À quoi va ressembler la fête de la Nativité dans un tel climat de guerre entre Israéliens et Palestiniens ?
Frère O.-T. Venard, o.p. : Les chefs des différentes Églises chrétiennes, en signe de protestation contre le pic de violences en Terre sainte ces deux derniers mois, ont demandé la plus grande sobriété dans les manifestations extérieures pour célébrer Noël. D’ailleurs, les pèlerins ont déserté la Terre sainte depuis début octobre. La Nativité du Seigneur va donc passer presque inaperçue au milieu de l’affairement des Israéliens et des Palestiniens, d’autant que le 25 décembre n’est pas férié en Israël. Finalement nous nous apprêtons à accueillir l’Enfant-Jésus comme il y a deux mille ans lorsque tous avaient mieux à faire à Bethléem que de se réjouir de sa venue. C’est un retour à la pauvreté et à l’intériorité, un appel à l’essentiel.
« Paix aux hommes de bonne volonté », chantent les anges la nuit de Noël. Quelle est cette paix que le Christ vient nous apporter en naissant à Bethléem ?
Cette paix, si nous arrivions à la définir, nous en vivrions profondément ! Des dizaines d’associations existent en Israël et en Palestine pour promouvoir la paix. De nombreux artisans de paix, y compris des Israéliens qui œuvraient au service des Palestiniens ont été victimes de la terreur du 7 octobre. Ils portaient une paix que les violents ne peuvent pas supporter ! Celle que nous offre le Christ suppose l’attente du vrai Dieu, qui vient nous rejoindre là où nous en sommes, plus que là où nous rêverions d’être ; il faut beaucoup de simplicité pour en vivre. C’est une grâce et un appel. Nous essayons d’y répondre au quotidien dans notre couvent Saint-Étienne, ne serait-ce qu’en vivant sous un même toit à vingt frères de treize nationalités différentes ! Un petit havre de paix à mi-distance des deux zones de plus grandes tensions à Jérusalem : le « mont du Temple » des Juifs, qui est pour les musulmans « l’Esplanade des mosquées », et Sheikh Jarrah [quartier à majorité palestinienne de Jérusalem-Est, NDLR].
Voyez-vous à l’approche de Noël des signes tangibles de joie et d’espérance ?
J’aime voir en Noël une invitation à la douceur, celle du roi du Ciel rejeté par les puissants mais accueilli par les humbles, ainsi qu’à l’espérance, une espérance théologale chevillée au cœur de l’homme même quand tout semble perdu. L’humble minorité chrétienne de Jérusalem est porteuse de tout cela : je suis bouleversé par le témoignage de foi persévérante des chrétiens qui viennent au Saint-Sépulcre, déserté par les pèlerins et les touristes depuis le 7 octobre. Vieux messieurs syriens chantant par cœur la divine liturgie ancestrale, jeunes séminaristes arméniens, vieilles dames palestiniennes saisissantes de dignité sous leurs mantilles ou encore jeunes femmes éthiopiennes enceintes, enveloppées dans leurs immenses drapés blancs priant de tout leur corps devant les icônes de la Mère de Dieu. Ce qui nourrit mon espérance, ce sont ces modèles de foi : un même Seigneur adoré différemment mais dans une ferveur magnétique !
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Pour aller plus loin :
- Le défi du développement des peuples et le pacte de Marrakech - la fuite en avant des Nations Unies
- Sur le général de Castelnau et le Nord Aveyron.
- Vladimir Ghika : le contexte politique avant la guerre de 1914-1918
- SYRIE : ENTRE CONFLITS ARMES ET DIALOGUE INTERNE
- Liste des ouvriers pastoraux, Evêques, Prêtres, Religieux, Religieuses et Laics tués en 2011 et 2010