Le trésor de Chartres, un catéchisme en images - France Catholique
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Le trésor de Chartres, un catéchisme en images

Vingt-cinq ans après sa fermeture au public, le Trésor de la cathédrale est de nouveau visible. L’occasion de découvrir les plus belles pièces de ce Trésor vieux de plus de sept siècles. Reportage.
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Tabernacle dit de Saint-Aignan, XIIIe siècle.

Tabernacle dit de Saint-Aignan, XIIIe siècle. © DRAC CVL, F. Lauginie

À peine le visiteur a-t-il quitté Notre-Dame du Pilier et la relique du Voile de la Vierge, et gravi les marches du déambulatoire de la cathédrale de Chartres menant à la chapelle Saint-Piat, qu’il tombe nez à nez avec une Vierge à l’Enfant du XVIe siècle en pierre calcaire polychromée. « Il était important pour nous de l’installer à l’entrée du Trésor, afin de faire comprendre que le Trésor s’est constitué autour de la Vierge », explique Irène Jourd’heuil, conservateur régional adjoint des Monuments historiques. Dans cette chapelle restaurée, et sous l’œil de Marie, se déploie une partie du formidable Trésor de Chartres, connu par des inventaires depuis 1322. Cent cinquante objets ou ensembles d’objets ont ainsi été restaurés et disposés dans la chapelle, ainsi que dans la salle capitulaire et ses deux tourelles, après un investissement d’environ 6 millions d’euros.

Pillé à la Révolution

La dévotion mariale des fidèles et des grands donateurs explique l’abondance des pièces remarquables versées au Trésor. S’il fut pillé à la Révolution, comme de nombreux autres Trésors de France, par des révolutionnaires avides de récupérer l’or et l’argent, quelques pièces subsistent d’une période d’Ancien Régime caractérisée par le faste, à l’image d’un reliquaire dit « de la Circoncision », abritant un Christ en ivoire du Xe siècle, ou encore une navette à encens d’argent et de nacre, offerte par Mgr Miles d’Illiers (v. 1410-1493). Autre élément remarquable, déposé au Trésor par le musée du Louvre : l’unique retable d’Ancien Régime de la cathédrale encore existant. À deux pas de là, le splendide tabernacle dit de Saint-Aignan : datant de la première moitié du XIIIe siècle, en émail champlevé – c’est-à-dire creusé –, il rappelle jusqu’où l’art peut s’élever dès lors qu’il se met au service d’une foi qu’il prend au sérieux.
« Nous voulons que les visiteurs ressentent un émerveillement, mais également mettre à l’honneur ces pièces en faisant en sorte qu’elles gardent leur sens liturgique, car ce Trésor est un catéchisme grandeur nature, relève Irène Jourd’heuil. Nous ne sommes pas dans un musée et nous prévoyons de signaler quand tel ou tel objet sera absent car en usage pour une liturgie dans la cathédrale. » Une façon de montrer que le Trésor de Chartres est bien vivant, puisque tout entier dédié à la liturgie.

Colliers de coquillages

Le Trésor présente d’autres pièces, plus inattendues et parfois même émouvantes. Parmi elles, des colliers de coquillages offerts en action de grâce à la cathédrale de Chartres au XVIIe siècle par les Hurons et les Abénaquis d’Amérique, qui s’étaient placés sous la protection de Notre-Dame de Chartres. Ces peuples autochtones avaient été évangélisés par des Pères jésuites chartrains, comme le Père Martin Bouvart. « Ce sont des colliers d’une valeur immense pour les Hurons et Abénaquis » insiste Fabienne Audebrand, conservateur des Antiquités et Objets d’art d’Eure-et-Loir. La dévotion mariale particulièrement vivante à Chartres permet aussi au Trésor de revendiquer une rareté : des armures médiévales données pour remercier la Vierge Marie de sa protection, à l’instar de celle de Charles VI – longtemps attribuée à Philippe le Bel –, dont les fleurs de lys, présentes sur le bassinet – le casque de l’armure – ont été arrachées à la Révolution pour être fondues. Le Trésor propose également une robe pour Notre-Dame du Pilier, brodée par des carmélites au XVIIe siècle, ou encore une réplique de Notre-Dame de Sous-Terre, qui servit à la reproduction de l’originale, détruite, là encore, à la Révolution.

Une Vierge maternelle

La visite du Trésor se conclut avec de grandes pièces du jubé du XIIIe siècle, démonté au milieu du XVIIIe siècle afin d’appliquer les directives du concile de Trente (1545-1563), pour qui ces tribunes à l’entrée du chœur empêchaient les fidèles de bien voir l’offrande de la messe. Parmi les fragments conservés et restaurés, de touchantes représentations de l’enfance du Christ et notamment une Nativité où la Vierge Marie est maternellement penchée sur l’Enfant-Jésus emmailloté. Dans cette salle capitulaire, le visiteur ne doit pas oublier de lever les yeux : la restauration des lieux a mis à jour des peintures des années 1320. Parmi les scènes y figurant se trouve la plus ancienne représentation connue de la cathédrale. Notre-Dame de Chartres y est représentée en construction en présence de la Vierge elle-même, comme le raconte la légende locale.