Le « Catenacciu » de Sartène : un Chemin de croix corse - France Catholique
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Funérailles catholiques : un temps de conversion
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Le « Catenacciu » de Sartène : un Chemin de croix corse

Sur l’Île de Beauté, la tradition du Chemin de croix reste très vive depuis le Moyen Âge. Celui de Sartène, en Corse du Sud, qui met en scène le « pénitent rouge », figure du Christ portant nos péchés, est le plus célèbre.
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Le catenacciu, « l’enchaîné », tire 15 kilos de chaînes.

© Paul Santoni

La cérémonie commence dans le secret, à l’église Santa Maria de Sartène : le « pénitent rouge » entre par une porte dérobée, et s’agenouille devant l’autel, entouré des membres de la confrérie du Saint-Sacrement. Puis il sort du sanctuaire et s’enfonce dans la nuit du Vendredi Saint, illuminée de torches. Il est 21 h 30. L’homme est vêtu d’une tunique de la couleur du sang de la Passion du Christ, sa tête cachée dans une cagoule. « Personne ne connaît son nom, à part le curé : c’est lui qui le choisit, parmi les nombreuses candidatures qu’il reçoit », explique Jean-Paul Poletti, membre de la confrérie et chef du Chœur de Sartène, qui accompagne le pèlerinage de ses chants.

La marche commence, lente et douloureuse, le long des rues. La foule est recueillie et saisie par la mélodie déchirante des polyphonies corses – en particulier le Lamentu di Ghjesu – et le son lancinant et cauchemardesque des 15 kilos de chaînes, que l’homme des douleurs traîne sur le bitume… C’est de ces chaînes que vient son nom et, par extension, celui de la procession : catenacciu, « l’enchaîné ».



Accompagné d’un pénitent blanc

Cette procession fait mémoire de la montée de Jésus, du palais de Pilate, après sa condamnation, jusqu’au Golgotha, où il va être crucifié. Comme le Christ, il porte une croix, de 34 kilos. Il tombe lui aussi trois fois, pendant sa montée au Calvaire. Il est accompagné du « pénitent blanc », figure de Simon de Cyrène, qui l’aide, à porter sa croix. Arrivé, à mi-parcours, à la chapelle San Bastianu, l’homme-Jésus s’agenouille devant la Vierge. Puis il reprend sa marche, de plus en plus pénible, qui s’achève à son point de départ, dans l’église Santa Maria. « Il reste ensuite plus de deux heures à genoux dans l’église, pendant que les 30 000 fidèles de la procession qui le souhaitent viennent toucher et embrasser la croix », rapporte Jean-Paul Poletti.

Si la procession conserve un tel succès et une telle puissance d’évocation, c’est qu’« elle n’a rien d’un folklore touristique », insiste-t-il. En effet, le « grand pénitent » a demandé à endosser ce « rôle » dramatique et douloureux pour des raisons purement spirituelles : « Faire un acte de foi, ou remercier d’une grâce reçue, ou expier un crime très grave… », précise le confrère.


120 confréries


La procession du catenacciu est la plus ancienne de Corse. Ses racines remontent à la confrérie des flagellants, au XIIIe siècle. « C’est une trace de la foi profonde des Corses. Dans tous les villages il y a encore des Chemins de croix tous les Vendredis Saints. Mais celui de Sartène est le plus beau », constate Jean-Paul Poletti. Aujourd’hui, les confréries sont encore au nombre de 120 et toujours actives sur l’île, attirant des jeunes soucieux de perpétuer la tradition : « La foi fait partie de notre identité : la Corse est une terre de la Vierge ! », s’émerveille le chanteur. Nul doute que la Reine du Ciel sera présente auprès de ses enfants de Corse pendant la procession qui honorera son Fils offrant sa vie.

Retrouvez le Catenacciu en direct de Sartène à 21h sur CNEWS.