En instituant, en 1942, une fête du Cœur immaculé de Marie, fixée à l’octave de l’Assomption, Pie XII établit une relation entre la conception immaculée de Notre-Dame et la qualité de son Cœur, qui récapitule toute sa personne. Mais la dévotion au Cœur immaculé de Marie en dit plus sur elle que le simple fait de sa préservation du péché. Saint Louis-Marie Grignion de Montfort disait qu’elle est « toute relative à Dieu ». Autrement dit, tout ce que Marie pense, dit et fait, part de Dieu et aboutit en lui. Elle assume entièrement et dans tous ses actes sa qualité de créature, radicalement dépendante de son Créateur.
Une harmonie du cœur
Cette acceptation, simple et humble, transfigure Marie et conforme profondément son Cœur à celui de Dieu. C’est du cœur en effet que procèdent, au sens spirituel, nos bonnes et mauvaises actions : « L’homme bon tire le bien du trésor de son cœur qui est bon ; et l’homme mauvais tire le mal de son cœur qui est mauvais », écrit saint Luc (6, 45). Cette harmonie totale avec Dieu est donc bien une harmonie du cœur.
Mais la dévotion au Cœur de Marie ne peut s’arrêter à une contemplation extérieure. Notre-Dame nous l’a rappelé à Fatima : l’amour de son Cœur est un appel et un chemin vers le Cœur de Jésus. Si le Sacré-Cœur – le Saint-Père le rappelle dans sa dernière encyclique – est le symbole et le principe de la miséricorde divine envers l’humanité, le Cœur immaculé de Marie en est l’inséparable et très doux instrument.
Le Cœur de Marie vit en effet en permanence l’intimité et l’effusion d’amour miséricordieux que nous expérimentons lorsque nous sommes pardonnés par Dieu. N’avons-nous pas déjà fait cette expérience transitoire de joie surnaturelle dans la confession ? Marie, elle, fait cette expérience en dehors du péché, en vertu de la conformité de son Cœur à Dieu. L’illumination, trop éphémère, que nous ressentons dans le pardon reçu est permanente en son âme, préservée et purifiée par Dieu : « Je suis l’Immaculée Conception. » Ainsi, paradoxalement, c’est dans l’expérience de notre faiblesse et de la miséricorde gratuite de Dieu que nous connaissons mieux la grandeur du Cœur de Marie et la nécessité d’emprunter ce chemin pour entrer dans l’amour divin. Du fait de notre condition, c’est l’expérience de la séparation et du retour qui nous fait réaliser « la largeur, la hauteur, la profondeur… de l’amour [et donc du cœur] du Christ » (Ep 3, 18).
Le refuge des pécheurs
La première étape de notre conversion consiste à retrouver l’espérance, à comprendre que notre faute peut être pardonnée, que notre peine peut être confiée à un cœur aimant et maternel : elle commence souvent par une confidence faite au Cœur bienveillant de Marie, refuge des pécheurs. Un élan qui s’explique tout naturellement : c’est du corps de la Vierge bénie que Jésus voulut former tout son corps, et c’est de son Cœur qu’il voulut recevoir son Sacré-Cœur. C’est aussi le Cœur de Marie qui fut transpercé, avec le Cœur du Christ, par la lance du soldat, conformément à la prophétie de Syméon : transpercé, c’est-à-dire ouvert, comme pour nous y frayer une voie. Tout comme le chemin de l’Incarnation passe par Marie, le chemin de la Rédemption s’accomplit aussi par elle. C’est le sens de la dévotion à son Cœur Immaculé, symbole et récapitulation de sa personne « toute relative à Dieu ».
Se consacrer à Notre-Dame, porter le scapulaire, réciter le chapelet ne sont donc pas des pratiques périphériques de la foi chrétienne : à travers ces dévotions, Marie nous prend sous son aile pour nous protéger et nous porter à son Fils. La transcendance de notre foi, en même temps que sa profonde incarnation, se résume et s’accomplit dans le Cœur immaculé de Marie, image et chemin du Sacré-Cœur de Jésus.
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