Pour retrouver Marie dans la littérature française, il faut remonter à François Villon qui composa une célèbre prière à Notre-Dame à la demande de sa mère. Mais l’élan marial n’est pas que littéraire. La France est couverte de cathédrales dédiées à Notre Dame et, au XIXe siècle, a vu une efflorescence de pierres dont la basilique de Fourvière à Lyon est peut-être le plus bel exemple. Ce chant de pierres édifié par la foi et la charité d’une grande ville manifeste la royauté de Marie qui trône dans un chœur entouré de mosaïques. Sur l’une d’elles est représenté le vœu de Louis XIII où l’on voit le roi et la reine, Anne d’Autriche, rendre grâce pour la naissance du dauphin. Par ce même vœu, Louis XIII consacrait le royaume de France à Marie et instaurait les processions du 15 août.
Péguy et Notre-Dame
Plus récemment, les pèlerins de Chartres se souviennent des strophes dans lesquelles Charles Péguy présentait la Beauce à Notre-Dame de Chartres : « Étoile de la mer voici la lourde nappe/Et la profonde houle et l’océan des blés/Et la mouvante écume de nos greniers comblés,/Voici votre regard sur cette immense chape »… Péguy, très sévère pour ses propres œuvres avait écrit de celle-ci à son ami Lotte : « Je crois qu’elle est assez bien venue. »
On ne peut pas oublier non plus le « Je vous salue Marie » de Francis Jammes que Georges Brassens a mis en musique, le « Il est midi, l’église est ouverte, il faut entrer… » de Paul Claudel. Mais le plus significatif et le moins connu est l’Ode à l’Immaculée Conception que Mistral écrivit le 8 décembre 1880 pour servir de préface à un recueil de traductions de « la bulle sur l’Immaculée Conception » dans tous les idiomes de France. Mistral est né un 8 septembre, jour de la Nativité de Marie, et mort le 25 mars 1914, jour de l’Annonciation. Il était à l’évidence marqué du signe marial. Ce poème se termine ainsi : « Sainte Marie éclaire-nous !/Que notre race ne s’enténèbre pas/Dans les ivresses, la fumée et l’orgueil/De la matière ! Oui déchire/De ta splendeur la nuit obscure/Qu’aujourd’hui sur le monde entier le mal répand./Avec ton fils qui saigne encore sur ton giron,/ Éblouis, ô Mère,/Tous les malfaiteurs qui sèment l’ivraie. »
Des croisés à la Corse
Adhémar de Monteil, l’évêque du Puy composa pour les croisés le Salve Regina où l’on chante cette strophe étonnante « ad nos converte », « vers nous tourne ton regard », comme si on suppliait la Reine des Cieux de se convertir à nos misères. Une version populaire de ce chant des croisés est devenue l’hymne national de l’île de Corse, proclamant que la Corse est un royaume dont Marie est la seule reine : « Dio vi Salvi Regina », « Salut ô Reine ». Le 8 septembre est devenu la fête nationale de l’île, comme elle est célébrée lors du Vœu des échevins à Lyon.
Ailleurs, innombrables sont les villes qui célèbrent l’intercession de Marie, les protégeant de la peste ou de l’invasion étrangère. Le siècle de la Renaissance catholique après la Révolution fut un siècle d’apparitions mariales. Le ciel s’entrouvrit pour donner à la terre des lueurs d’espérance et ce fut toujours l’œuvre de Marie, versant sur ses enfants un amour vraiment maternel qui leur rappelle toujours la même chose, comme à Pontmain : « Mais priez mes enfants, mon Fils se laisse toucher. » Par son intercession nous serons sauvés et selon les mots de l’hymne corse nous jouirons de la gloire éternelle en Paradis : « Eterna gloria in paradiso. »