Je n’avais jamais entendu parler de Nabeel Qureshi jusqu’à une date récente, Chance (providence?) je suis tombé sur son nom. Hélas, c’était par l’annonce de son décès en son jeune âge de trente-quatre ans.
C’est par cette annonce que j’ai appris qu’il avait écrit plusieurs ouvrages. Un titre m’a spécialement accroché : À la recherche d’Allah, la découverte de Jésus. Un Musulman dévot découvre la Chrétienté.
Intrigué par le titre du livre et la brève notice biographique de l’annonce, je l’ai acheté. Je l’ai lu en quelques soirées, totalement captivé. C’est un récit remarquable exposé honnêtement, clairement, passionné par la recherche de la vérité.
Il relate l’histoire d’un jeune homme élevé depuis l’enfance en musulman dévot qui, suite à la rencontre en Faculté d’un étudiant chrétien engagé, commence à se poser des questions sur les fondements de sa personnalité et de son identité religieuse.
Le récit est aussi attachant grâce à la rectitude du trajet intellectuel et spirituel où s’embarque Nabeel Qureshi. Il décortique soigneusement et rigoureusement les preuves d’authenticité du Nouveau Testament, puis du Coran. Son étude s’étire au long de ses études en Faculté puis en école de médecine, avec des discussions passionnées et vigoureuses avec son ami, ne cédant que devant des preuves irréfutables.
Mais sa recherche est loin d’être un exercice académique. Car le résultat aurait bien davantage qu’une signification personnelle. Pour quiconque élevé dans la tradition et la culture de l’islam, la conversion au christianisme aurait de profondes conséquences tant familiales que dans sa communauté.Il le déplorait ainsi : « rejoindre le Christ signifiait la destruction de mes liens familiaux. Serais-je soumis à une telle rupture ? »
Nabeel entretenait avec son père et sa mère, son Papa et sa Maman, des relations extraordinairement intimes et tendres. Le récit de l’aveu de la peine causée par sa décision est profondément émouvant. Dès qu’ils apprirent sa conversion, son père, officier de marine, « a paru amoindri, j’ai tué sa fierté. »
Et, apprenant la nouvelle, sa mère a eu un malaise et dût être hospitalisée. « Elle a survécu, mais ses yeux n’ont plus jamais brillé comme avant, j’ai éteint leur lumière. »
Comment ce fils dévoué, musulman dévot, a-t-il pu briser l’affection de ses parents et renoncer à une identité sûre et respectée ? Poser la question fait reprendre la réponse passionnée de Paul aux Philippiens :
« Mais tous ces avantages dont j’étais pourvu, je les ai considérés comme un désavantage, à cause du Christ. Bien plus, je considère tout comme désavantageux à cause de la supériorité de la connaissance du Christ. » (Ph, 3:7-8).
La conversion est une affaire si intime et si complexe que chaque parcours présente des couleurs et contours très divers. Voici le cadre que Nabeel propose de son cheminement.
Être chrétien implique une véritable souffrance offerte à Dieu. Non pas comme la souffrance d’un Musulman qu’Allah lui imposerait, mais comme l’expression du fond du cœur de la reconnaissance d’un enfant envers ce Dieu qui a souffert pour lui.
Contredisant la christologie réductionniste qui insiste exclusivement sur l’aspect humain de Jésus, le réduisant à une fonction de simple prophète d’Israël, guère mieux, le témoignage de ce converti au christianisme résonne fortement :
La bonne nouvelle, c’est l’amour de Dieu envers nous, le faisant venir sur notre terre et souffrir pour nous, et que l’incapacité de l’humanité à assurer son salut a amené Dieu à nous sauver. C’est la beauté de l’Évangile : tout à propos de Dieu et ,de ce qu’Il a fait par amour pour nous. Un évangile privé de la divinité du Christ est un évangile amputé.
Mais le témoignage provoquant de Nabeel ne s’arrête pas à cette vigoureuse déclaration. Bien que persuadé dans sa tête comme au fond de son cœur de la vérité de l’Évangile, il tremblait encore de terreur à l’idée de l’effort et de la souffrance qu’il entrevoyait. Il se débattait, nous dit-il, en un conflit interne de récriminations et de consolation. Mais, soudain, comme par une brillante révélation, tout son être fut fut rasséréné par une nouvelle assurance. Il la résume ainsi : « il ne s’agit pas de moi, mais de Lui , et de Son amour pour Ses enfants. »
Cette conviction le poussa vers une formation missionnaire, afin de faire partager l’Évangile libérateur qu’il avait reçu librement. S’il en avait eu connaissance, il aurait certainement fait écho aux paroles de S.S. François dans « Evangelii Gaudium » : « La raison première d’évangéliser se trouve dans l’amour reçu de Jésus, la conscience du salut qu’il nous incite à affirmer par un amour plus grand envers Lui. Quel amour n’éprouverait le besoin de parler du bien-aimé, de le montrer, de le faire connaître ? »
Nabeel consacra douze ans à son intense tâche d’évangélisation : poursuivant des études, prononçant des conférences, écrivant des ouvrages, donnant des conseils. Il a publié des vidéos sur internet, montrant ferveur, profondeur, et humour. Puis, brutalement, le ministère de ce vigoureux et attirant évangéliste fut brisé par un cancer malin.
Il continua à partager sa foi — même de son lit d’hopital. Un bref message vidéo « depuis son lit de mort » met en garde contre un mauvais usage de son enseignement. Insistant sur l’importance de la recherche de vérité, il prie pour qu’elle soit toujours « imprégnée d’amour et de paix. » Car le but final n’est pas de se confronter mais de s’entr’aider. Il prie avec feveur pour que son ministère laisse un héritage d’amour, de paix, de vérité. De générosité réciproque.
C’est une grande perte que la disparition d’un disciple à l’esprit aussi ouvert nous l’ait enlevé à l’âge de trente quatre ans. Mais les graines qu’il a plantées continueront à porter leurs fruits. Son courageux témoignage en inspirera d’autres. Il nous a quittés jeune homme, mais déjà plein de la maturité dans le Christ.
https://www.thecatholicthing.org/2017/11/01/the-joy-and-cost-of-the-gospel/