Les persécutions subies par les chrétiens depuis les origines de l’Église se rapportent au mystère même de la Rédemption. Il s’agit, selon les Écritures elles-mêmes et singulièrement l’Apocalypse, de rendre le témoignage de la foi. La lettre que saint Ignace d’Antioche adresse à ce sujet aux Romains (vers 117) est vraiment exemplaire, car elle est significative de la disponibilité à l’oblation de ceux qui refusent de trahir leur Seigneur : « Je suis le froment de Dieu et je suis moulu par la dent des bêtes pour être trouvé un pur pain du Christ. »
Il ne faudrait pas penser que saint Ignace n’exprime qu’un moment de l’histoire du christianisme. Les persécutions n’ont jamais cessé, et il suffit de considérer le siècle précédent pour nous en persuader, à l’heure des totalitarismes, ces religions séculières qui ont voulu se substituer à la religion du Christ. La chute du mur de Berlin, loin d’avoir clos le chapitre a réouvert une page, qui s’énonce en chiffres impressionnants. Selon l’ONG protestante Portes ouvertes, plus de 360 millions de chrétiens sont aujourd’hui persécutés dans le monde, toutes confessions confondues. Et le nombre de pays touchés ne cesse de croître. En 2022, 5 621 chrétiens ont été tués. La Corée du Nord s’inscrit en tête de ce classement douloureux, suivi par la Somalie, le Yémen, le Nigeria. On sait aussi que l’Afrique francophone qui avait été jusqu’ici épargnée est désormais aussi la proie d’un djihadisme meurtrier. Au Burkina Faso, quinze chrétiens ont été tués la semaine dernière dans leur église.
Pouvons-nous, peuples d’Occident, nous considérer comme indemnes de cette persécution, protégés par des États de droit, veillant sur la liberté de conscience et la liberté religieuse ? Sans doute n’avons-nous pas à affronter le même type de menaces, mais force est de reconnaître que, même chez nous, des mesures coercitives sont prises à l’égard des chrétiens attachés aux exigences de leur foi. C’est ainsi que l’organisme Family Research Council explique : « Au Royaume-Uni, des chrétiens sont arrêtés pour avoir prié silencieusement devant des installations d’avortement. En Allemagne, nous assistons à des répressions contre des formes alternatives basées sur la foi. Aux États-Unis, des enseignants et entraîneurs chrétiens sont licenciés pour leurs positions sur la sexualité humaine. »
Police de la pensée
En France, une campagne virulente a été déclenchée, ces dernières semaines, contre les écoles catholiques qui prennent au sérieux leur identité religieuse, au demeurant reconnue par la loi. L’intention des accusateurs est claire. Il s’agit d’obtenir la fin du financement public des établissements et dès lors leur fermeture. Nous sommes plus généralement face à une offensive qui entend éradiquer la culture chrétienne, en exerçant une véritable police de la pensée. La laïcité, loin d’être la garantie de la liberté de conscience, écrit Alain Finkielkraut, « s’assigne pour mission prioritaire l’effacement de la marque chrétienne de la France ». C’est dire à quel point nous devons être en état de mobilisation spirituelle, pour nous opposer à cette offensive qui menace la libre expression de nos convictions chrétiennes.