Le pape contre Simone de Beauvoir - France Catholique
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Le Liban chrétien
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Le pape contre Simone de Beauvoir

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© Antoine Mekary /Godong

On s’interrogeait à propos de la visite du pape en Belgique, en raison de la situation de ce pays, où le phénomène de déchristianisation européen atteint des limites extrêmes. La visite papale a heureusement révélé qu’il existait des motifs d’espérer, comme l’atteste la présence de 50 000 fidèles à la messe célébrée dans le stade Roi-Baudouin.

Pour autant, il est apparu que des questions de fond qui tiennent à l’identité même de l’Église catholique demeurent posées. On en veut pour preuve la controverse qui s’est produite lors de la rencontre de François avec le monde universitaire de Louvain. Le recteur, Luc Sels, a ainsi interrogé le pape en des termes comminatoires : « L’Église de notre région ne gagnerait-elle pas en autorité morale si elle n’était aussi rigide dans son approche des questions de genre et de diversité ? Et si elle ouvrait davantage ses bras à la communauté LGBTQ+ comme le fait l’Université ? »

Néo-féminisme agressif

Sans répondre directement à cette interpellation, le pape a centré, le lendemain, son propos sur la nature féminine de l’Église : « L’Église est une femme. Ce qui caractérise la femme, ce qui est féminin, n’est pas déterminé par le consensus ou les idéologies. Et la dignité est garantie par une loi originelle qu’aucune loi ne peut donner ou enlever. À partir de cette dignité, commune et partagée, la culture chrétienne élabore de manière toujours renouvelée, dans différents contextes, la vocation et la mission de l’homme et de la femme et leur être mutuel, dans la communion. Non pas l’un contre l’autre, dans des revendications opposées, pas de féminisme contre machisme, mais l’un pour l’autre. »

Plutôt que de répondre sur le fond au pape, Françoise Smets, rectrice de Louvain, a publié – quinze minutes plus tard ! – un communiqué où elle souligne « une divergence majeure, en ce qui concerne la place des femmes dans la société ». François lui a brièvement répondu lors de sa conférence de presse dans l’avion du retour, en réitérant son insistance sur la différence féminine et la nature féminine de l’Église.

Ce qui transparaît dans cette polémique, c’est un désaccord anthropologique gravissime, qui montre à quel point une université catholique comme Louvain est imprégnée des idéologies contemporaines concernant le gender et ses déviations multiples. Parmi celles-ci, un néo-féminisme agressif qui prétend défendre la cause de la femme en niant son identité, celle que défend François, héritier d’une longue tradition chrétienne. Il est vrai que cette négation n’est pas d’aujourd’hui, puisqu’elle est centrale dans l’essai fameux de Simone de Beauvoir, Le Deuxième Sexe (1949). Une seule phrase pourrait définir l’ampleur du déni : « Peut-être le mythe de la femme s’éteindra-t-il un jour : plus les femmes s’affirment comme des êtres humains, plus la merveilleuse qualité de l’Autre meurt en elle. »

J’ai eu l’occasion d’analyser cette déconstruction de l’éternel féminin dans un ouvrage où je remarquais : « Si on coupait les ailes à la poésie et donc à l’éternel féminin, il y a fort à parier que ce ne serait pas la femme concrète et libre qui y gagnerait mais un autre imaginaire qui ne ferait plus sa place à la différence et confinerait à l’indistinction » (L’amour en morceaux ?, Presses de la Renaissance, 2000).

« Un sein maternel »

Mais il y a aussi une dimension théologique, inscrite dès le début de la Bible, à cette distinction anthropologique. Le pape y a insisté en rappelant la nature foncièrement féminine de l’Église, qu’un Balthasar avait mise en valeur. Lequel rappelait : « Chez les Pères de l’Église, l’Église est considérée, surtout dans ses actes sacramentels, comme un sein maternel qui met au monde, et pour tous ceux qui sont nés, comme une mère qui les élève » (Qui est l’Église ?, Parole et Silence).

Voilà qui est complètement étranger au néo-féminisme de Louvain, à celles qui imaginent les femmes en prêtres, parfait aboutissement de l’indistinction. Alors qu’il y aurait à réfléchir sur le féminisme accompli qui est celui d’une Thérèse de Lisieux, d’une Élisabeth de la Trinité et d’une Edith Stein.