Aristote, Dante... le legs des anciens - France Catholique
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Le martyre des carmélites
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Aristote, Dante… le legs des anciens

La civilisation chrétienne s’est aussi enracinée dans l’œuvre des auteurs grecs et latins. C’est ce que nous enseigne la fréquentation des classiques. Au Moyen Âge, Dante s’inscrit dans cette lignée et la continue.
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Dante, 1465, Domenico di Michelino, museo dell’Opera del Duomo, Florence, Italie.

Avant de quitter les Grecs et les Latins pour nos classiques de l’ère chrétienne, il est bon de nous retourner vers eux pour les saluer. D’abord une réparation à Aristote.

Un lecteur, que je remercie pour son attention et pour la peine qu’il a prise de m’écrire, m’a signalé une injustice à l’égard du grand philosophe. J’avais écrit que nombre de ses présupposés scientifiques étaient dépassés. Or, me dit ce professeur de médecine, on rend hommage encore aujourd’hui à des intuitions d’Aristote, notamment dans le domaine de l’embryologie.

Il est certain que si nos magistrats de la Cour de cassation s’étaient souvenus d’Aristote, ils n’auraient pas rendu l’arrêt aberrant où ils déclarent qu’on ne sait pas si l’embryon que porte une femme est un être humain au motif qu’il n’en a pas encore toutes les formes. Aristote aurait répondu que, par tout ce qu’il a déjà, c’est une personne humaine en acte et, par tout ce qu’il n’a pas encore, c’est une personne humaine en puissance d’être. Nous pouvons donc aller vingt-cinq siècles après vers Aristote : il nous évitera de penser et d’écrire des absurdités.

Dans l’attente du Créateur

Poursuivons par un trait plus général. La vertu qui domine et symbolise l’Antiquité est la piété envers ce qui est : Pietas envers la Création qui est attente de la découverte du Créateur. C’est cette piété qui nourrit les recherches et les poèmes des Anciens.

« Notre Paris jamais ne rompit
avec Rome.
Rome, d’Athènes en fleur,
a récolté le fruit
Beauté, raison, vertu,
tous les honneurs de l’homme… »

Ces vers du poète disent bien la piété qu’à notre tour nous devons à ces Anciens.

« Béatrice regardait le ciel… »

Nos classiques n’y manqueront pas, à commencer par l’un des plus grands, Dante Alighieri, qui écrit en l’an 1300 de l’ère chrétienne sa Divine Comédie. Quand commence ce long poème, Dante est perdu au sein d’une forêt obscure et il ne trouve aucune voie :

« Nel mezzo del cammin di nostra vita
mi ritrovai per una selva oscura,
ché la diritta via era smarrita. »

« Au milieu du voyage de notre vie,
je me suis retrouvé dans une forêt sombre,
car le chemin droit était perdu » (L’Enfer, chant I).

Dans cette nuit, c’est à Virgile que Dante fait appel, et Virgile le conduit dans une vraie retraite qui traverse l’Enfer et le Purgatoire, avant de le laisser à la porte du Paradis où Béatrice le reçoit et l’emmène jusqu’à l’Empyrée. Ainsi, le poète païen le guide au milieu des passions, mais la vie surnaturelle n’est ouverte qu’à l’amour incarné par Béatrice : « Béatrice regardait le ciel, et moi en elle. »

La vie surnaturelle transfigure la vie naturelle sans l’abolir mais en lui donnant sa vraie finalité. Dante couronne Virgile mais, sans la main de Virgile, Dante était perdu. Le socle naturel permet à la Grâce d’enraciner son arbre et de pousser ses racines au plus profond.