L'âme du peuple corse - France Catholique
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Noël : Dieu fait homme
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L’âme du peuple corse

La géographie de l'île a contribué à préserver la piété villageoise et les traditions populaires.
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Procession du Vendredi saint dans les rues de Calvi. © Pierre Bona / CC by-sa

Au cœur de la Méditerranée, la Corse est bien placée pour célébrer la religion populaire dont elle a gardé la pratique – même si celle de la religion personnelle s’est, ici comme ailleurs, trop estompée.
Dans populaire, il y a peuple. Pie XII excellait à rappeler la distinction entre peuple et masse. Un peuple, disait-il, « vit de sa vie propre et des organes qui le constituent ». Un peuple est une communion de libertés. Un peuple agit de l’intérieur, par son dynamisme propre. Une masse est inerte et ne se met en mouvement que sur des impulsions extérieures. Tous les manipulateurs ont rêvé de transformer les peuples en masses. La Révolution, qui ne fut pas l’œuvre d’un peuple mais le fait de masses manipulées par des sociétés de pensée, c’est-à-dire de petits noyaux extérieurs, a été un moment de haine cristallisée par l’assassinat de Louis XVI et de Marie-Antoinette.

La dynamique des processions

Un peuple vit, lui, de communions et une procession n’est pas une manifestation. Le peuple qui célèbre son Dieu ou ses saints se célèbre lui-même en processionnant. Il suffit de voir dans les villages comment se constitue cette procession : elle draine au fil des pas ceux qui la regardent passivement puis viennent rapidement s’adjoindre au cortège, demandant à chanter, à porter un cierge ou la statue, pour participer à cet enthousiasme religieux et populaire mais également « en expiation de leurs péchés ». Ainsi constitué, le peuple est naturellement bienveillant, et porté à la joie.

Dans ces traditions populaires, c’est vrai, on trouve beaucoup de restes du paganisme mais ces restes sont souvent ce que le paganisme annonçait sans le savoir : un désir d’en haut, allié à un désir de communion. La religion antique était surtout civique et visait à renforcer l’unité de la Cité. La Cité était d’abord une amitié. Il s’agissait donc de renforcer ces liens entre les hommes. Cette amitié ne pouvait venir que d’en haut. Il n’y a donc pas d’opposition entre ce sentiment païen et l’essence du christianisme. Dans l’Évangile, notre Seigneur s’adresse à chaque personne mais aussi aux peuples, aux foules… et aux éléments naturels. Il parle des villes comme des personnes : il interpelle Jérusalem ou Capharnaüm. Il est saisi de pitié devant les foules qui sont comme des brebis sans pasteur et il commande à la mer.

La Méditerranée était encerclée par Rome, Athènes et Jérusalem, et ce sens du peuple, de la Cité ou du Royaume était très fort dans ces trois patries. Les îles de la Méditerranée sont naturellement et surnaturellement disposées à cette religion populaire qui leur vient du fond des âges et de la Révélation.

Dans l’émission En quête d’Esprit, sur CNews, l’abbé Constant, vicaire général du diocèse d’Ajaccio, observait que l’insularité avait préservé la Corse et ses traditions du vent mondialiste et du déracinement. La géographie de l’île, avec ses montagnes et ses vallées, porte à la célébration du village comme lieu des racines, des fêtes et des deuils. Une piété villageoise s’accorde donc particulièrement bien avec cette géographie.

Il faut enfin noter qu’en notre temps de massification, la conscience individuelle est souvent désarmée devant la manipulation des masses. Un peuple se défend mieux. On a vu dans l’histoire combien l’alliance entre la foi des vieilles babouchkas et la ferveur des peuples avait mis en échec le totalitarisme soviétique. La Pologne de Lech Walesa et de Karol Wojtyla est un brillant exemple de la force de cette religion populaire qui n’est pas contradictoire avec une véritable ferveur personnelle. L’une et l’autre se nourrissent. Souffler sur les braises de la religion populaire ne peut que raviver la flamme de la Foi.