En Espagne, c’est un jeune jésuite de Valladolid qui prend la succession de Marguerite-Marie Alacoque dans le rôle de confident du divin Cœur. Le 6 janvier 1730, le bienheureux Bernardo de Hoyos voit le Christ lui révéler son Cœur et s’entend dire : « Tu as trouvé grâce à mes yeux car je t’ai trouvé conforme à mon cœur. »
À la même époque, face à l’indifférence de la monarchie française, certains se tournent vers Philippe V d’Espagne – le petit-fils de Louis XIV – et lui demandent d’intervenir auprès de Benoît XIII pour que Rome instaure une fête du Sacré-Cœur. Mais la démarche n’aboutit pas. Dans le même temps, un jésuite, le Père de Galliffet, publie un ouvrage sur la dévotion cordicole – c’est-à-dire au Sacré-Cœur. Bernardo de Hoyos le lit, bouleversé : « Je m’offris à son Cœur pour travailler de toutes mes forces, du moins par la prière, à l’extension de son culte. » Il voit alors plusieurs fois le Christ. Puis l’archange Michel lui enseigne « comment étendre le culte du divin Cœur à toute l’Espagne et toute l’Église ».
La grande promesse de Valladolid
Le Christ complétera cet enseignement par la révélation de la dévotion au Cœur eucharistique. Le 14 mai 1733, le Sacré-Cœur apparaît surmonté de la Croix, entouré d’épines. Jésus déclare : « Je régnerai sur l’Espagne et y serai plus vénéré qu’en bien d’autres pays. » Telle est « la grande promesse de Valladolid » qui assure une place d’honneur à l’Espagne. Mais les obstacles, comme en France, se multiplient. Le 4 juin 1733, Jésus assure que « ses affaires avanceront au milieu des contradictions ». Bernardo écrit un livre sur ses révélations, Le Trésor caché dans le Sacré-Cœur de Jésus découvert à notre Espagne, qui rencontre un succès inespéré. Après l’avoir lu, Philippe V renouvelle sa supplique à Rome, en vain.
Ordonné prêtre en juin 1735, Bernardo de Hoyos meurt quelques mois plus tard, le 29 novembre, à 24 ans. Bien que les démarches royales aient été infructueuses, le Ciel a pris en compte ses efforts, protégeant l’Espagne des erreurs jansénistes et de la philosophie des Lumières. Cet état de grâce s’achève quand la Compagnie de Jésus est expulsée en 1767, comme elle l’a été du Portugal et de France, avant d’être supprimée par Rome en 1773.
Consacrée au Sacré-Cœur
Après la disparition de la Compagnie, les remparts intellectuels contre les idées opposées au catholicisme cèdent. La péninsule endurera retombées de la Révolution, invasion napoléonienne,
exil de la famille royale à Valençay où le roi détrôné et l’infant, revenus à la foi, se tournent vers le Sacré-Cœur pour obtenir la fin de leurs malheurs. Exaucés, de retour à Madrid, ils réitèrent les démarches jadis tentées par Philippe V. Cette fois avec succès : en 1814, Pie VII accorde la messe et la fête solennelle du Sacré-Cœur à l’Espagne et à ses possessions – ce que le bienheureux Pie IX étendra
à toute la catholicité en 1856. Cette même année, l’Espagne est consacrée au Sacré-Cœur.
Alphonse XIII fera élever en 1919, sur le Cerro de los Angeles, centre géographique de l’Espagne, un monument surmonté d’une gigantesque statue du Sacré-Cœur, tandis que les travaux se poursuivent à la maison des jésuites de Valladolid devenue sanctuaire national de la Grande Promesse. L’on attribue au geste du roi la préservation de l’Espagne pendant la Première Guerre mondiale. Elle n’a qu’un temps…
La haine des rouges
Avec la guerre civile espagnole, les haines accumulées contre l’Église se déchaînent. Parce que des combattants nationalistes tels les Requetes arborent le Sacré-Cœur, comme jadis en France Chouans et Vendéens, cet emblème focalise les haines. Début août 1936, les rouges, maîtres du Cerro de los Ángeles fusillent la statue du Sacré-Cœur, transperçant de leurs balles Celui qui a tant aimé les hommes… Le 7 août, le monument est dynamité. Reconstruit, il témoigne aujourd’hui, comme la basilique de Valladolid, de la fidélité de Dieu à ses promesses.
Pour aller plus loin :
- La France et le cœur de Jésus et Marie
- Vladimir Ghika : le contexte politique avant la guerre de 1914-1918
- Le défi du développement des peuples et le pacte de Marrakech - la fuite en avant des Nations Unies
- Liste des ouvriers pastoraux, Evêques, Prêtres, Religieux, Religieuses et Laics tués en 2011 et 2010
- EXHORTATION APOSTOLIQUE POST-SYNODALE « AFRICAE MUNUS » DU PAPE BENOÎT XVI