Il y a quelques jours, Maman a voulu organiser un pèlerinage à Lourdes, comme chaque année, juste pour la fête de l’Immaculée Conception de la Sainte Vierge. Il y avait peu de monde, mais l’essentiel y était : la grotte, le Gave, les piscines, l’eau dans les fontaines au pied du rocher, le chemin de Croix géant dans les hauteurs, les confessionnaux, les messes ici et là avec des chrétiens d’Espagne, de Roumanie, d’Italie, et de tant d’autres pays. Des petits groupes très pieux qui bravaient les bourrasques, revêtus d’imperméables-ponchos achetés pour quelques centimes d’euros. Ça leur donnait à tous des allures de « bibendums » sortis des chaînes de montage de Clermont-Ferrand ! Mais ce n’est pas cela que j’avais envie d’évoquer aujourd’hui, mais plutôt des magasins de souvenirs qui jalonnent les rues, les uns à côté des autres : Le Palais du Rosaire, Soubirous, l’Ermitage, Sainte Madeleine, Sainte Marie, Charles de Foucauld, et des milliers d’enseignes du même genre. Dans les vitrines et sur les étalages, des vierges en plastique, en plâtre ou en résine, des chapelets, des cierges, des gourdes. Devant une telle quantité, les clercs inquisiteurs et si savants ricanent et méprisent. Et, dans un même temps, les humbles achètent, emportent précieusement jusqu’au bout du monde ces petits souvenirs qui rappellent leur passage dans cette cité mariale. Ne trouvez-vous pas que c’est touchant ?
Une fête commerciale ?
C’est comme à Noël. Dans les rues, des guirlandes et des sapins ; dans les commerces, des santons, des boules, des étoiles ; sur les marchés, des huîtres, du saumon, du foie gras, des volailles ; dans chaque maison, des paquets cadeaux et des jouets par centaines. Devant cette profusion, les esprits chagrins et les dignitaires critiques clament que Noël est devenu une fête commerciale. C’est vrai. Mais, pourquoi ne pas se réjouir encore et toujours de ce que la Nativité soit l’occasion de réjouissances ? Les cloches vont sonner, les églises seront pleines en pleine nuit ; parmi les fidèles beaucoup ne reviendront pas à la messe avant un an. Ils entendront « Les anges dans nos campagnes », « Minuit chrétiens », « Douce nuit » et ils repartiront chez eux, le cœur en joie. Ils n’auront peut-être pas leur diplôme de théologie et ne feront pas leurs prières chaque matin et chaque soir, mais ils se seront approchés, un instant, du Sauveur. Lui, les regarde et les aime.
C’est comme à Pâques. Du chocolat, de l’agneau bien tendre, des panettones en forme de colombe, des œufs cachés dans le jardin. On est loin du Calvaire et du Tombeau vide. Pourtant, on est si près de la joie pascale et du Cœur de celui qui se fait reconnaître par les petits et les pécheurs. Un jour ils reviendront pour une dernière fois à l’église. Ils seront accompagnés de leurs famille et amis. Ces derniers pleureront, mais ils entendront encore une bonne parole dans l’église froide. Ils prendront un goupillon et jetteront quelques gouttes d’eau bénite sur le cercueil recouvert du voile noir ou violet.
Eh bien, savez-vous, je préfère ces rites séculaires, même éloignés du mystère divin, à la froideur des décorations de guirlandes sans étoiles, de monstres et de citrouilles, de têtes de mort ou de démons sur les balcons de certaines mairies, d’ornements bigarrés et de crosses violacées à la Merlin l’Enchanteur, voulues par des esprits embrumés ou tordus.
Jésus n’a jamais été invité à la table de Caïphe, d’Hérode ou de Pilate. Il allait dîner chez les publicains et laissait une femme de mauvaise réputation répandre du parfum sur ses pieds et les essuyer ensuite de ses longs cheveux. Il se laissait approcher par les jeunes enfants bruyants et espiègles qui ne saisissaient pas le sens profond de ses discours, mais aimaient sa paisible compagnie. Allons donc les rejoindre ! Nous nous en trouverons toujours bien.