En France, 50 % des garçons de plus de 12 ans fréquentent un site pornographique au moins une fois par mois. Le taux de consultation des sites X a augmenté de 9 points en cinq ans. Un raz-de-marée qui fait dire à ceux qui sont en première ligne – parents, enseignants ou médecins – que c’est désormais l’industrie dite « adulte » qui est la première « éducatrice » des jeunes en matière sexuelle. En témoigne cet échange entre une formatrice et un jeune garçon, récemment observé par une journaliste de Charlie Hebdo dans une classe de 3e : « Comment sait-on si sa partenaire est consentante ? » demande l’intervenante. La réponse fuse : « Quand elle ne se débat pas. » Accablant.
Pas un jour ou presque ne se passe sans que la chronique des faits divers ne soit alimentée par des criminels ou délinquants biberonnés au porno. Sans compter le ravage que suscite cette gangrène dans l’esprit public : « On asservit plus facilement les peuples avec la pornographie qu’avec les miradors », disait Soljenitsyne. Y compris dans les milieux les plus inattendus, l’heure est à la mobilisation avec un mot d’ordre : éduquer. Tout le problème est de savoir comment.
En 2001, l’article 2 de la loi élargissant le délai d’avortement de 10 à 12 semaines de grossesse disposait qu’« une information et une éducation à la sexualité [seront] dispensées dans les écoles, les collèges et les lycées à raison d’au moins trois séances annuelles et par groupes d’âge homogène ». Dans les faits, cet article ne fut jamais appliqué. C’est la raison pour laquelle, en 2023, le Conseil supérieur des programmes a été chargé par Pap Ndiaye, éphémère ministre de l’Éducation, d’élaborer un programme, passé ensuite par la moulinette de la Direction générale de l’enseignement scolaire (DGSCO).
Offensive idéologique
C’est ce programme, dont certains aspects ont été révélés à l’automne, qui a déclenché une vive controverse, conduisant Alexandre Portier, ministre délégué – lui aussi éphémère – chargé de la Réussite scolaire, de considérer devant les sénateurs que ce programme n’était « pas acceptable en l’état ». Éconduit avec une partie du gouvernement Barnier après la censure, Alexandre Portier a retrouvé son siège de député. C’est entre les mains d’Élisabeth Borne que se retrouve aujourd’hui ce dossier plus que sensible – et celle-ci semble bien décidée à le pousser à son terme : « Il y a un texte qui est prêt, a-t-elle déclaré le 6 janvier. On vise un Conseil supérieur de l‘éducation d’ici fin janvier. »
Pourquoi sensible ? Parce que derrière le projet d’apprendre aux enfants et aux adolescents à poser un regard approprié, et adapté à leurs âges, sur les questions les plus intimes, se dessine un projet idéologique alternatif, non dénué de toxicité. Ce dessein a été identifié à juste titre par des observateurs vigilants qui l’ont dénoncé, non sans outrances parfois, fournissant ainsi des arguments faciles à ses promoteurs. De fait, le projet, disponible sur le site internet du ministère de l’Éducation nationale, n’apprend pas à se masturber et n’incite pas non plus ouvertement les élèves à changer de sexe, comme on a pu le lire au fil des réseaux sociaux.
« Séparer le sexe biologique du genre »
Pourtant, ceux qui ont étudié le projet dans le détail n’ont pas manqué d’y trouver des éléments réellement problématiques. Comme cet objectif fixé aux élèves de moyenne et grande section (entre 4 et 6 ans) : « Identifier les différentes formes du cadre familial : famille hétéroparentale, monoparentale, homoparentale », objectif qui sera l’objet d’un nouveau travail en CE1 et en CM2. Ou l’inévitable initiation à la lutte contre les « stéréotypes de genre », infligée à partir du CP, dès l’âge de 6 ans. Ou encore l’introduction et l’analyse des « notions de sexe et de genre » – sous-entendu : distinctes – prévues à partir de la 5e. Ou enfin la promotion des contraceptifs dès la classe de 4e, sans allusion aucune à la maîtrise de soi ou à la chasteté. Et que dire de la présentation de « l’éventail des décisions possibles en cas de grossesse non désirée », prévue en première, dont on imagine assez facilement qu’il risque fort de ne se résumer qu’à une seule option : l’avortement.
Interrogé sur France Culture au début du mois de décembre, le secrétaire général de l’enseignement catholique, Philippe Delorme, a clairement identifié ces insertions problématiques : « Il y a quand même une pensée derrière tout ça qui consiste à séparer le sexe biologique du genre, comme si c’était uniquement la société qui construisait le genre. Il y a bien ici une idéologie qui traverse ce programme et sur laquelle nous ne sommes pas d’accord. On sait très bien qu’un homme et une femme, c’est différent », a-t-il expliqué. Une évidence loin d’être partagée, comme en témoigne la mobilisation des syndicats de l’enseignement – de la FSU-SNUipp à SUD éducation – en faveur de l’application de ce programme, comme si l’Éducation nationale n’avait pas d’autres sujets majeurs à traiter…
C’est bien un combat idéologique qui se joue là, et pas seulement un affrontement programmatique. Rappelée par François Bayrou, Aurore Bergé, ministre de l’Égalité femmes-hommes, s’est empressée d’affirmer que l’éducation à la sexualité était « une nécessité absolue » dès le plus jeune âge et qu’il fallait apprendre aux écoliers « le respect vis-à-vis de toutes les familles […], qu’elles soient hétérosexuelles ou homoparentales ».
École illégitime et parents désarmés
Reste une question dont on ne peut faire l’économie. Quand l’association SOS Éducation, en première ligne dans le combat contre le programme d’éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle (EVARS), rappelle que le rôle de l’école est d’instruire et que celui des familles est d’éduquer, on est incité à la suivre dans ce raisonnement. Mais comment penser que ceux qui deviennent parents actuellement – la génération née dans la première moitié des années 1990 – sont en mesure de dispenser une parole adaptée à leurs enfants, quand eux-mêmes ont déjà été pour beaucoup « déconstruits », voire nourris à l’imaginaire pornographique ?
Si l’école est illégitime et les parents sciemment désarmés, comment permettre aux jeunes d’aujourd’hui de disposer du socle indispensable à la construction d’une personnalité libre et généreuse, y compris dans le domaine sexuel ? L’Église, et l’anthropologie dont elle est porteuse, sont à n’en pas douter l’une des sources où puiser les solutions de demain. À condition bien sûr de faire preuve de courage et de se préparer aux attaques les plus virulentes.
Pour aller plus loin :
- INTRUSION DE LA THEORIE DU GENRE A L’ECOLE ET DANS LA SOCIETE
- Le défi du développement des peuples et le pacte de Marrakech - la fuite en avant des Nations Unies
- S.O.S. ! Pour les pervertir, l’Etat kidnappe nos enfants !
- Quand le virtuel se rebelle contre le réel, l’irrationnel détruit l’humanité
- Le Gender pour tous et les droits des parents