Cette œuvre, la plus considérable de la chrétienté, a été composée entre 1303 et 1321, et publiée sous le titre La Commedia di Dante Alighieri di Fiorenza. En 1596, on comptait déjà 55 éditions du poème.
On comprend l’importance de Virgile pour Dante (v. 1265-1321) quand on lit son ouvrage politique écrit en latin, De monarchia, « De la monarchie », où Dante se fait le chantre d’un pouvoir universel qui serait celui de l’Empereur. Il considère que la vocation de l’Empire romain à organiser la terre a été vraiment un appel divin pour préparer l’Incarnation. Il appuie sa démonstration sur les poèmes de Virgile, notamment l’Énéide. La Divine Comédie réunit les vertus théologales de foi, d’espérance et de charité, et de nombreux mythes de l’Antiquité, dont celui d’Apollon qui semble une préfiguration des mystères chrétiens. Comme saint Thomas d’Aquin à la même période fondera la doctrine de l’Église sur les présupposés naturels d’Aristote, la poésie divine de Dante trouve son socle dans Virgile. Virgile est à Dante ce qu’Aristote est à saint Thomas d’Aquin.
Un ouvrage fondateur de l’italien
La Divine comédie est comme un trésor rassemblant toutes les connaissances de l’époque. Elle est aussi l’ouvrage fondateur de la langue italienne car Dante a décidé de l’écrire non pas en provençal, comme écrivaient les poètes de l’époque, ou en latin, mais dans la langue toscane de Florence, sa patrie. La beauté de ses vers et sa composition ont ainsi fait de la langue toscane la langue mère de l’Italie et, plus loin, des îles de la Méditerranée. Le chanteur corse Jean-Paul Poletti a raconté qu’un berger lui avait appris un chant qui décrit des brebis s’en allant l’une après l’autre dans le brouillard du matin. Or, comme il lui faisait observer que les vers que lui chantait le berger figuraient au chant III du Purgatoire de Dante, son interlocuteur se serait écrié : « Dante ! mais c’est un voisin ! »
L’histoire ne dit pas si la chanson du berger venait de la Divine Comédie ou si Dante avait peuplé son œuvre poétique de chansons populaires, comme le fit Homère dans L’Odyssée. De la ritournelle du berger des montagnes corses au sommet de la philosophie et de la mystique, avec le poème de saint Bernard à la Sainte Vierge dans Le Paradis, Dante a réuni toutes les beautés de ce qu’on appelait alors la chrétienté et qui était en fait l’univers connu. La chrétienté était alors symbolisée par deux pouvoirs : le pape et l’Empereur. Le parti pris du poète pour la monarchie universelle lui a fait placer Hugues Capet au purgatoire, comme étant « le tronc de cette race ingrate », la lignée capétienne qui a fait le royaume de France, refusant de se soumettre à l’Empire et préfigurant l’ordre nouveau de l’Europe qui est celui des royaumes.
Réintroduit par Ozanam
Cette nostalgie de l’Empire romain, qui était partagée par de nombreuses élites de l’époque, n’empêche pas Dante d’être un sommet de la pensée et de la poésie universelle. Réintroduit en France au XIXe siècle, notamment par Frédéric Ozanam, il a inspiré de nombreux auteurs modernes.