C’est en 1871, année douloureuse pour l’Alsace qui vient d’être annexée à l’Allemagne, que Mgr Raess, évêque de Strasbourg, consacre son diocèse au Sacré-Cœur. Fleurissent dès lors dans la région associations, confréries et gardes d’honneur du Sacré-Cœur pouvant compter jusqu’à plusieurs milliers d’adhérents chacune.
Témoignage de foi
Deux statues monumentales témoignent de cet attachement des Alsaciens au Sacré-Cœur. La première est située à Wolxheim, à quelque vingt kilomètres de Strasbourg. Elle se dresse sur la colline du Horn, un splendide promontoire qui domine toute la région, de Strasbourg au mont Sainte-Odile. Dorée à l’or fin, cette statue est le fruit de l’initiative et de la générosité d’une famille du village.
Inaugurée au mois de juillet 1912, elle rappelle la foi des habitants qui souhaitaient se mettre sous la protection du Sacré-Cœur dans une période de tensions internationales. En effet, l’Alsace faisait alors partie de l’empire allemand et les habitants savaient que leur région était l’un des enjeux principaux des rivalités franco-allemandes. En cas de guerre, les Alsaciens redoutaient que les combats n’aient lieu sur leur sol et ne ravagent toute la région. L’armée allemande avait établi non loin de Wolxheim un fort immense, ouvrage militaire à la puissance de feu jusqu’alors inégalée. Face à la force de frappe militaire allemande, les Alsaciens opposent la statue du Sacré-Cœur et sa puissance pacificatrice. Sur le socle de la statue, une inscription rappelle les promesses de Jésus faites à sainte Marguerite-Marie, de bénédiction et de paix pour ceux qui vénèrent son Cœur Sacré. Émouvant témoignage de la confiance des habitants, cette statue dorée brille de mille feux sous le soleil alsacien.
Un an avant le Corcovado
La seconde statue du Sacré-Cœur a été édifiée dans les Vosges haut-rhinoises, à 730 mètres d’altitude, au sommet de la montagne du Galtz. Elle repose sur un imposant piédestal en ciment. La hauteur totale du monument est de 23 mètres, lui permettant de dominer toute la région de Colmar. Parfois appelée monument du Christ Protecteur, cette statue est inaugurée en 1930, un an avant le Corcovado de Rio de Janeiro, qui lui ressemble beaucoup. Là encore, c’est un particulier qui est à l’initiative de la construction : Antoine Muller, propriétaire de l’hôtel Notre-Dame, lance en 1922 une souscription publique pour financer la statue. Ce projet reçoit le soutien du maréchal Foch et du général Weygand.
En lien direct avec la Première Guerre mondiale, la statue du Galtz a une double fonction : action de grâce pour la protection accordée à la région pendant la guerre, et hommage aux victimes de la guerre. Les artisans du projet associent la Sainte Vierge Marie au Sacré-Cœur, par une allusion à Notre-Dame-des-Trois-Épis – haut lieu de pèlerinage alsacien –, représentée en bas du monument.
Ainsi, les Alsaciens ont su suivre la voie ouverte par Mgr Raess et n’ont pas oublié de se tourner vers le Cœur compatissant de Jésus afin qu’il leur apporte réconfort et espérance dans les épreuves.