Quel message souhaitez-vous faire passer avec votre nouvel avec album « Ô ma France » ?
C’est un disque qui tente de célébrer la culture française dans ce qu’elle a de beau et de bon pour l’humanité et ainsi contribuer à soigner son âme si abîmée par cette étrange manie qu’ont les Français de revisiter leur histoire et de se battre la coulpe. Mgr Coly, ancien évêque de Casamance au Sénégal que j’avais rencontré il y a plus de 20 ans à Orcival m’avait dit qu’il avait reçu la foi grâce à des missionnaires français, que, pour lui, c’est le plus beau cadeau qu’il ait jamais reçu et que sa mission était désormais de l’offrir au peuple dont il avait la charge en tant qu’évêque. En s’adressant à moi, il avait rajouté : « Vous, les artistes, vous avez une mission culturelle, qui est parallèle : faire fructifier le bien qui a été semé entre nous dans le monde francophone. Pour cela vous avez un outil, celui de la francophonie. » Il plaidait pour une culture chrétienne francophone… Je ne l’ai jamais oublié. Ce disque, d’un esprit profondément chrétien, n’est pas une réponse pastorale mais culturelle à Mgr Coly.
Et en particulier avec la chanson éponyme, dont les paroles ont été coécrites avec Philippe de Villiers et Daniel Facerias ?
Cette chanson est une réponse en écho à Jean-Paul II : « France, fille aînée de l’Église, es-tu fidèle aux promesses de ton baptême ? » C’est un regard lyrique sur cette France d’aujourd’hui qui s’abîme mais continue d’espérer contre toute espérance. C’est un appel à retrouver sa mission confiée sur les fonts baptismaux de Reims, il y a plus de 1500 ans. Nous cherchions une plume lyrique à la Péguy ou Chateaubriand : Philippe de Villiers a répondu à notre demande, je l’en remercie.
Pourquoi avoir écrit une chanson « Aux paysans de France » ?
Je suis un fils de la campagne, j’ai vécu dans ma bourgade au milieu d’eux. Je les connais et je ne supporte pas que l’on bafoue leur dignité, c’est pourquoi je chante : « Vous, grâce à qui mon chant s’élève / Au-dessus de nos horizons / Vous le labeur et moi le rêve / Nous sommes du même sillon. » C’est l’expression d’une révolte intérieure qui cherche à transcender ce mal-être grâce à l’état poétique. Ils ne veulent pas que l’on s’apitoie sur leur sort. Ils veulent simplement être respectés dans leur dignité, parce qu’ils sont les gardiens de la nature et que « la vocation de la France est d’être cultivée comme un jardin » (Marthe Robin à Jean Louis Laureau – Journées paysannes).
En tant qu’artiste engagé depuis très longtemps, quel a été le sens de votre combat à travers l’art ?
Je me sens profondément chrétien et profondément français. J’aime cette culture dans laquelle je suis né. Je ne suis qu’un chanteur « qui fait du rêve avec du vent », comme le disait si bien Julos Beaucarne. Mais dans ce vent, il y a du pollen qui féconde des fleurs et ma mission est de me laisser porter par ce vent de l’esprit. De chercher les mots justes quels que soient les sujets abordés. Tout m’intéresse, j’espère être perçu comme un serviteur de la vie d’ici-bas comme de l’éternelle, avec mes chansons qui me permettent d’aborder des sujets dérisoires ou de première importance telle « De vos entrailles », qui m’a valu autant de coups de bâtons que de grandes et belles joies. Mais il ne faut jamais oublier que la chanson est, quoi qu’on dise, un acte littéraire. J’essaie à chaque fois que j’écris une nouvelle chanson d’en faire une chanson d’amour. Cela permet non seulement de prendre de la hauteur sur le sujet abordé, de mieux nourrir les cœurs mais aussi de tenir dans le temps. C’est un combat littéraire au long cours, je regrette que la plupart des chanteurs chrétiens soient absents de l’espace culturel et se contentent seulement d’un service paraliturgique. La culture est aussi un terrain de mission où les artistes sont appelés à la moisson.
Et quelle est votre espérance aujourd’hui ?
Un prêtre que j’ai fréquenté durant de nombreuses années m’avait dit que mes chansons étaient faites pour demain, pour un temps de renaissance. Je pense que je m’en rapproche. En redécouvrant la foi, il y a 45 ans de cela, j’ai non seulement découvert l’Église comme une Mère aimante mais aussi l’histoire de mes ancêtres, les Vendéens de 1793, la culture où je suis né, ma France, sa vocation, les sujets sociétaux et les combats contemporains pour servir un Amour plus grand que nos amours. Serviteur inutile sans doute comme tout un chacun, mais serviteur quand même. L’Espérance est plus grande que le péché et l’Amour a vaincu la mort. Les Vendéens l’ont prouvé. Que pouvons-nous espérer de plus ?
Que souhaitez-vous transmettre aux jeunes générations de catholiques français à travers vos nombreux albums ?
« Ô ma France » est mon 24e album et mon 10e en solo ! J’ai abordé beaucoup de sujets. Je l’ai fait sans calcul, comme une nécessité intérieure. La poésie est l’art de transcender le mal pour en faire quelque chose de beau. La vocation de l’artiste est de célébrer la beauté. Chanteur était un rêve d’enfant parce qu’il m’avait procuré de la joie. Je me suis accroché à ce rêve pour espérer le partager. J’ai écrit mes premières chansons à l’âge de 14 ans, il y a près de 58 ans.
Si votre rêve est de partager de la vraie joie, accrochez-vous, Dieu sera à vos côtés – comme le chantait Bob Dylan. Quel que soit votre choix. Ne perdez jamais de vue que vous êtes en état de service du vrai, du bien et du beau. Ne craignez pas la dissidence quand elle se vit en vérité, Jésus l’a été avant vous ! Aimez votre Église et votre culture française et vous serez bien nourris !
Ô ma France, Rejoyce Musique, 8,40€