Si « la guerre n’est que la simple continuation de la politique par d’autres moyens », comme le pensait le stratège Clausewitz, l’actualité américaine nous invite à croire que la politique est parfois la continuation de la guerre par d’autres moyens. C’est en effet une tactique digne de Verdun que semblent avoir adoptée Donald Trump et ses équipes pour s’emparer du pouvoir après avoir gagné les élections. Si l’on ose la comparaison martiale, il s’agit en effet d’assommer littéralement ses adversaires sous un déluge d’artillerie, avant d’envoyer l’infanterie s’emparer des dernières poches de résistance. Frapper le premier, vite et fort, afin de ne pas laisser à l’ennemi la possibilité de se relever.
Tactique de la saturation
Immigration, wokisme, énergies fossiles, droits de douane, projets expansionnistes, mesures pro-vie : aucun tabou ne sera semble-t-il épargné par ce que Le Monde (21/01) nomme l’« onde de choc du second mandat ». Et le « quotidien de référence » de dresser un panorama des premières mesures envisagées : « Donald Trump a commencé par révoquer 78 décrets de son prédécesseur, Joe Biden, concernant aussi bien la baisse du prix de certains médicaments, les programmes de lutte contre les discriminations que les sanctions contre certains colons juifs violents en Cisjordanie. Puis il a annoncé – comme en 2017 – un retrait de l’accord de Paris sur le climat. Washington quitte également l’Organisation mondiale de la santé. » Le 23 janvier, il a aussi gracié 23 personnes opposées à l’avortement.
Paradoxalement, c’est au « New Deal » de Franklin D. Roosevelt que fait songer ce volontarisme. « L’Amérique, à l’époque, est toujours en pleine crise après le krach boursier de 1929. Il y a urgence à agir. Roosevelt, qui vient d’être élu, lance le “New Deal”. Il demande alors à être jugé 100 jours plus tard. Et pendant cette période, il se démène et fait voter des dizaines de mesures qui vont amorcer le redressement économique des États-Unis » rappelait Stéphane Robert en avril dernier dans son « Billet Politique » de France Culture. L’empreinte que laissera Donald Trump sera-t-elle comparable à celle de son prédécesseur ? En attendant, en observant les États-Unis, le sentiment qui prédomine de ce que côté-ci de l’Atlantique est celui du vertige. Pour reprendre la comparaison esquissée par Vincent Trémolet de Villers sur Europe 1 (17/01), on observe « Jeff Bezos et Elon Musk faire des concours de fusées dans l’espace », pendant que l’on subit ici les « conclaves sur les retraites et [le] débat sur l’interdiction de Twitter ».
Indispensable discernement
La situation française peut conduire à observer avec intérêt, sinon avec envie, la scène américaine. Enfin, un chef qui « cheffe », comme le préconisait Jacques Chirac ! Enfin un grand coup de balai dans le fourbi « woke » dans lequel s’engluent les libertés ! Pour autant, il convient de nuancer le tableau. On n’oubliera pas les affaires de mœurs ou judiciaires douteuses dans lesquelles s’est empêtré Donald Trump, ou encore l’épisode de l’assaut du Capitole à Washington. On n’oubliera pas non plus qu’Elon Musk « incarne à lui seul la fuite en avant transhumaniste », comme nous l’écrivions dans les colonnes de France Catholique en juillet 2022. À ce titre, la présence en rang serré, lors de l’investiture, des patrons de Meta, Amazon, Google ou Apple, a de quoi interroger. Ce concentré rarement observé de puissance politique et économique dispose de moyens gigantesques pour renverser durablement la table, mais pour offrir quel horizon ? C’est la raison pour laquelle, comme le laisse entendre Gérard Leclerc, les catholiques ne doivent pas relâcher leur vigilance durant les quatre prochaines années, tout en encourageant ce qui, dans le « New Deal » de Donald Trump, ira dans le sens du bien commun.
Pour aller plus loin :
- Sur le général de Castelnau et le Nord Aveyron.
- Édouard de Castelnau
- Le défi du développement des peuples et le pacte de Marrakech - la fuite en avant des Nations Unies
- Édouard de Castelnau à l’origine de la victoire remportée par le général Pétain
- MISRAKI–SAMIVEL : LA MUSIQUE DES ÂMES ET CELLE DES CIMES