Au vu de la crise politique en France, en quoi Jeanne d’Arc est-elle une sainte d’actualité ?
Aymeric de Maleissye : Parce qu’elle est la sainte des temps de crise politique et qu’elle est patronne secondaire de la France. Elle a donc cette mission de veiller sur la France. Car « la mission propre que les saints ont reçue de Dieu, ont accomplie et qui leur vaut leur gloire dans le Ciel, se continue sur un mode suréminent dans la vie éternelle » (Élie Collin). Pour ces raisons, nous devons l’invoquer en ce temps de grande crise politique et morale.
« Le cœur de sa mission concerne l’autorité politique », écrivez-vous. Dans ce domaine, qu’a-t-elle à faire redécouvrir à l’Église et au monde ?
Sa mission, c’est l’affirmation de la royauté du Christ. Ce n’est pas un hasard si elle est née le jour de l’Épiphanie, à Domrémy, « la maison de saint Remi », qui a baptisé Clovis et reçu du Ciel la Sainte Ampoule qui servit à l’onction des rois de France. Je pense que l’Église doit saisir la double opportunité que constituent le centenaire, en 2025, de l’encyclique Quas primas « sur l’institution d’une fête du Christ-Roi », et, en 2031, le sixième centenaire de la mort de sainte Jeanne d’Arc pour actualiser son enseignement sur la royauté du Christ en des termes adaptés au monde d’aujourd’hui. Il en a besoin. Toute la mission de Jeanne parle de la royauté que Jésus doit exercer sur les nations, particulièrement sur la France. Comme le disait le cardinal Pie : « Quand Jésus-Christ ne règne pas par les bienfaits attachés à sa présence, il règne par toutes les calamités inséparables de son absence. » Nous en faisons la douloureuse expérience.
Pourquoi peut-elle être qualifiée de « sainte de l’espérance » ?
Parce que c’est sa grande vertu, celle qui regarde vers le futur, comme Jeanne ne cesse de le faire. On le voit dans ses prophéties : elle annonce la libération d’Orléans, les défaites anglaises, sa capture… L’abbé Jacques Olivier, dans sa thèse de théologie, en a recensé plus de quarante, toutes accomplies. Jeanne regarde vers l’avenir. Qui plus est, alors que les juges de Rouen, tous ecclésiastiques, la menacent de l’enfer jusqu’à la condamner à être réduite en cendres sur un bûcher, ce qui au Moyen Âge est compris comme empêchant la résurrection du corps, Jeanne ne cesse d’espérer la béatitude éternelle. Son dernier dialogue connu, qui rappelle celui de Jésus avec le bon larron, en donne la preuve. Alors qu’on vient lui apprendre qu’elle va être exécutée comme hérétique relapse, elle a cet échange émouvant : « Maître Pierre, où serai-je ce soir ? – N’avez-vous pas bonne confiance en Dieu ? – Oh oui, répond Jeanne, ce soir, par la grâce de Dieu, je serai au Paradis ! »
Vous semblez convaincu que la France peut renaître de ses cendres : cela semble bien improbable à vues humaines… ?
La désespérance est la grande tentation de notre époque. Tout dans l’actualité nous y pousse. Les Français, y compris bien des catholiques, ont l’impression que le pays est fichu. Et à vues humaines, ils ont probablement raison de le penser. Nous nous apprêtons à passer par des épreuves qui ont toutes les chances de conduire à la disparition d’une certaine France à laquelle nous sommes attachés. La France ayant apostasié par la voix de ses élites est comme condamnée à une mort spirituelle à laquelle personne ne voit aujourd’hui comment échapper. Mais ce raisonnement oublie que l’histoire de France est traversée par le surnaturel. L’épopée de Jeanne d’Arc n’est pas un phénomène isolé dans l’histoire de France. Elle ne peut s’expliquer sans une mise en perspective qui la replace dans un contexte qui fait régulièrement intervenir le surnaturel. Or Jeanne vient nous parler de la fidélité de Jésus, lui qui reste fidèle en dépit de nos infidélités. Il n’abandonnera pas la fille aînée de son Église.
Cela passe par un préalable, pensez-vous : la consécration de la France au Sacré-Cœur ?
Oui, il nous faut aujourd’hui encore satisfaire la demande exprimée par Jésus à sainte Marguerite-Marie Alacoque, lors de l’apparition du 17 juin 1689. Jésus veut que la France soit consacrée à son « Cœur adorable ». Cette consécration, qui doit être prononcée par l’autorité chargée des destinées de notre nation, entraînera d’immenses bienfaits. Jésus nous en a fait la promesse.
L’actualité est menaçante. La France a-t-elle encore un message à porter au monde ?
C’est le message de Jeanne d’Arc, celui de la royauté du Christ. Jeanne apporte deux messages. L’un à la France, la fidélité de Jésus, et l’autre au monde, le Christ est Roi. Je note d’ailleurs que ces deux messages rejoignent la demande faite par Jésus lui-même à Marcel Van à destination de la France : « Ô Amour de Jésus, nous prenons l’engagement – nous Français – de te rester fidèles – la fidélité de Jésus envers notre pays appelle notre fidélité en retour – et de travailler d’un cœur ardent à répandre ton Règne sur tout l’univers – message au monde de la royauté du Christ. » La France est par excellence la nation qui doit révéler que Jésus est Roi et qu’il règne par l’intermédiaire d’un Cœur dont elle, nation pécheresse, va prouver au monde qu’il est miséricordieux. Car elle va elle-même en faire l’expérience, n’en doutons pas. La fille aînée de l’Église est l’enfant prodigue qui reviendra vers le Père miséricordieux. L’histoire du Salut ne s’est pas arrêtée le jour de la Pentecôte. Elle continue et la France doit et va y contribuer de façon éminente par sa vocation particulière de nation « prédestinée » (Léon XIII) et de « prédilection de Jésus » (saint Pie X). C’est l’espérance à laquelle Jeanne nous invite !
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