t-il un Magistère où l’on prend ce qu’on veut ? Non. La force de l’Ecriture et de la Tradition qui s’emboitent l’une dans l’autre, et le Magistère authentique à travers l’histoire, assurent que la vérité du Christ ne sera pas gênée par les innovations. Parois des corrections doivent être faites – comme Paul le fait pour Pierre à Antioche (cf. Galates 2 : 11-21).

A partir de là, les évêques soutenus par les théologiens orthodoxes) doivent reconnaître l’obligation de répondre aux déclarations du pape qui sont dangereusement ambiguës ou contredisent Ecriture et Tradition. Ils doivent le faire respectueusement mais fermement et sans peur, à la fois parce que – sous la conduite de l’Esprit saint – ils ont solennellement promis de le faire dans le serment lié à leur fonction, et parce qu’ils ont de leur côté le contenu historique de la Révélation.

Les corrections peuvent aussi venir des fidèles que nous sommes, après tout, dotés du sensus fidei, le sens de la foi. Mais l’élimination des distorsions et des erreurs doctrinales (et la restauration de la clarté doctrinale) est difficile. Comme les dissentiments du clergé qui se sont répandus au moment d’Humanae Vitae le démontrent, la correction et la restauration de la doctrine peuvent conduire à des générations de conflit pénible.

Malheureusement, comme la perspective de la guerre nucléaire, la pensée de faux-pas doctrinaux significatifs de la part de la papauté n’est plusd impensable. Mais nous devrions être assurés que l’erreur doctrinale et le schisme peuvent être évités, avec la grâce de Dieu, par une logique soigneuse et insistante qui protège l’intégrité de la foi. L’autorité du Magistère authentique du pape ne pas être en opposition avec l’histoire doctrinale de l’Eglise.

Le peuple, les prêtres et les évêques doivent ne pas reculer devant l’obligation de défendre la foi. Nous devrions considérer cela comme un privilège : «  Puisque nous avons le même esprit de foi comme l’a eu celui qui a écrit : ʽJ’ai cru et ainsi j’ai paré, nous aussi nous croyons et ainsi nous parlonsʼ. » (2 Cor 4 :13).

Source : https://www.thecatholicthing.org/2018/09/29/thinking-the-unthinkable/

Samedi 29 septembre 2018

Le Père Jerry J. Pokorsky est prêtre du diocèse d’Arlington. Il est le pasteur de la paroisse à Great Falls Virginie). Sainte Catherine de sienne