L’évangile de ce jour (Marc 1, 21-28) nous dit que les gens étaient « étonnés » et « stupéfaits ». Ils étaient « étonnés par son enseignement, car il enseignait comme quelqu’un ayant autorité et non à la façon des scribes ». Ils « étaient stupéfaits et se demandaient l’un à l’autre : « Qu’est ceci ? Un nouvel enseignement avec autorité. Il commande même aux esprits impurs et ils lui obéissent. » Nous ne devrions pas esquiver cet ébahissement comme si, évidemment, c’est ce que provoque Jésus, mais plutôt tourner notre attention sur ce qui l’a causé.
L’autorité est au centre de la vie et de la mission de notre Seigneur, et le point de départ de son conflit avec les chefs d’Israël. La légitimité de sa vie publique – et, de vrai, de sa Personne même – se résume à cette unique question : « Par quelle autorité fais-tu ces choses ou qui t’a donné autorité pour les faire ? » (Marc 11, 28)
Les chefs des prêtres, les scribes et les anciens posent cette question à la fin de la vie publique de Jésus. Mais le problème était posé depuis le début. Tôt dans son ministère galiléen, sous les yeux critiques des scribes et des Pharisiens, Jésus guérit le paralytique – pour montrer que « le Fils de l’Homme a autorité sur terre pour pardonner les péchés » (Marc 2:10). C’est à dire qu’il a autorité divine.
Dans l’évangile de Jean, son ministère public commence avec la question de son autorité sur le Temple : « quel signe peux-tu nous montrer pour faire cela ? » (Jean 2:18). En réponse, Jésus lui-même établit le témoignage qui doit être donné, la preuve qu’il a autorité même sur le Temple : « détruisez ce temple et en trois jours je le relèverai » (Jean2:19). Donc sa résurrection est promise comme preuve de son autorité divine.
Par quelle autorité ? C’est la question cruciale. Maintenant, notre oreille moderne pourrait l’entendre comme une question rhétorique qui révoque purement et simplement la notion d’autorité. Au contraire, les contemporains de notre Seigneur appréciaient la réalité de l’autorité, même s’ils en abusaient (comme l’ont fait les hommes de toutes les époques). Ils comprenaient qu’il y avait une autorité divine et une autorité dans ce monde. Ils avaient juste du mal à croire que le charpentier de Nazareth la possédait.
De même, nous ne devrions pas penser que l’autorité du Christ était quelque chose qu’il possédait (comme s’il aurait pu ne pas la posséder). Elle est centrale dans sa mission et sa vie publique parce qu’elle fait partie de Lui, partie de Son être comme Fils de Dieu. Il est la Parole du Père qui fait autorité, l’Auteur de toutes choses. Il révèle le Père avec autorité et authenticité parce qu’Il est éternellement dans le sein du Père.
Cela désigne aussi la raison d’être de l’autorité du Christ. Elle est dirigée vers notre bien, qui est en définitive notre réconciliation avec le Père. Comme nous le voyons dans la synagogue de Capharnaüm, Jésus exerce Son autorité pour enseigner et guérir ; pour communiquer la vérité et la grâce. La vérité pour éclairer et la grâce pour sanctifier. La plus grande vérité qu’Il communique est la révélation de Dieu comme Père et de lui-même comme Fils éternel. La plus grande grâce qu’Il communique est de partager la vie du Père, faisant de nous « des participants de la nature divine » (2Pierre 1:4).
De même que Jésus reçoit son autorité du Père, de même il accorde à l’Église de participer à son autorité. « Comme le Père m’a envoyé, moi aussi je vous envoie » (Jean 20, 21). L’Église existe comme la présence permanente du Christ qui nous communique le double don de la vérité et de la grâce. Elle enseigne avec autorité, comme la voix authentique du Christ qui résonne depuis le sein du Père au long de l’histoire et à travers le monde. Elle communique la grâce du Christ qui chasse les démons, libère les âmes de la domination du mal et les imprègne de Sa propre vie.
La réalité et la gravité de l’autorité de l’Église devrait donner de l’humilité à ses bergers qui exercent au nom du Christ. Leur tâche n’est pas de réinterpréter l’Évangile ou de changer ses paradigmes mais de fidèlement transmettre la vérité et la grâce qui viennent du Père.
L’une des réalisations les plus néfastes de la pensée moderne est l’amalgame de l’autorité avec le pouvoir. Nous sommes conduits à croire qu’elle n’est qu’un accaparement du pouvoir. Quiconque a de l’autorité est de ce fait un oppresseur. L’autorité est toujours de l’autoritarisme. Dons l’autorité des institutions et du passé lui-même doit être démantelée car ce n’est que l’instrument des oppresseurs.
Comme toutes les révolutions, celle contre l’autorité finit par se dévorer elle-même. Ayant rejeté le principe d’autorité, la pensée moderne en vient à douter de l’autorité de la pensée elle-même. (Y a-t-il une discipline à l’université qui ne soit pas jugée oppressive et nécessitant d’être déconstruite?) Ironiquement, c’est l’Église catholique – cette institution la plus autoritaire et oppressive – qui intervient et confirme que oui, en fait, l’esprit humain est capable de saisir la vérité. L’autorité de l’Église intervient pour libérer l’esprit humain des chaînes du scepticisme.
« Nous ne voulons pas de cet homme pour roi » (Luc 19:22). Ces mots d’une des paraboles les plus obsédantes de notre Seigneur expriment le rejet auto-destructeur de l’autorité du Christ. L’âme fidèle, cependant, loin d’être irritée de cette autorité, désire y être soumise. Nous savons que, sans Son autorité sur nous, nous serions toujours dans l’erreur et le péché. Plus le Christ règne sur nous avec autorité, plus clairement nous voyons la vérité et plus librement nous vivons dans la grâce. En outre, plus nous nous soumettons à l’autorité de Sa vérité et de Sa grâce, plus nous devenons nous-mêmes des gens parlant et agissant avec autorité.
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