Les Poilus et la Sauvegarde du Sacré-Cœur - France Catholique
Edit Template
Marie dans le plan de Dieu
Edit Template

Les Poilus et la Sauvegarde du Sacré-Cœur

Pendant la Grande Guerre, on assiste au retour des sauvegardes du Sacré-Cœur qui avaient fait leur apparition au XVIIIe siècle à Marseille, lors de l’épidémie de peste.
Copier le lien

© Médiathèque de l'architecture et du patrimoine / CC by-sa

Dès le début de la Grande Guerre, au mois d’août 1914, des sauvegardes sont offertes aux soldats mobilisés par des organismes catholiques. On estime à 3 000 000 le nombre d’insignes ainsi distribués en quelques semaines, le plus souvent dans les gares, au moment des départs. Ces insignes du Sacré-Cœur sont des morceaux d’étoffe blanche sur lesquels on a fait imprimer un Sacré-Cœur rouge et les paroles suivantes : « Arrête ! Le Cœur de Jésus est là ! Que votre règne arrive ! » Ils sont également souvent brodés à la maison, sur un morceau de feutrine blanche.

Confection à très grande échelle

Cette pieuse pratique ranime une des demandes de Jésus faites à sainte Marguerite-Marie : apposer le Sacré-Cœur sur le drapeau français. La France étant en grand péril, c’est tout naturellement que vient l’idée de broder un Sacré-Cœur sur le drapeau tricolore afin d’implorer la protection divine. L’engouement pour cette nouvelle sauvegarde est immédiat. Plusieurs organismes religieux se lancent alors dans la confection à très grande échelle et assurent une distribution gratuite, jusque sur le front. L’Œuvre des insignes du Sacré-Cœur propose même plusieurs formats : l’insigne individuel, le scapulaire, le fanion de 20 cm, et le drapeau. Pendant toute la durée du conflit, cet organisme lyonnais distribue 12 000 000 d’insignes, 1 529 000 fanions, 375 000 scapulaires, 32 425 drapeaux. Au moins jusqu’en 1917, les insignes se portent, bien visibles, sur le képi ou la capote ; les fanions peuvent s’accrocher sur le fusil, la mitrailleuse ou le canon. Les drapeaux sont commandés par les officiers qui les déploient au moment des combats.

Sur le front, environné par la mort, le soldat expérimente la dépossession totale et l’urgence de se concentrer sur l’essentiel. Il redécouvre que la foi est sa seule force. C’est ainsi que les soldats deviennent eux-mêmes les meilleurs promoteurs du Sacré-Cœur. Ils sont nombreux à commander des insignes par centaines, afin de les distribuer à leurs camarades. L’un d’eux présente ainsi sa requête : « Cinq cents insignes ne seraient pas de trop pour en distribuer à tous ceux qui en désirent. »

Des sacramentaux

Les sauvegardes ne sont pas des talismans aux vertus plus ou moins magiques, ce sont des signes extérieurs de piété. Bénies, elles deviennent des sacramentaux.

Le Sacré-Cœur n’est pas uniquement présent sur le front, il l’est aussi à l’arrière, car les autorités catholiques mettent tout en œuvre pour promouvoir cette dévotion. Le 11 juin 1915, l’archevêque de Paris consacre solennellement la France au Cœur Sacré de Jésus, en présence d’évêques, de prêtres et d’élus catholiques. L’acte de consécration est lu au même moment dans toutes les cathédrales et les églises de France.

Extrait
Amende honorable et consécration de la France au Sacré-Cœur de Jésus
«ÔJésus, présent et vivant dans le Très Saint Sacrement de l’Eucharistie, nous voici prosternés à vos pieds, pour offrir à votre Cœur Sacré, en notre nom et au nom de la France, notre patrie, nos hommages et nos supplications ! Nous vous adorons comme notre Dieu et notre Sauveur, qui nous avez créés par bonté et rachetés par amour pour nous faire partager un jour votre éternel bonheur. Nous vous reconnaissons comme notre souverain Seigneur et Maître, à qui appartient tout ce que nous avons et tout ce que nous sommes. Nous confessons que votre souverain domaine s’étend non seulement sur les individus mais sur les nations, que Dieu votre Père vous a données en héritage et que vous avez conquises par votre sang.
Nous proclamons que vous avez des droits particuliers sur la France, en raison des bienfaits dont vous l’avez comblée et de la mission que vous lui avez confiée dans le monde. Nous vous demandons pardon des fautes, privées et publiques, par lesquelles nous avons outragé votre souveraineté et votre amour. »  (texte lu le 11 juin 1915)

Le Sacré-Cœur et la Grande guerre, Alain Denizot, Nouvelles éditions latines (NEL), 1994, 290 pages, 21 €.