Face aux crises, la foi, pilier du mariage - France Catholique
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Marie dans le plan de Dieu
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Face aux crises, la foi, pilier du mariage

© Antoine Mekary / Godong

© Antoine Mekary / Godong

Face aux crises, la foi, pilier du mariage

Pour les laïcs, la vocation à la sainteté passe par le mariage. Celui-ci n’en est pas moins vulnérable : on a dénombré l’an dernier 120 000 divorces pour 240 000 mariages. Les couples mariés à l’Église n’en sont pas préservés. Un constat d’échec qui n’est pas du tout inéluctable, si l’on retrouve le sens du don de soi et du sacrement.
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«La dégradation a été lente mais inexorable. » Dominique et Marie, 33 ans de mariage et trois enfants, ont laissé leur union s’enliser dans la routine. Dominique a mis son travail à la première place et donné la priorité aux soirées avec ses amis. Progressivement, Marie a eu « l’impression d’être toujours le second choix de mon mari, sacrifiée à sa vie personnelle ». Quand leur dernière fille quitte le nid, le couple est au bord du gouffre. « On s’est retrouvés face à face mais nous n’avions plus rien à nous dire. On vivait en célibataires mariés, et moi, j’étais à bout. J’envisageais la séparation… », se souvient Marie.

« Un malentendu sur l’amour »

La majorité des couples traversent des crises, plus ou moins longues et graves, liées à des raisons diverses : deuil, chômage, infidélité, addictions, usure, enfants, santé… Si beaucoup n’y résistent pas, c’est qu’il y a « un malentendu sur l’amour », estime le Père François Potez. Curé de la paroisse Saint-Philippe-du-Roule, à Paris, il prépare de nombreux couples au mariage et regrette qu’aujourd’hui, « on se marie parce qu’on s’aime, sans comprendre que l’amour est en réalité construit sur une amitié et fondée sur une décision, un engagement. Il faut se marier parce qu’on a décidé de s’aimer. »

Pour le prêtre, qui vient de publier Puisque vous avez décidé de vous aimer… (Mame), l’autre problème, c’est que « les couples ne prennent pas assez de temps gratuit à deux. Ils s’essoufflent, submergés par le travail, les enfants, les activités personnelles, les réseaux sociaux… Ils ne savent pas parler en profondeur de leurs désirs, leurs besoins. Il y a une perte de la qualité de présence et d’écoute. » Difficile alors, quand on n’a pas entretenu le cœur de la relation, de faire face aux intempéries.

Un diagnostic partagé par Dominique et Marie : « On était tellement persuadés d’être mariés pour la vie qu’on n’a pas pensé qu’il fallait prendre soin de notre couple… On ne s’est pas rendu compte qu’on l’avait négligé. Quand nous en avons pris conscience, c’était déjà presque trop tard. Le fil de la communication était coupé et il nous paraissait impossible de recoller les morceaux. »

Pourtant, « nous ne devons pas nous effrayer d’une crise : elle nous aide à grandir, elle est une opportunité pour le couple », a rappelé le pape François, lors de sa rencontre avec les responsables de l’association catholique internationale Retrouvaille, qui accompagne les couples en difficulté. « La solution n’est pas de penser rapidement et de manière irresponsable à la séparation, mais d’assumer le mariage comme un chemin de maturation, où chacun des conjoints est un instrument de Dieu pour faire grandir l’autre », écrit le Saint-Père dans la lettre apostolique Amoris laetitia. Comment faire de ces traversées du désert une « opportunité » ?

Le plus important est d’avoir « la volonté de reconstruire son mariage, en ayant la conviction qu’une union fondée sur le sacrement du mariage mérite autre chose que la séparation, assurent Hubert et Marianne de Hillerin, coordinateurs de l’association Retrouvaille. Ce désir vital est la première marche pour essayer de reconstruire et faire de son couple la première des priorités ». Dominique et Marie le confirment : « Ce qui nous a fait tenir, c’est la volonté de revenir à notre choix du départ : nous aimer. Nous avons décidé de nous battre pour sauver notre mariage. C’est un long travail sur le couple et sur chacun de nous. Mais notre vie est encore plus belle après ! »

Une renaissance est possible

Un travail qui exige le courage de demander de l’aide. « Il faut reprendre les choses au commencement, en présence d’un témoin extérieur : quelqu’un qui ne prenne pas parti et qui aide à renouer le dialogue », assure le Père Potez. En France, plusieurs associations catholiques proposent un accompagnement humain et spirituel – comme Retrouvaille. La particularité de cette association est d’aider les couples « malades » par des couples ayant traversé une crise dont ils sont sortis. « Nous témoignons de la façon dont nous avons surmonté les difficultés, pour leur montrer qu’un chemin existe quand on veut y arriver, et qu’une renaissance est possible », disent Hubert et Marianne de Hillerin.

Les autres piliers de la reconstruction sont l’apprentissage d’un authentique dialogue, et la prière. « Nous leur donnons des outils pour apprendre à gérer les conflits et à prendre conscience de leurs héritages familiaux respectifs, qui impactent beaucoup la relation », expliquent les époux Hillerin, eux-mêmes sauvés de l’échec. « Nous avons appris à nous écouter et à chercher ensemble des solutions à nos conflits, en faisant des compromis », témoignent Dominique et Marie, dont le mariage a aussi été sauvé grâce à l’aide de Retrouvaille. « Nous avons appris à prendre du temps pour notre couple, à choisir un nouvel équilibre de vie, en faisant des sacrifices personnels. » Des sacrifices auxquels « il faudrait également préparer les futurs mariés », rappelle le Père Potez, pour qui le mariage implique « un don de soi décapant, qui passe par une mort à soi-même. Il faut donner à l’autre le meilleur de soi-même. »

Aux couples en crise, le prêtre demande d’abord – outre d’avoir la volonté de reconstruire leur couple – « ce qui leur coûte chez l’autre », pour mettre au jour les difficultés. Avant de leur demander « ce qu’ils aiment chez l’autre », afin de « faire mémoire de ce qui les a attirés, pour ranimer ce premier amour enfoui ». Un travail de dentelle au secours de l’amour, qui doit s’appuyer sur la grâce du sacrement de mariage. « Je leur demande s’ils croient que Dieu est tout-puissant et qu’il peut les sauver, avec leur bonne volonté. »

Le Père Potez insiste sur le rôle capital de la prière – sans oublier que celle-ci est d’abord individuelle – ainsi que sur la messe et le sacrement de réconciliation. Pour la prière en couple, « il ne faut pas se mettre la barre trop haute : dire un simple Je vous salue Marie, c’est déjà très bien », rassure-t-il. Tout cela « réactive le sacrement de mariage : Dieu est fidèle, il faut s’appuyer en tout premier sur lui », plaide le pasteur.

Entretenir le feu

Mais plutôt que d’en arriver à rallumer un feu éteint, les époux gagneraient beaucoup à « entretenir le feu de leur amour, en sanctuarisant du temps », insiste le Père Potez, pour qui « un amour qui stagne devient infidèle, d’une manière ou d’une autre ». Outre une soirée mensuelle en amoureux, il recommande un « voyage de noces annuel, pour réviser ensemble son équilibre de vie… » Le temps de se redire à quel point « il est vital de se donner la priorité, de ne pas oublier son couple au profit des autres choses », insistent Hubert et Marianne de Hillerin. Enfin, « il faut aussi dire aux couples qu’il faut beaucoup de courage pour aimer, rappelle le Père Potez. Mais, confiance, vous êtes très aimés du Père et sa miséricorde est plus grande que nos échecs ». 

Puisque vous avez décidé de vous aimer… Père François Potez, Mame, 240 pages, 15,90 €.