Pour comprendre la pratique des indulgences, il faut d’abord prendre toute la mesure du péché et de ses conséquences. Le péché abîme notre relation avec Dieu, au risque de nous priver de la vie éternelle, « alors que l’âme humaine est faite pour vivre dans la grâce de Dieu », souligne Don Thomas Lapenne, chapelain au sanctuaire de Montligeon. Heureusement, cette relation, rompue par notre faute, est rétablie grâce à la confession sacramentelle.
Purifier les séquelles du péché
Mais tout ne s’arrête pas là. Car « le péché laisse des traces, souligne le pape François dans la bulle d’indiction du jubilé, il entraîne des conséquences » qu’il faut réparer. Pour autrui et pour le pécheur : de mauvaises habitudes, des difficultés à prier, des blessures morales… « Il reste, dans notre humanité faible et attirée par le mal, des effets résiduels du péché », résume le Saint-Père.
Ces séquelles nous empêchent de vivre pleinement la grâce de Dieu. Elles ont besoin d’être purifiées, ici-bas ou après la mort, dans l’état de purgatoire. « Cette purification libère de ce qu’on appelle la “peine temporelle” du péché », précise le Catéchisme de l’Église catholique.
C’est là qu’interviennent les indulgences. « L’indulgence est, selon le Catéchisme, la rémission devant Dieu de la peine temporelle due pour les péchés » déjà pardonnés par la confession. « Outre le sacrement de pénitence qui nous fait savourer le pardon de Dieu, l’Église dispose, pour nous et pour nos défunts, du don de l’indulgence, explique Don Thomas Lapenne. Puisque tout péché laisse des traces, notre âme a besoin d’être guérie et rétablie dans la grâce, comme une peinture endommagée par un acte de vandalisme a besoin d’être restaurée. C’est ce que l’indulgence opère : elle répare ce qui a été abîmé, elle élimine les conséquences du péché dans notre âme pour la rendre à la beauté de la grâce. »
À l’occasion du jubilé, l’Église peut donc accorder des indulgences qui remettent la peine temporelle due pour le péché. Elle le fait en vertu du pouvoir de lier et de délier que le Christ lui a confié. Cette « remise de peine » peut être totale si l’indulgence est plénière, ou seulement partielle. Le fidèle dont la peine est ainsi allégée voit son temps de purgatoire réduit. Jusqu’en 1967, l’Église traduisait cette réduction en nombre de jours ou d’années. Ce n’est plus le cas depuis la réforme des indulgences voulue par Paul VI, qui jugeait cette comptabilité trop humaine.
Respecter les conditions nécessaires
Encore faut-il que le fidèle respecte les conditions nécessaires pour mériter l’indulgence. Il ne suffira pas, à Rome, de passer la Porte sainte de l’une des basiliques papales. L’indulgence plénière requiert que le fidèle pose un acte indulgencié – par exemple, adorer le Saint-Sacrement une demi-heure en ayant l’intention de recevoir l’indulgence – et qu’il communie et prie aux intentions du pape le jour-même ; il doit aussi se confesser dans les jours qui précèdent ou qui suivent. La cinquième condition est le détachement complet du péché. « C’est la plus importante, car c’est en désirant être brûlé dès ici-bas par le feu de l’amour de Dieu que la peine due à nos péchés peut être réparée. Concrètement, il peut être bon de réciter un acte d’abandon à Dieu, ou un acte de contrition », recommandent les Missionnaires de la Miséricorde divine.
La miséricorde dont il bénéficie doit inciter le fidèle à « accomplir des œuvres de piété, de pénitence et de charité », souligne Paul VI. L’indulgence n’est donc pas une facilité offerte au pécheur mais un appel pressant à la conversion : c’est bel et bien un moyen destiné à stimuler notre piété – dont nous pouvons faire bénéficier les âmes du purgatoire, que nous pouvons libérer par nos prières et par nos œuvres, exerçant ainsi, dit Paul VI, « la charité au plus haut point ».