En Roumanie, la persécution oubliée des catholiques - France Catholique
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En Roumanie, la persécution oubliée des catholiques

À l’occasion de la publication d’une passionnante synthèse sur les sept évêques roumains, martyrs du communisme, béatifiés par le pape François en 2019, France catholique a rencontré Mgr Mihai Frățilă, évêque de l’éparchie Saint-Basile-le-Grand de Bucarest.
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Martyrs du communisme, le livre de Francisca Băltăceanu et Monica Broşteanu, fait découvrir au public français la violence des persécutions subies par l’Église gréco-catholique sous le communisme. De quelle réalité parle-t-on en 1948, année de l’avènement du communisme ?

Mgr Mihai Frățilă : En 1947-1948, l’Église catholique est constituée de deux évêchés de rite latin et d’expression roumaine, à Bucarest et à Iaşi, et de quatre diocèses roumains gréco-catholiques situés en Transylvanie. À ces six diocèses de rite latin, s’ajoutent cinq diocèses gréco-catholiques situés en Transylvanie. En 1948, pour une population de 16 millions d’habitants, on comptait 1,5 million de grecs catholiques roumains.

Dès que les communistes arrivent au pouvoir, ils prennent les gréco-catholiques pour cibles…

Il y avait déjà un précédent en Ukraine en 1946. Staline ne voulait pas que l’Église grecque catholique d’Ukraine, comparable à l’Église orthodoxe dans ses manifestations rituelles et culturelles, échappe à l’influence de Moscou par la communion catholique et la nomination des évêques, c’est-à-dire par le lien avec Rome. L’Église orthodoxe était plus manipulable, parce qu’il n’y a pas d’autorité centralisée. Les catholiques latins de Roumanie ont été relativement épargnés : en plus, une partie appartenait à l’ethnie hongroise et ne représentait pas un grand danger pour la majorité orthodoxe. Les gréco-catholiques devaient en revanche disparaître, parce qu’ils pouvaient échapper au contrôle de l’État.

Pour faire disparaître administrativement les gréco-catholiques, le pouvoir communiste a cherché à leur faire rallier l’Église orthodoxe…

En effet, c’est un paradoxe de constater qu’un régime athée a utilisé des arguments théologiques pour pousser les gréco-catholiques à retourner dans leur « Église mère », c’est-à-dire dans l’Église orthodoxe. Pour favoriser ce projet, il a mis en œuvre les moyens les plus hypocrites pour donner une façade de légalité à ces « conversions », en piégeant les fidèles et en les incitant par la pression à signer des documents sans valeur. L’arsenal de la police secrète était immense, et au bout de quelques mois, on a pu affirmer que l’Église avait disparu. C’était un mensonge, évidemment…

La tactique des communistes est surprenante : pour mener à bien leur projet, ils misent sur la ruse et le mensonge, plutôt que sur la brutalité…

Oui, mais il ne faut pas oublier que ces hypocrisies de toutes sortes ont été accompagnées de brutalités bien réelles. Tous ceux qui pouvaient structurer l’Église gréco-catholique ont été arrêtés à partir de l’été 1948. Des listes de prêtres jugés dangereux furent établies et les perquisitions ont commencé.

En décembre 1948, sept évêques sont arrêtés : ils représentent l’intégralité de l’épiscopat gréco-catholique ?

Oui, en effet. Heureusement, Pie XII a demandé que chaque évêque emprisonné puisse disposer d’une « réserve ». Par la voie de la nonciature, dans le monastère orthodoxe où ils étaient emprisonnés, ils ont pu ordonner six évêques supplémentaires, en particulier grâce à un moine orthodoxe, resté loyal, qui a pu assurer une correspondance clandestine avec la nonciature, correspondance qui a permis l’organisation de ces ordinations. D’autres prêtres ont été ordonnés évêques en secret peu de temps après.

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