« Il est toujours bon, pour ne pas vieillir, de se retremper dans l’esprit de ses origines… » Cette citation du Père Jacques Sevin, en préambule de l’ouvrage, résume l’esprit du pèlerinage Notre-Dame de Chrétienté et celui de l’Église, depuis la Pentecôte. Connaître, aimer et transmettre – sens du mot tradere, « tradition » – ses racines pour assurer la solidité et la croissance de l’arbre de l’Église.
À la suite de Péguy
« L’esprit des origines » de cette grande aventure spirituelle et militante, ce sont les intuitions fortes et audacieuses de quelques catholiques amoureux de la messe traditionnelle et désirant la préserver et la transmettre, pour contribuer à rebâtir une France chrétienne et fidèle aux « promesses de son baptême », en réponse, notamment, à l’appel lancé par Jean-Paul II au Bourget, en 1980. C’est dans cet esprit que s’élance vers Chartres, en 1983, le premier Pèlerinage de chrétienté, pour prier et faire pénitence, dans un esprit missionnaire, sur les pas de ses illustres prédécesseurs, dont le premier fut Charles Péguy, avant la Première Guerre mondiale, suivi du grand Pèlerinage étudiant de Chartres, à partir de 1935 (éteint en 2022). D’autres influences en sont également à l’origine, comme celle des frères Charlier, éducateur et peintre inspirés, de Dom Gérard, fondateur du monastère du Barroux, de Gustave Thibon, philosophe poète, et du grand pèlerinage polonais de Czestochowa, où « la ferveur d’un peuple associe sa marche religieuse au sort de la nation ».
La royauté du Christ sur les âmes
L’ouvrage évoque aussi le douloureux combat qui fut mené, à travers le pèlerinage, pour faire reconnaître la légitimité de la messe traditionnelle, en pleine crise postconciliaire, rappelant les milliers de pèlerins assistant à la messe devant les portes closes des cathédrales… Mais le vent de la Pentecôte a soufflé sur Chartres. Depuis 1989, les portes de ces cathédrales se sont ouvertes et des évêques viennent y célébrer la messe, dans un esprit pastoral.
Outre cette réconciliation essentielle, depuis 42 ans, rien n’a changé dans ce pèlerinage : l’âme en demeure la Tradition de l’Église et la chrétienté – « la proclamation de la royauté de Jésus-Christ sur les âmes, sur les institutions et sur les mœurs ». Les chevilles ouvrières en sont ces milliers de laïcs engagés, ceux qui organisent et ceux qui marchent. Le cœur en est le Christ, donné aux âmes par des centaines de prêtres. Les moyens en sont la formation intellectuelle et spirituelle des pèlerins – dans la plus fidèle doctrine catholique car, rappelle l’abbé de Massia, « la plus grande des charités est de dire la vérité et d’annoncer Jésus-Christ, et tout Jésus-Christ »… Le tout dans la recherche d’un but immuable : la conversion.
Et missionnaire, ce pèlerinage l’est plus que jamais, si l’on en juge par l’afflux de jeunes pèlerins de tous bords et par les nombreuses conversions et vocations qui naissent mystérieusement sur ses chemins.
À travers articles de presse et chroniques, Rémi Fontaine fait œuvre de mémoire pour que les anciens se souviennent. Que les nouveaux mettent leurs pas, joyeusement et humblement, dans cette héroïque épopée. Et que tous demeurent fidèles aux intuitions des origines, afin que cette œuvre poursuive sa mission au service des âmes et de l’Église.
Chartres t’appelle !, Rémi Fontaine, éd. Via Romana, 2024, 178 pages, dont un cahier photos de 6 pages, 22 €.
