Arsenic et vieilles ficelles - France Catholique
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Aumôniers militaires : servir les âmes et les armes
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Arsenic et vieilles ficelles

Alors que la législation sur la fin de vie pourrait s’aventurer sur un chemin inattendu, les partisans de l’euthanasie s’inquiètent et déclenchent une offensive aux méthodes éculées. Mais cela finit par se voir.
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© Coucouoeuf / CC by-sa

Si l’on est en droit de s’interroger sur les marges de manœuvre dont disposera François Bayrou pour engager une politique de redressement national, il est un point qui fait l’unanimité, que l’on s’en félicite ou qu’on le déplore : son arrivée à Matignon change la donne sur la question de la fin de vie. Michel Barnier n’avait pas tardé à donner des gages aux tenants de la « mort dans la dignité ». à l’inverse, le Béarnais – non sans courage – a dévoilé le piège grossier que recelait le projet de la loi sur la fin de vie, à savoir d’associer le développement des soins palliatifs et l’introduction de l’euthanasie dans un seul et même texte. Le Premier ministre l’a confirmé sur LCI (27/01) : le projet sera scindé en deux pour dissocier les deux approches. L’encouragement des soins palliatifs constitue un « devoir » selon le chef du gouvernement, tandis que l’euthanasie relève de la « conscience ».

Cette distinction n’a pas manqué de déclencher une levée de boucliers pavlovienne. « Risque de diversion », « manœuvre dilatoire »… En tête de l’offensive pro-euthanasie, le député Olivier Falorni – divers gauche – est même allé jusqu’à estimer, dans une lettre ouverte publiée le 27 janvier, que « l’aide médicalisée active à mourir est une forme ultime de soin palliatif ». Mais surtout, comme l’on pouvait s’y attendre, la prise de recul voulue par François Bayrou a donné lieu à une contre-offensive médiatique ahurissante, dont la coordination et la synchronisation laissent supposer une anticipation minutieuse.

Tout commence par l’interview poignante du journaliste sportif Charles Bietry, atteint de la maladie de Charcot, dans l’émission Sept à Huit sur TF1 (26/01), dans laquelle il plaide pour la légalisation rapide de l’euthanasie : « J’attends un sursaut de nos gouvernants, qu’ils votent cette loi à l’unanimité » y déclare-t-il. Deux jours plus tard (28/01), c’est le JT de France 2 qui prend le relais avec une longue séquence faisant la part belle aux zélateurs de l’injection, assimilée in fine par le professeur Maurice Mimoun, invité en plateau, à de « l’assistance à personne en danger », à « un soin », à un « acte de vie ».

Mobilisation médiatique

Le lendemain (29/01), l’émission C à vous sur France 5 emboîte le pas avec une présentatrice, Anne-Élisabeth Lemoine, qui – recevant la journaliste Marina Carrère d’Encausse – ne prend même plus la peine de dissimuler son positionnement. Son invitée, explique-t-elle, combat pour le « droit à mourir dans la dignité », et c’est la raison pour laquelle elle lui propose de réagir aux propos de François Bayrou qui « alimentent des fantasmes et des contre-vérités ».

Le point d’orgue de la semaine, enfin, sera le documentaire intitulé « Le choix d’Odette », présenté sur France 2 (30/01) par Élise Lucet, qui propose de suivre jusqu’à la seringue une femme québécoise de 64 ans atteinte d’un cancer incurable. « On pourrait croire aux préparatifs d’une fête d’anniversaire », peut-on lire dans Le Figaro TV (30/01) qui chronique l’émission.

Cette mobilisation, dont le service public s’est fait le fer de lance – sans que l’Arcom ne s’émeuve de l’absence quasi absolue de pluralisme – a bien sûr trouvé son écho dans la presse écrite et digitale. La position de François Bayrou procède de ses « convictions religieuses » suppose le Huffington Post (31/01) ; elle annonce un « recul » selon Franceinfo.fr (29/01)…

« Confusions perverses »

L’unanimité, cependant, est moins tangible. Dans La Croix (28/01), Loup Besmond de Senneville, considère qu’il s’agit d’une « clarification bienvenue ». Comme France Catholique dans son dernier numéro, Le JDNews (29/01) et Le Point (31/01) donnent longuement la parole à Claire Fourcade, présidente de la Société française d’accompagnement et de soins palliatifs (SFAP). Le Figaro (29/01), enfin, a publié une tribune de Laurent Frémont et du Pr. Emmanuel Hirsch, saluant la « dignité » de François Bayrou. « Face à la violence du débat public et au-delà des vaines polémiques, le Premier ministre nous a offert un discours en profondeur permettant de sortir des confusions et des stratégies perverses. Qui, dès lors, pourrait s’opposer à cette avancée, si ce n’est ceux qui s’acharneraient à prendre encore en otage l’accompagnement palliatif pour que l’on concède à légaliser l’euthanasie qui interrompt à la fois l’accompagnement et la vie ? » s’interrogent-ils.

La prudence s’impose néanmoins : la prise de position de François Bayrou n’arrête pas pour autant le processus législatif. Bien qu’ils soient distincts, les deux textes seront examinés parallèlement au Parlement, comme il l’a précisé le 28 janvier devant les députés centristes du groupe Les Démocrates. « On tient d’une main la Loi qui soigne et de l’autre la Loi qui tue. […] Avec deux textes de sens contraire, on retire des vies pour en prolonger d’autres », prévient Philippe de Villiers dans Le JDNews (29/01)…