Un verset de la Bible qui peut en quelque sorte vous hanter si vous êtes un professeur, dit ceci : « Car Il enseignait comme quelqu’un qui a autorité, et non pas comme leurs scribes » (Matthieu 7, 29) J’ai l’image de quelqu’un qui proclame avec une grande ferveur : « Car Il leur enseignait comme quelqu’un qui a autorité, et non pas comme cet ennuyeux et soporifique professeur Smith. » J’ai pitié des scribes. Je veux dire, comment peut-on faire concurrence à Jésus ? Vous êtes un scribe (ou un professeur) ; vous travaillez dur ; vous étudiez des heures durant ; et ensuite les gens on vous admire moins parce que vous avez été éclipsé par Dieu incarné ? Est-ce que je dois me sentir mal à l’aise si Michael Jordan me bat aussi au basket ?
Pour être juste, le Christ a dit plus tard à propos des scribes : « Faites tout ce qu’ils vous enseignent ; mais ne faites pas ce qu’ils font. » D’accord voilà un bon conseil. Et puis il y a Son avertissement : « Ne vous faites pas appeler maître. » (Matthieu 23, 8) Oui, on m’appelle professeur. Mais c’est probablement pire.
Soren Kierkegaard autrefois, a comparé Socrate et le Christ en remarquant que tandis que Socrate se déclarait « accoucheur » de la vérité, faisant accoucher ses étudiants pour qu’ils fassent naître la vérité qui est en eux – ce qui est ce que nous, enseignants humains, sommes supposés être et faire – le Christ est « la Vérité ». Dans Son enseignement il y a une unité dramatique entre l’enseignement et l’enseignant. Le Christ est le cœur de ce qui est enseigné. Aussi, pour cette raison, nous, professeurs humains, ne pouvons jamais nous mesurer au Christ. Il a « l’autorité » parce qu’Il est l’Auteur de toute la création. Je ne fais que parler de Dieu ; Il est Dieu. Ainsi, tout ce que j’enseigne devrait Le désigner.
Mais s’il est l’auteur de toute la création, alors ce n’est pas seulement en théologie que nous parlons finalement de Dieu. Ce qui nous est révélé dans les récits de la création dans la Genèse et confirmé décidément par l’Incarnation, est que toute création est « incarnationnelle » ou « sacramentelle » : C’est une personnification et un instrument de l’amour de Dieu.
Aussi, alors que ce n’est certainement pas le rôle des théologiens de dire à des chimistes, des biologistes ou des physiciens comment faire leur travail, il est acceptable que des professeurs de toutes ces disciplines rappellent à leurs élèves qu’ils étudient l’ouvrage de Dieu, écrit, si l’on peut dire, dans le Livre de la Nature. Ainsi, un chrétien n’éluderait jamais les données de la science pour son propre gain ou sa propre gloire parce que ce serait mentir à propos de ce qui est dans le Livre des Écritures.
Quand un étudiant me dit « Je déteste les maths », je réponds « mais les mathématiques sont un des langages de l’univers. C’est le langage que Dieu utilise pour nous aider à comprendre l’ordre des choses. Si tu as jamais eu envie d’apprendre le grec pour pouvoir lire l’Évangile dans sa langue d’origine, n’as-tu pas envie d’être capable de traduire la langue de Dieu incorporée à la création ? »
Prenons une corde de guitare, et tirons dessus. Elle rend un son. Si l’on met son doigt à mi-chemin de cette corde, et si l’on tire de nouveau la corde, la note sera plus haute d’une octave. Le ton sur une corde qui vibre est directement proportionnel à sa longueur. La musique est mathématique. Le rythme est mathématique. Le rythme décrit le motif de répétition des battements forts et faibles dans toute espèce de morceau de musique. L’homme qui a créé le système qui permet aux ingénieurs du son de donner à la voix du chanteur un ton parfait, système qu’on retrouve maintenant partout dans les studios de musique, l’a mis au point mathématiquement.
L’ordre dans lequel Dieu a créé l’univers est vraiment stupéfiant quand on commence à le voir. C’est comme l’un de ces immenses puzzles avec des petites pièces dont chacune a de jolies couleurs, mais qui n’ont aucun sens jusqu’à ce qu’on ait commencé à les assembler et à réaliser l’incroyable image qu’elles réalisent.
Et c’est pour cette raison, parmi d’autres, que l’Eucharistie devrait être au centre de n’importe quelle école catholique – non pas parce que par-dessus toute la matière séculière de l’école on a besoin d’un peu de « religion ». Cette sorte de système à deux niveaux fausse le caractère « incarnationnel » de la création. Quand Saint Bonaventure a écrit un texte que nous appelons La réduction des Arts jusqu’à la Théologie, il ne voulait pas dire que toutes les disciplines devraient se « réduire » à la théologie. En latin, re-ducere veut dire « ramener à ». Aussi, il voulait dire que toute étude devrait « ramener à Dieu ».
Les choses visibles de la création, de ce point de vue, sont comme des lettres que Dieu aurait écrites de Sa Main. Qui parmi nous, ayant connu l’amour d’un bienaimé, se contenterait de jeter une lettre manuscrite de celui qu’il aime ? Nous la lisons, nous la gardons précieusement et la relisons encore et encore comme pour retrouver la présence de l’aimé, même de cette manière petite et indirecte. Ce qu’il faut que nous apprenions à nos élèves, c’est que ce qui semble n’être que l’enveloppe blanche et impossible à distinguer de la Création, est en réalité une lettre de leur bienaimé. Aussi devraient-ils l’ouvrir avec précaution et amour pour qu’ils puissent y trouver communication de l’amour qu’elle contient.
Et pourtant, bien que des lettres puissent être merveilleuses, l’amour se transmet mieux de personne à personne. Si les lettres de votre bienaimé sont merveilleuses, qui n’aurait pas envie d’aller voir le bienaimé en personne ? D’ailleurs les deux ne s’excluent pas. Je vois ma femme en personne tous les matins (Dieu merci) mais cela ne rend pas les messages qu’elle m’envoie dans la journée moins pleins de sens.
Dans les classes, nous parlons de Dieu. Ou bien nous parlons des œuvres de Dieu dans la création. Mais dans l’Eucharistie, Dieu vient à nous en personne, en la personne de Jésus Christ, crucifié et ressuscité. C’est pour cela que nous emmenons les élèves à la messe, et non pour qu’ils puissent avoir un peu de « religion » avant qu’ils ne retournent aux « choses sérieuses du monde réel ». Nous emmenons les élèves à la messe pour qu’ils puissent rencontrer leur Créateur et Son Amour « incarné » en personne. Et que, dans cette rencontre, ils se souviennent qu’ils sont aimés et que dans toutes leurs études, ils lisent les lettres d’amour de Celui qui les a tellement aimés qu’Il a voulu mourir pour eux.
Source : https://www.thecatholicthing.org/2024/03/05/the-eucharist-and-catholic-education/
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